Cet automne, cela fera deux ans qu’Ève n’habite plus avec ses parents. Depuis quelques mois, ceux-ci n’ont droit qu’à deux heures de rencontre supervisée par semaine avec leur fille au centre spécialisé. Nancy alterne toutes les deux semaines avec son ex-conjoint.

En mai dernier, une juge a déclaré que la sécurité et le développement d’Ève étaient toujours compromis en raison des attitudes parentales non appropriées, des réactions non appropriées des parents, des mauvais traitements physiques commis par le conjoint de la mère et de la tolérance par la mère des comportements inconvenants de son conjoint.

Les contacts entre Ève et ses parents pourront être normalisés lorsque la situation de l’enfant sera stabilisée et que les parents rempliront les attentes, conclut la juge. Elle leur recommande de poursuivre « leurs démarches en lien avec leurs difficultés ».

« Comment vous voulez qu’on travaille des choses si ma fille ne vient plus chez moi ? », s’interroge toutefois sa mère.

Si au moins l’état d’Ève s’améliorait sous la responsabilité de la DPJ, se dit Nancy. Or, depuis deux ans, les crises se multiplient. Tout comme les interventions policières. Certes, Ève fait certains progrès, selon les rapports de la DPJ et les notes des intervenants, mais ceux-ci demeurent fragiles, au mieux.

« Ils écrivent que le retour en milieu familial est “très sombre”. Je m’excuse ! Sur quoi vous vous basez ? Comment on peut vous prouver qu’on est capables ? Pourquoi on ne serait pas capables ? J’ai juste voulu chercher de l’aide », lance Nancy, dans un cri du cœur.

« Je me suis dit : maintenant que la DPJ est là, ça va tellement être mieux ! On va avoir des ressources, on va être encadrés. Hey ! mais c’est entièrement le contraire », s’exclame le beau-père d’Ève, en entrevue.

J’aurais aimé que la DPJ offre des services, de l’aide, des spécialistes, pour travailler avec la famille.

Le beau-père d’Ève

Récemment, le Tribunal a retiré à Nancy le droit de prendre des décisions concernant la santé de sa fille. C’est qu’au printemps 2023, Nancy a mis fin au suivi de sa fille en pédopsychiatrie, sans l’accord de la DPJ. En entrevue, elle explique avoir pris cette décision pour confier sa fille à son premier médecin, prêt à tenter une nouvelle médicamentation.

Nancy se demande maintenant quoi faire, concrètement, pour récupérer la garde de sa fille. « Ils disent que je fais “trop de câlins” », s’exclame-t-elle. Désemparée, elle craint que sa fille reste sous la garde de la DPJ jusqu’à ses 18 ans.

« Je veux être là pour elle. On veut toujours le mieux pour nos enfants », conclut Nancy.

Steve aimerait voir plus souvent sa fille. Mais surtout, il souhaite qu’elle obtienne plus de soins.

On lui demande comment il se sent. Un long silence suit.

« Je me sens impuissant, en colère, en pleurs », lâche-t-il.