Le président de la Commission de vérité et réconciliation, Murray Sinclair, a dénoncé dans un communiqué « une omission béante » dans les excuses papales de lundi.

« La déclaration du Saint-Père a laissé une omission béante dans la reconnaissance du rôle de l’Église dans le système des pensionnats autochtones, en identifiant seulement des membres de l’Église. Il est important de reconnaître que l’Église n’était pas seulement un agent de l’État ou un participant des politiques gouvernementales, mais a été l’une des principales instigatrices des chapitres les plus sombres de l’histoire de ce pays. »

Lundi, le pape François a déploré, sur le site de l’ancien pensionnat de Maskwacis, les agissements de « nombreux membres de l’Église et des communautés religieuses ». Il a utilisé les mots « catastrophiques » et « erreur dévastatrice », mais à propos des « politiques liées aux pensionnats ».

« Il y a des exemples clairs dans notre histoire où l’Église a appelé le gouvernement du Canada à être plus agressif et audacieux dans son travail de destruction de la culture, des traditions et des croyances autochtones », a avancé M. Sinclair, sans donner de détails. « Il s’agissait d’un effort institutionnel de couper les enfants de leur famille et de leur culture, au nom de la suprématie chrétienne. »

PHOTO FRED CHARTRAND, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Le président de la Commission de vérité et réconciliation, Murray Sinclair, en 2019

M. Sinclair s’en prend aussi à la « doctrine de la découverte », un ensemble de documents juridiques datant de la Renaissance. Ces bulles papales ont attribué aux diverses puissances européennes le droit de prendre possession des terres des Autochtones et de convertir ces derniers au christianisme.

Raymond Poisson, évêque de Saint-Jérôme et président de la Conférence des évêques catholiques du Canada, estimait en entrevue avec La Presse le printemps dernier que beaucoup de recherches dans les archives du Vatican seront nécessaires pour répondre à cette demande. « ‟Doctrine de la découverte”, c’est un terme américain, a dit Mgr Poisson en entrevue de Rome. Ce n’est pas une doctrine au sens catholique, quelque chose à quoi tous les croyants doivent adhérer. Nous allons voir s’il y a des bulles papales à répudier. Il pourrait aussi y en avoir d’autres qui ont défendu les peuples autochtones. »

Des critiques plus dures

Les critiques de M. Sinclair sont plus dures que celles qu’il a eues à l’égard du chef de l’Église anglicane, Justin Welby, qui a visité en mai trois sites d’anciens pensionnats pour Autochtones en Ontario et en Saskatchewan pour demander pardon pour le rôle de son Église dans ce système et rencontrer d’anciens élèves des pensionnats. M. Sinclair avait reproché à Mgr Welby de ne pas avoir rencontré davantage de communautés autochtones.

PHOTO TIRÉE DU SITE DE L’ARCHEVÊCHÉ DE CANTERBURY

Le chef de l’Église anglicane, Justin Welby (au centre), à Prince Albert, en Saskatchewan, en mai

L’Église catholique a géré les deux tiers des pensionnats pour Autochtones. Le reste était supervisé par des Églises protestantes.

La Commission de vérité et réconciliation a été créée par le gouvernement fédéral et a entendu pendant six ans des témoignages sur les pensionnats pour Autochtones partout au pays. Un rapport a été publié en 2015. M. Sinclair est un avocat anichinabé de la Saskatchewan qui a été sénateur et dirige maintenant l’Université Queens, en Ontario.