(Québec) Dans sa quête pour avoir accès au parlement afin d’y tenir des conférences de presse et d’y avoir un bureau, Éric Duhaime est prêt à prendre la rue et à organiser des manifestations. Il s’est même trouvé en cours de route une alliée inattendue : la vice-présidente du Mouvement démocratie nouvelle et cofondatrice de Québec solidaire Françoise David croit qu’il a sa place au parlement.

« M. Legault, s’il décide que la démocratie, ce n’est pas important et que 530 000 Québécois, ça ne vaut rien pour lui, il va subir les conséquences de ses actes. S’il pense que c’est dehors […] et qu’il faut manifester et qu’il faut sortir dans la rue parce qu’il n’a pas de place pour nous, parce qu’il n’est pas assez démocrate pour nous laisser entrer à l’Assemblée nationale, il subira les conséquences de ses décisions », a tonné M. Duhaime, mercredi.

Il a ensuite précisé qu’il ne s’agissait pas de menaces. « Il va subir les conséquences, ça veut dire que les gens vont se manifester autrement. Dans une démocratie, il faut que les voix soient entendues à l’intérieur des murs du parlement », a-t-il lancé à la presse parlementaire.

Au lendemain des élections, le premier ministre François Legault avait déjà fermé la porte aux demandes de M. Duhaime. « Ce n’est pas évident de permettre à des gens non élus de faire des points de presse à l’Assemblée nationale », avait-il dit.

Puisque aucun candidat conservateur n’a été élu dans l’une des 125 circonscriptions du Québec, Éric Duhaime n’a pas le droit de tenir des activités publiques au parlement. Il avait obtenu ce privilège durant la dernière législature puisque la transfuge Claire Samson avait quitté la Coalition avenir Québec pour se joindre à sa formation.

Organiser des manifestations

« Ça, c’est un gros problème pour la démocratie. […] Avant d’être caquiste, j’espère que [François Legault] est démocrate, et j’espère qu’il va entendre la voix conservatrice », a-t-il dit.

« Ce n’est pas normal […] que 13 % des voix, ça donne zéro député sur 125. […] Je comprends que le PLQ et la CAQ ne veuillent pas réformer le mode de scrutin. Cela étant dit, il y a moyen de trouver des aménagements pour s’assurer qu’il y a un minimum de fonctionnement démocratique », a ajouté Éric Duhaime. Il a déploré cette « distorsion électorale historique ».

Son « plan A » : que le PCQ puisse être à la table de négociation, la semaine prochaine, avec les autres formations politiques pour décider du fonctionnement de l’Assemblée lors des quatre prochaines années.

Et si les négociations tournent au vinaigre, il a un plan B. « C’est sûr que si le plan A ne fonctionne pas, au mois de novembre, on va se retourner de bord et on va faire autre chose », a-t-il dit, ajoutant que les « manifestations » font partie de son plan d’action.

Un appui inattendu

Durant la journée, M. Duhaime a reçu un appui inusité, celui de Françoise David. La politicienne de gauche, qui n’a pas d’atomes crochus avec le programme du Parti conservateur, croit tout de même qu’il a sa place au parlement.

Cofondatrice de Québec solidaire, ex-députée, Mme David a quitté la vie politique en 2017. Elle milite depuis au sein de l’organisme de promotion de la réforme du mode de scrutin Mouvement démocratie nouvelle. Elle était à Québec pour assister à la prestation de serment des 11 députés de QS.

« Moi, ce que je pense, c’est que d’une manière ou d’une autre, c’est aux parlementaires d’en décider. Les idées qui sont celles de M. Duhaime doivent avoir une place. Je pense que c’est ça aussi, la démocratie. Même si, vous me comprenez bien, je ne partage presque aucune de ces idées », a lancé Mme David à la presse parlementaire.

Elle a souligné qu’avec un mode de scrutin proportionnel mixte comme celui dont elle fait la promotion, M. Duhaime aurait obtenu au moins une dizaine de députés.

Mme David croit également que la distorsion très importante entre les résultats des partis politiques et leur représentation à l’Assemblée nationale à la suite des dernières élections a fait prendre conscience à une large part de la population qu’une réforme du mode de scrutin est nécessaire.

De son côté, le chef parlementaire de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, n’a pas souhaité prendre position. « M. Duhaime nous a contactés dans les derniers jours pour nous faire part de cette demande-là. On va en parler avec notre équipe. On va voir ce qu’on en pense honnêtement. Je n’ai pas eu le temps d’y réfléchir encore », a-t-il dit en point de presse.