Ottawa naviguerait sans boussole dans sa volonté de régulariser massivement le statut des sans-papiers sur son territoire.

La lettre de mandat remise au ministre fédéral de l’Immigration, Sean Fraser, par le premier ministre Justin Trudeau, au moment de sa nomination en décembre 2021, l’enjoint à « poursuivre l’exploration de moyens de régulariser le statut des travailleurs sans papiers qui contribuent aux communautés canadiennes ».

Selon Radio-Canada, le gouvernement fédéral souhaiterait amorcer une démarche de régularisation massive dès cet été, mais au Québec, une telle décision doit recevoir l’aval du gouvernement Legault, qui a le dernier mot sur l’accueil de nouveaux arrivants en vertu de ses pouvoirs en immigration.

« Entre 20 000 et 500 000 »

Or, si la ministre québécoise de l’Immigration, Christine Fréchette, répète qu’elle est ouverte à aller de l’avant, elle continue de réclamer des chiffres qui, semble-t-il, n’existent pas.

« C’est une des choses pour lesquelles on attend des informations. Les seuls chiffres qu’on nous a donnés au fédéral, c’est que ça concernerait entre 20 000 et 500 000 personnes (à l’échelle canadienne). Alors, entre ça et ne pas avoir d’estimé, c’est la même chose », a-t-elle laissé tomber en mêlée de presse à l’issue d’une annonce en francisation à Montréal, mardi.

Les voies de communication sont tout de même ouvertes. « Il y a eu des premiers contacts, des premiers échanges », a-t-elle précisé.

Mme Fréchette reconnaît qu’il n’est guère simple d’avoir des données précises dans le cas des sans-papiers. « On parle de gens pour qui on n’a pas une connaissance fine de la réalité parce que ce sont des gens qui œuvrent d’une manière un peu souterraine, mais on attend quand même d’avoir un estimé plus précis en ce qui a trait au Québec. »

En d’autres termes, le gouvernement fédéral n’a pas plus de précisions à offrir à l’échelle provinciale qu’il n’en a à l’échelle pancanadienne et en l’absence d’un ordre de grandeur, la décision de Québec devient difficile à prendre.

Un actif pour la société

Il n’y a cependant pas de réticence à accueillir ces éventuels nouveaux citoyens, particulièrement dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre, s’empresse de préciser la ministre Fréchette.

« Ces gens-là sont déjà ici, ils sont actifs dans une variété de secteurs économiques, donc ça va faire partie des réflexions de savoir un peu plus qui ils sont, de qui il s’agit », mais pour ça, répète-t-elle, il faut savoir « combien sont au Québec ».

La plupart des personnes désignées comme étant des sans-papiers sont des personnes entrées légalement au Canada, mais qui ont perdu leur statut, soit par l’expiration d’un permis de travail ou d’un visa. Cette catégorie comprend également les demandeurs de statut de réfugié qui ont essuyé un refus, mais qui se trouvent toujours au Canada pour diverses raisons. Dans tous les cas, ce sont des personnes qui n’ont pas l’autorisation de résider ou de travailler au Canada, ce qui exclut les travailleurs temporaires et les demandeurs d’asile dont le dossier est toujours à l’étude.