(Ottawa) Logement, droits des travailleurs, inflation, soins dentaires : le premier ministre Justin Trudeau a saisi toutes les occasions qui s’offraient à lui lundi pour envoyer des pointes au chef conservateur, Pierre Poilievre, l’accusant de prôner « l’austérité et la colère » avec des propositions « irresponsables et manquant de sérieux » pour marquer des points politiques.

« Oui, il y a des défis liés au coût de la vie. Mais vous ne résolvez pas les problèmes en effrayant les gens, en attisant la colère », a-t-il répondu à une journaliste qui lui demandait s’il se sent menacé par son adversaire qui grimpe dans les sondages alors qu’il se penche abondamment sur les enjeux de logement, d’abordabilité et d’inflation.

Lors de ce point de presse sur le logement abordable, à Hamilton, en Ontario, M. Trudeau a affirmé que son gouvernement fait des « investissements ciblés » face aux « énormes défis » que vivent les Canadiens. Or, a-t-il dit, la solution à « tout » du chef conservateur est de couper.

Il a pris en exemple le régime fédéral de soins dentaires de 13 milliards destiné aux Canadiens à revenu faible ou moyen qui ne sont pas couverts par une assurance collective. Les libéraux espèrent qu’il couvre les soins des enfants de moins de 18 ans, les personnes âgées et les personnes handicapées.

« Pierre Poilievre […] a voté contre les soins dentaires, a-t-il lancé. Pourquoi dire que les soins dentaires sont bons pour les députés et leurs familles, que ce n’est pas inflationniste que les gens envoient leurs enfants chez le dentiste s’ils ont de l’argent, mais de laisser les personnes à faible revenu, les personnes qui peinent autrement à offrir un sourire plus éclatant à leurs enfants et voter contre cela au nom d’éviter une inflation plus élevée alors que l’inflation n’a cessé de baisser. »

Les trois principaux sondages réalisés en juillet créditent aux conservateurs une avance de 7 à 10 points sur les libéraux à l’échelle nationale, si bien que Pierre Poilievre est en territoire où il pourrait espérer former un gouvernement majoritaire advenant que des élections soient déclenchées.

Dans une autre salve où M. Trudeau était visiblement prêt à en découdre, il a accusé le chef conservateur d’être favorable à un système de santé à deux vitesses. « Vous ne l’avez pas entendu parler des investissements que nous faisons dans les soins de santé parce qu’il ne veut rien dire à ce sujet », a résumé le premier ministre.

Lorsqu’il a été questionné sur le conflit de travail au Port de Vancouver, le premier ministre a qualifié son adversaire de « peu crédible », lui qui a été un élément clé du gouvernement de Stephen Harper « réputé pour ses lois antisyndicales […] qui attaquaient directement les droits des travailleurs ».

« Et d’autre part, lorsqu’il s’agissait de convois de manifestants qui bloquaient l’économie canadienne, causant des difficultés aux gens partout au pays, il était là, agitant des drapeaux avec eux et les encourageant », a renchéri M. Trudeau.

« Désespéré »

Envoyé au front, le lieutenant politique de Pierre Poilievre pour le Québec, Pierre Paul-Hus, a estimé en entrevue avec La Presse Canadienne que ces attaques en règle démontrent que le premier ministre est « désespéré […] complètement à bout de souffle […] fâché » et qu’il tente de reprendre le contrôle.

« Quand on se rappelle les promesses de 2015, justement au niveau du logement, M. Trudeau dit : “On va rendre le logement abordable”. Et puis c’est tout le contraire qui se passe aujourd’hui. C’est rendu deux fois plus cher pour les logements, le coût des maisons a presque doublé également », a-t-il répliqué.

Les conservateurs ont pour « priorité » la saine gestion des fonds publics. « On n’appelle pas ça de l’austérité, on appelle ça gérer l’argent des citoyens, a-t-il continué. Et de créer la colère […] les gens créent eux-mêmes leur colère parce qu’ils voient que le coût de la vie a augmenté de façon incroyable. »

Quant au programme de soins dentaires, le député Paul-Hus a insisté pour dire que les enfants canadiens ont déjà accès à des soins dentaires dans neuf des dix provinces et, qu’à cela, il n’a pas confiance dans les libéraux pour gérer un tel régime alors qu’« ils ne sont même pas en mesure de gérer les opérations courantes comme les passeports ».

La semaine dernière, le premier ministre a procédé à un remaniement ministériel costaud. Il a présenté la nouvelle équipe comme celle qui adoptera une nouvelle approche en matière de logement, d’abordabilité et de sécurité avant les prochaines élections fédérales.