(Ottawa) La ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire, Marie-Claude Bibeau, a réitéré lundi sa confiance dans l’indépendance de l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA), qui s’en tire avec une tape sur les doigts après qu’un document portant sur une nouvelle génération d’organismes génétiquement modifiés (OGM) indique le nom d’une dirigeante d’un lobby agrochimique comme l’auteure dans les métadonnées.

« L’Agence canadienne d’inspection des aliments est une agence indépendante dont les orientations sont basées sur la science. Dans l’exercice de son mandat, elle consulte les parties prenantes de tous les horizons — ainsi que d’autres sources indépendantes – afin de prendre des décisions éclairées », écrit-elle dans une déclaration transmise à La Presse Canadienne par son bureau.

Mme Bibeau estime cependant que l’ACIA doit tout de même apporter des améliorations sur le traitement des documents.

« Je mets en question la façon dont le document a été partagé et j’ai demandé à la haute direction de faire les suivis et d’apporter les correctifs nécessaires », mentionne-t-elle.

Qui est l’auteur ?

Dans un courriel d’explications à la suite d’une demande de commentaires au sujet d’un article publié lundi par Radio-Canada, l’agence insiste être l’unique auteur du document

L’organisation raconte que, dans le cadre de consultations, une ébauche de mise à jour d’une partie du règlement sur les semences a été transmise à des associations de l’industrie représentant les développeurs de semences pour qu’elles fournissent de la « rétroaction ».

C’est « dans l’une des copies retournées » que l’ACIA a continué de travailler, mentionne-t-on. Cette copie porte les métadonnées associées à Jennifer Hubert, la directrice générale du secteur de la biologie végétale au lobby CropLife Canada.

Le document a été « révisé » par l’ACIA et « ensuite été communiqué à un groupe d’intervenants plus larges », dont des organismes sans but lucratif et des associations biologiques pour recueillir leurs commentaires.

Les « directions clés proposées » ont été rédigées par l’agence, soutient le porte-parole. Il ajoute que « les parties externes, y compris les associations d’industries, ne sont pas les auteurs des documents de l’ACIA ».

« Main dans la main »

Dans un communiqué, le groupe militant Vigilance OGM estime qu’il est « scandaleux » que le gouvernement fédéral « laisse les lobbys faire leurs propres règlements » en utilisant les documents créés par les représentants de l’industrie des pesticides et des OGM « comme proposition réglementaire » des nouvelles semences d’OGM.

Appelé à réagir aux explications de l’ACIA, le coordinateur de l’organisme, Thibault Rehn, a répondu qu’il « n’achète pas leurs explications », lui qui a reçu le document « écrit par l’industrie » et ensuite « peut-être modifié » par l’Agence canadienne d’inspection des aliments.

Quoi qu’il en soit, M. Rehn estime que la situation actuelle « prouve à quel point » l’ACIA a « tellement l’habitude de travailler main dans la main que de s’échanger des documents et prendre des documents écrits par l’industrie, ça ne semble pas poser de problèmes ».

Son groupe note également que l’ACIA semble consulter d’abord l’industrie avant les autres partenaires alors que les parties qui ont des intérêts financiers dans des changements réglementaires devraient être contactées après les agriculteurs, la société civile et les scientifiques indépendants.