(Ottawa) La Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN) doit donner l’exemple en s’assurant que les francophones soient représentés dans son conseil d’administration, a répété à plusieurs reprises le ministre des Transports, Omar Alghabra, lundi. Bien qu’il n’ait pas fermé la porte à ce qu’un quota soit imposé par l’entremise de la loi, le gouvernement semble peu enclin à aller dans cette direction.

« Est-ce que vous seriez à l’aise de proposer, vous, comme ministre des Transports […], une obligation dans la loi pour forcer les conseils d’administration à mettre de la représentation francophone en pourcentage ? », lui a demandé le député conservateur Joël Godin, en comité parlementaire.

« Le CN et Air Canada sont des entreprises privées, a rappelé le ministre. Cela étant dit, je suis très intéressé par la protection des droits des clients et des employés qui peuvent choisir la langue de leur choix. »

Il a par la suite ajouté qu’il ne voulait pas présumer des amendements qui seront suggérés durant l’étude en comité du projet de loi C-13 pour moderniser la Loi sur les langues officielles.

Le CN, qui est assujetti à cette législation, a fait les manchettes en avril après que La Presse eut révélé que la plus grande société de chemin de fer du pays avait fermé les portes de son conseil d’administration aux francophones, et ce, même si son siège social est à Montréal.

« On a parlé avec le CN et on a dit qu’on s’attend à ce qu’il corrige cette erreur dès que possible », a indiqué M. Alghabra.

Des employés ont également dénoncé plusieurs incidents linguistiques survenus à la gare de triage Taschereau avec l’arrivée d’employés unilingues anglophones.

« Il faut agir maintenant puisqu’on sait que ça touche aussi la question de sécurité, a fait valoir la députée néo-démocrate Niki Ashton. Qu’est-ce que vous attendez pour agir ? Est-ce qu’on va attendre qu’un accident se produise qui soit lié à l’incompréhension des instructions entre les membres d’une équipe ? »

La langue officielle de leur choix

« Les Québécois doivent pouvoir travailler en français au Québec », avait affirmé le ministre, en français, au début de son témoignage. Plusieurs députés l’ont d’ailleurs félicité d’avoir amélioré sa maîtrise de la langue.

Un peu plus tard, il s’est dit d’accord avec le fait que les employés doivent pouvoir travailler dans la langue officielle de leur choix. « Il serait inacceptable pour le CN de ne pas remplir cette obligation même avant l’adoption du projet de loi C-13 », a-t-il répondu.

Ce projet de loi donne cinq nouveaux pouvoirs au commissaire aux langues officielles pour faire appliquer la Loi sur les langues officielles : la médiation informelle, la publication de ses décisions, l’imposition d’amendes, la conclusion d’accord de conformité et le pouvoir d’ordonnance.

Le CN a fait l’objet de cinq plaintes en 2019 et 2020 portant sur la langue de travail, a révélé le ministre. Un nombre moins élevé que les plaintes contre Air Canada, qui en accumule environ 80 bon an, mal an, puisque la société ferroviaire ne transporte pas de passagers.

« On voit que ça ne fonctionne pas », a fait valoir le député du Bloc québécois Mario Beaulieu. Il estime que les employés du CN au Québec devraient utiliser une seule langue commune : le français. « Pourquoi ne pas laisser le Québec appliquer la loi 101 aux entreprises de compétence fédérale ? »

« Il faut aussi respecter le droit des individus qui ne parlent pas français pour qu’ils puissent faire leur travail en toute sécurité, a indiqué M. Alghabra. Nous voulons protéger les droits des deux langues. »

Le contrôle de la gestion ferroviaire du CN a été transféré en Alberta au début de 2020. Cette décision avait rapidement déclenché plusieurs « irrégularités » dans l’est du pays, selon le syndicat des Teamsters, qui représente des ingénieurs de locomotive, des chefs de train et des chefs de triage.