(Ottawa) La Cour suprême du Canada conclut que le gouvernement du premier ministre de l’Ontario, Doug Ford, pouvait garder confidentielles les lettres de mandat aux ministres.

Le réseau anglais de Radio-Canada (CBC) avait demandé, en vertu de la loi provinciale sur l’accès à l’information, les lettres écrites aux ministres après la victoire de M. Ford aux élections de 2018. Mais cette demande d’accès avait été refusée, au motif que la divulgation des documents révélerait la substance des délibérations du Cabinet, qui sont confidentielles en vertu du « privilège du Cabinet ».

Le Commissaire à l’information et à la protection de la vie privée de l’Ontario n’était pas de cet avis et il a ordonné au gouvernement de publier les lettres de mandat. Deux autres instances judiciaires en Ontario se sont également rangées du côté de la CBC.

Mais la Cour suprême a statué vendredi, dans un arrêt unanime, que les lettres étaient exemptées de toute divulgation publique.

Bien que la décision du plus haut tribunal soit unanime, l’un des sept juges qui ont entendu l’affaire est arrivé à la même conclusion que la majorité, mais pour des motifs différents.

« La législation sur l’accès à l’information établit un équilibre entre le besoin de savoir du public et la confidentialité nécessaire pour que l’exécutif puisse gouverner efficacement », écrit la juge Andromache Karakatsanis au nom de la majorité.

« Les deux sont essentiels au bon fonctionnement de notre démocratie. Le présent pourvoi porte sur l’équilibre entre ces deux principes fondamentaux. »

Le gouvernement Ford avait plaidé que la confidentialité, la franchise et la solidarité du Cabinet étaient fondamentales dans un système dans lequel les ministres responsables décident collectivement de la politique gouvernementale. La CBC avait plaidé que la divulgation était importante pour que les citoyens soient informés et que les élus puissent rendre des comptes.

Il ne fait aucun doute que l’accès du public aux informations détenues par le gouvernement est vital pour le processus démocratique, écrit la juge Karakatsanis. Mais dans ce cas précis, le Commissaire à l’information et à la vie privée a interprété de manière trop étroite l’exemption à la liberté d’information concernant les délibérations du Cabinet.

« Dans la démocratie constitutionnelle du Canada, la confidentialité des délibérations du Cabinet est une condition préalable au gouvernement responsable, car elle permet la responsabilité ministérielle collective », écrit-elle.

« À la base, la confidentialité du Cabinet favorise la reddition de comptes de l’exécutif en permettant les désaccords privés et la franchise dans les délibérations ministérielles, malgré la solidarité publique. »

Les lettres de mandat en question ont par ailleurs été rendues publiques en septembre dernier, après qu’une source les a fournies à Global News.