(Ottawa) Une querelle diplomatique vient d’éclater entre l’Ukraine et le Canada. Les raisons de la discorde : les six turbines destinées au gazoduc russe Nord Stream 1 que le gouvernement Trudeau a accepté d’envoyer en Allemagne, faisant entorse à ses propres sanctions contre Moscou – une exemption qui a l’assentiment de Washington.

Le passe-droit accordé par Ottawa a ulcéré Kyiv, si bien que le chargé d’affaires de l’ambassade du Canada en Ukraine a été convoqué par le gouvernement ukrainien – ce qui n’est jamais un très bon signe en matière de relations bilatérales.

« Le ministère des Affaires étrangères a dû convoquer le représentant du Canada dans notre pays en raison d’une exception totalement inacceptable au régime de sanctions contre la Russie », a déclaré dans une vidéo publiée lundi sur son site web le président ukrainien, Volodymyr Zelensky.

Il n’est pas juste question de turbines pour le gazoduc Nord Stream. […] On parle de règles communes. Si un régime terroriste peut arracher une telle exception aux sanctions, quelles exceptions réclamera-t-il le lendemain, le surlendemain ?

Volodymyr Zelensky, président de l’Ukraine

La colère ukrainienne avait été clairement communiquée dimanche : « Ce dangereux précédent viole la solidarité internationale, va à l’encontre du principe de l’État de droit et n’aura qu’une conséquence : il renforcera le sentiment d’impunité de Moscou », a-t-on pesté dans une déclaration gouvernementale.

Le propriétaire et exploitant de la canalisation de 1200 kilomètres reliant la Russie et l’Allemagne, Gazprom, figure sur la liste canadienne des entreprises visées par des sanctions économiques. La société a plaidé qu’en l’absence de cet équipement, une réduction du volume serait inévitable – une version contestée par Kyiv.

Une fois l’équipement arrivé en Allemagne, Siemens Energy l’expédiera en Russie « dès que possible », a signalé une porte-parole de l’entreprise à La Presse. Il lui faudra obtenir une dérogation additionnelle, cette fois aux sanctions de l’Union européenne, pour cet envoi en territoire russe.

« Nos experts travaillent actuellement sans relâche sur toutes les autres approbations formelles et logistiques. Cela implique entre autres les procédures de contrôle des exportations et des importations qui sont requises par la loi », a-t-on expliqué chez le géant énergétique allemand.

Washington et Berlin derrière Ottawa

Le gouvernement Trudeau peut se consoler en se disant qu’il a le soutien des États-Unis.

Le porte-parole du département d’État américain, Ned Price, a publié lundi un communiqué en soutien à la décision controversée du Canada d’accorder un « permis révocable et de durée limitée » pour l’expédition de six turbines qui étaient bloquées dans les installations montréalaises de Siemens Canada.

« Nous appuyons la décision du gouvernement canadien de restituer une turbine de gaz naturel à l’Allemagne pour l’utiliser dans le pipeline Nord Stream 1 », écrit-il, arguant que cela permettra à l’Allemagne et à d’autres pays européens de reconstituer leurs réserves de gaz.

L’Union européenne pourra ainsi « accroître sa sécurité et sa résilience énergétiques et contrer les efforts de la Russie de militariser l’énergie », ajoute le porte-parole.

Il a aussi indiqué que Washington et ses alliés comme le Canada sont déterminés à appuyer l’Ukraine et à s’assurer que l’économie de la Russie souffre des sanctions.

L’Allemagne, qui avait fait pression sur le Canada, a exprimé sa satisfaction.

Sur Twitter, l’ambassadrice d’Allemagne au Canada, Sabine Sparwasser, s’est dite « reconnaissante » de la décision du gouvernement. « Nous savons que cela n’a pas été facile. Mais il est crucial d’aider les alliés européens du Canada à renforcer progressivement notre indépendance vis-à-vis de la Russie », a-t-elle écrit.

Une crédibilité à restaurer

Après le Parti conservateur, la veille, c’était au tour du Bloc québécois et du Nouveau Parti démocratique (NPD) de servir une volée de bois vert au gouvernement Trudeau.

Car le Canada et l’Allemagne « placent le monde devant le fait accompli d’une exception aux sanctions sans démonstration claire de sa nécessité », a regretté dans un courriel le chef bloquiste, Yves-François Blanchet, déplorant le « chantage énergétique de la Russie ».

Le Canada doit maintenant restaurer sa crédibilité en matière de sanctions contre la Russie et de solidarité envers les Ukrainiens.

Yves-François Blanchet, chef du Bloc québécois

Au NPD, la porte-parole en matière d’affaires étrangères, Heather McPherson, s’est aussi élevée contre cette « insulte au peuple ukrainien » qu’il faut renverser « instamment ». Elle réclame la tenue d’une rencontre immédiate du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international pour en discuter.

🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻
                                                     MISE-À-JOUR
🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻🔻

Le passe-droit accordé par Ottawa a ulcéré Kyiv, si bien que le chargé d’affaires de l’ambassade du Canada en Ukraine a été convoqué par le gouvernement ukrainien – ce qui n’est jamais un très bon signe en matière de relations bilatérales.

« Le ministère des Affaires étrangères a dû convoquer le représentant du Canada dans notre pays en raison d’une exception totalement inacceptable au régime de sanctions contre la Russie », a déclaré dans une vidéo publiée lundi sur son site web le président ukrainien, Volodymyr Zelensky.

Il n’est pas juste question de turbines pour le gazoduc Nord Stream. […] On parle de règles communes. Si un régime terroriste peut arracher une telle exception aux sanctions, quelles exceptions réclamera-t-il le lendemain, le surlendemain ?

Volodymyr Zelensky, président de l’Ukraine

La colère ukrainienne avait été clairement communiquée dimanche : « Ce dangereux précédent viole la solidarité internationale, va à l’encontre du principe de l’État de droit et n’aura qu’une conséquence : il renforcera le sentiment d’impunité de Moscou », a-t-on pesté dans une déclaration gouvernementale.

Le propriétaire et exploitant de la canalisation de 1200 kilomètres reliant la Russie et l’Allemagne, Gazprom, figure sur la liste canadienne des entreprises visées par des sanctions économiques. La société a plaidé qu’en l’absence de cet équipement, une réduction du volume serait inévitable – une version contestée par Kyiv.

Une fois l’équipement arrivé en Allemagne, Siemens Energy l’expédiera en Russie « dès que possible », a signalé une porte-parole de l’entreprise à La Presse. Il lui faudra obtenir une dérogation additionnelle, cette fois aux sanctions de l’Union européenne, pour cet envoi en territoire russe.

« Nos experts travaillent actuellement sans relâche sur toutes les autres approbations formelles et logistiques. Cela implique entre autres les procédures de contrôle des exportations et des importations qui sont requises par la loi », a-t-on expliqué chez le géant énergétique allemand.

Washington et Berlin derrière Ottawa

Le gouvernement Trudeau peut se consoler en se disant qu’il a le soutien des États-Unis.

Le porte-parole du département d’État américain, Ned Price, a publié lundi un communiqué en soutien à la décision controversée du Canada d’accorder un « permis révocable et de durée limitée » pour l’expédition de six turbines qui étaient bloquées dans les installations montréalaises de Siemens Canada.

« Nous appuyons la décision du gouvernement canadien de restituer une turbine de gaz naturel à l’Allemagne pour l’utiliser dans le pipeline Nord Stream 1 », écrit-il, arguant que cela permettra à l’Allemagne et à d’autres pays européens de reconstituer leurs réserves de gaz.

L’Union européenne pourra ainsi « accroître sa sécurité et sa résilience énergétiques et contrer les efforts de la Russie de militariser l’énergie », ajoute le porte-parole.

Il a aussi indiqué que Washington et ses alliés comme le Canada sont déterminés à appuyer l’Ukraine et à s’assurer que l’économie de la Russie souffre des sanctions.

L’Allemagne, qui avait fait pression sur le Canada, a exprimé sa satisfaction.

Sur Twitter, l’ambassadrice d’Allemagne au Canada, Sabine Sparwasser, s’est dite « reconnaissante » de la décision du gouvernement. « Nous savons que cela n’a pas été facile. Mais il est crucial d’aider les alliés européens du Canada à renforcer progressivement notre indépendance vis-à-vis de la Russie », a-t-elle écrit.

Une crédibilité à restaurer

Après le Parti conservateur, la veille, c’était au tour du Bloc québécois et du Nouveau Parti démocratique (NPD) de servir une volée de bois vert au gouvernement Trudeau.

Car le Canada et l’Allemagne « placent le monde devant le fait accompli d’une exception aux sanctions sans démonstration claire de sa nécessité », a regretté dans un courriel le chef bloquiste, Yves-François Blanchet, déplorant le « chantage énergétique de la Russie ».

Le Canada doit maintenant restaurer sa crédibilité en matière de sanctions contre la Russie et de solidarité envers les Ukrainiens.

Yves-François Blanchet, chef du Bloc québécois

Au NPD, la porte-parole en matière d’affaires étrangères, Heather McPherson, s’est aussi élevée contre cette « insulte au peuple ukrainien » qu’il faut renverser « instamment ». Elle réclame la tenue d’une rencontre immédiate du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international pour en discuter.