La Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ) demande au ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon, de retirer une publication sur les réseaux sociaux où il s’en prend à un journaliste pour des questions qu’il n’a pas appréciées.

« Cette façon de procéder s’apparente à de l’intimidation », dénonce la FPJQ dans un communiqué publié vendredi.

Jeudi, M. Fitzgibbon a publié sur Facebook un message dans lequel il traite Francis Halin, du Journal de Montréal, de « journaliste de mauvaise foi » et révèle une partie des questions que ce dernier lui a transmises au sujet d’un don personnel fait à HEC Montréal.

Lisez un communiqué de HEC Montréal

M. Halin demandait au ministre si le don de 5 millions de dollars annoncé en novembre « envoie un mauvais message aux autres universités ». Il demandait également pourquoi M. Fitzgibbon n’avait pas attendu la fin de son mandat de ministre pour l’annoncer, et s’il était possible d’avoir une entrevue à ce sujet.

La FPJQ « considère qu’il est justifié pour un journaliste de poser des questions sur les actions entreprises par le politicien » en raison « des antécédents en matière d’éthique de M. Fitzgibbon », peut-on lire dans le communiqué.

« Le rôle des journalistes est de poser des questions. Même si M. Fitzgibbon n’aime pas que l’on regarde les actions qu’il a posées, en tant que ministre, avec des antécédents en matière d’éthique, il est tout à fait normal que des journalistes fouillent les dossiers et lui posent des questions légitimes », souligne le vice-président de la FPJQ, Éric-Pierre Champagne, cité dans le communiqué.

« Un élu, et davantage un ministre, ne peut pas se défiler devant ses obligations de rendre des comptes à la population », soutient le rédacteur en chef du Journal de Montréal, Dany Doucet, dans un billet publié vendredi. « C’est notre rôle de questionner, et nous ne nous laisserons jamais intimider par qui que ce soit dans la poursuite de notre mission publique. »

Le ministre Pierre Fitzgibbon, visé par six enquêtes de la commissaire à l’éthique déjà, écrit dans sa publication que les questions de M. Halin sont empreintes d’« agressivité » et de « mauvaise foi ».

Lisez « Sixième enquête de la commissaire à l’éthique : “Il va y en avoir d’autres”, prévient Fitzgibbon »

La FPJQ déplore que la publication du ministre ait été relayée par certains de ses collègues de la Coalition avenir Québec, y compris le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, qui « s’était engagé à lutter contre toutes les formes d’intimidation lors de son entrée en fonction ».

En agissant ainsi, M. Fitzgibbon « pourrait effaroucher certains journalistes moins expérimentés qui préféreraient s’abstenir à l’avenir de poser des questions plutôt que de subir un traitement comparable sur les réseaux sociaux », craint la Fédération.

La FPJQ demande à M. Fitzgibbon de retirer sans tarder sa publication sur les réseaux sociaux et de s’excuser publiquement auprès du journaliste en question.

Extrait du communiqué de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec

« Le ministre n’a pas l’intention de s’excuser », a répondu l’attaché de presse de M. Fitzgibbon, Mathieu St-Amand, interrogé par La Presse. « Diffuser une question d’un journaliste n’est pas une forme d’intimidation », a-t-il ajouté, sans aborder le reste des propos du ministre.

« Un journaliste peut bien entendu adopter une posture critique face à un tel don, mais le ministre a le droit de se montrer critique face à cette posture », a fait valoir l’attachée de presse du ministre Bernard Drainville, Florence Plourde, en réponse aux questions de La Presse. « Ne pas pouvoir critiquer le travail des médias serait malsain pour notre démocratie », affirme-t-elle.