(Québec) Fortement préoccupée par la question du travail des enfants, Marwah Rizqy réclame la création d’un comité transpartisan qui se mettrait à l’œuvre dès cet été.

La députée libérale a fait part de ses inquiétudes aux ministres du Travail et de l’Éducation, Jean Boulet et Jean-François Roberge, vendredi, dans une missive obtenue par La Presse Canadienne.

Elle veut qu’on étudie la possibilité, au Québec, d’imposer un âge légal minimum pour travailler, ainsi qu’un nombre maximum d’heures pouvant être travaillées par un jeune.

« Avec la pénurie de main-d’œuvre que le Québec traverse actuellement, vous n’êtes pas sans savoir que le recrutement des jeunes travailleurs devient de plus en plus préoccupant », écrit-elle.

« De nombreux articles ont fait état, dans les dernières semaines, d’enfants de 11 ou 12 ans déjà au travail, en pleine année scolaire. Cette situation nous préoccupe au plus haut point. »

Contrairement aux autres provinces canadiennes, le Québec n’impose pas d’âge minimum légal pour travailler. Avec l’autorisation des parents, un enfant peut commencer à travailler dès qu’il le souhaite.

« Or, nous savons tous que cette autorisation prévue dans la loi est souvent bafouée par les employeurs », déplore Marwah Rizqy, qui co-signe la lettre avec son collègue, le député Frantz Benjamin.

Ils réclament une rencontre d’urgence avec les ministres, afin de trouver des « solutions » d’ici la prochaine rentrée scolaire.

En entrevue, Mme Rizqy propose la création d’un comité transpartisan, qui réunirait dès cet été des élus de tous les partis politiques.

« Moi, j’ai envie de participer. […] Qu’ils ouvrent la discussion pour qu’on travaille de façon intelligente tous ensemble », s’est-elle exclamée.

Elle n’exclut pas non plus l’idée d’entendre différents intervenants en commission parlementaire cet automne.

Car le travail des enfants est un enjeu qu’on « aurait dû voir venir » et qui est bien « réel », soutient la députée de Saint-Laurent.

« Ce n’est pas vrai qu’une génération d’adolescents va être sacrifiée parce qu’on n’aura pas été capable d’endiguer le problème de pénurie de main-d’œuvre », peste-t-elle.

Elle s’inquiète des risques associés au travail précoce, notamment les incidences sur le décrochage scolaire et les accidents de travail (ils ont bondi de 36 % chez les moins de 16 ans en 2021).

« Il est possible qu’un jeune dise : “Je n’ai pas besoin de mon secondaire 5, je fais déjà 26 $/heure” », souligne Mme Rizqy.

En vertu de la Loi sur l’instruction publique, une personne de 16 ans ou moins qui n’a pas obtenu de diplôme ne peut travailler durant les heures de classe.

Or, « un jeune qui termine à 23 h, […] il arrive chez lui vers 23 h 30–minuit, puis le lendemain, il a de l’école. Est-ce qu’on trouve ça normal ? » demande l’élue libérale.

Elle note également qu’un enfant de 11 ans ne connaît ni ses « limites », ni les « règles en matière de harcèlement au travail ».

Mardi dernier, après avoir reçu un avis du Comité consultatif du travail et de la main-d’œuvre, le ministre Boulet s’est engagé à mener une réflexion « approfondie » sur cet enjeu.

Il a déclaré avoir demandé à son ministère de « faire l’inventaire de toutes les dispositions […] qui concernent le travail des enfants ». Il fera par la suite une « comparaison avec les législations dans d’autres provinces ».

« On va faire une analyse d’impact, puis on va déterminer la nécessité ou non de parfaire nos articles de loi », a affirmé le ministre, qui ne se donne pas d’échéancier précis.

La plateforme électorale du Parti libéral du Québec, rendue publique le 11 juin dernier, reste quant à elle muette sur l’enjeu du travail des enfants.

Vendredi après-midi, le bureau de M. Boulet a fait savoir qu’il acceptait la demande de Mme Rizqy de tenir une rencontre spéciale.

« Le ministre est sensible à ce phénomène et est favorable à rencontrer Mme Rizqy et M. Benjamin prochainement », a déclaré l’attachée de presse du ministre, Maude Méthot-Faniel.