« Choqué » et « trahi » par la CAQ, le candidat péquiste dans la circonscription de Jean-Talon, Pascal Paradis, réplique : il soutient que le chef de cabinet de François Legault, Martin Koskinen, lui a offert un poste de ministre et qu’il lui a même confié que le troisième lien serait abandonné après les élections générales.

Ce qu’il faut savoir

  • Une élection partielle se tiendra cet automne dans Jean-Talon, à Québec, en raison de la démission de la caquiste Joëlle Boutin.
  • Le Parti québécois (PQ) présente comme candidat l’avocat Pascal Paradis. La Presse a révélé qu’il a eu des discussions avec la Coalition avenir Québec (CAQ) l’an dernier quant à une candidature aux élections générales.
  • La CAQ et le PQ s’accusent mutuellement de mentir à savoir si Pascal Paradis a sollicité un poste de ministre ou s’il se l’est fait offrir.
  • M. Paradis affirme que Martin Koskinen, le bras droit de François Legault, lui avait confié avant l’élection que la CAQ abandonnerait le projet de troisième lien.

Selon le cabinet de M. Legault, « le PQ et son candidat mentent gros comme le bras pour tenter de gagner une élection ».

Pascal Paradis a donné sa version des faits jeudi lors d’une conférence de presse avec son chef Paul St-Pierre Plamondon pour annoncer officiellement sa candidature. « Je n’ai jamais rien demandé » à la CAQ ni « magasiné un ministère », a martelé l’avocat.

« La Coalition avenir Québec m’a contacté, m’a fait miroiter toutes sortes de choses. J’ai considéré cette offre. J’ai considéré ce qu’on m’a fait miroiter, je ne le nierai pas. On a eu des discussions. Mais à la fin, j’ai refusé. C’est ça qui s’est passé », a affirmé M. Paradis.

Le candidat du PQ soutient qu’il n’a pas entrepris de démarches auprès de la CAQ au printemps 2022 : c’est M. Koskinen qui l’a approché. Ce dernier lui a offert une place autour de la table du Conseil des ministres. C’était « sa proposition initiale », « on a parlé clairement de quel ministère », celui de la Capitale-Nationale, a expliqué M. Paradis.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Le directeur de cabinet du premier ministre du Québec, Martin Koskinen

« Quand le cabinet du premier ministre t’appelle, tu écoutes et tu [te demandes] : est-ce que ça pourrait être un véhicule pour faire vivre mon engagement ? Tu te la poses, la question. Arriver au gouvernement, à la table des ministres. Mais là, il y avait plein de choses qui ne fonctionnaient pas là-dedans et à la fin, j’ai refusé », a-t-il dit.

L’enjeu du troisième lien

Le premier ministre François Legault a nié mercredi que son parti lui ait fait une telle proposition. « On n’a offert aucun poste de ministre. On n’a garanti aucun poste de ministre. J’ai lu le texte de M. St-Pierre Plamondon et, de toute évidence, entre M. Paradis et Martin Koskinen, il y en a un des deux qui ment ! », a-t-il lancé.

Pascal Paradis dit avoir signalé à M. Koskinen que la CAQ n’était « pas [sa] famille politique », qu’il était social-démocrate et souverainiste. Cela ne posait pas de problème pour le directeur de cabinet de M. Legault, a-t-il dit, ajoutant que ce dernier lui avait même répondu qu’il y avait d’autres souverainistes à la CAQ.

L’avocat a ajouté qu’il avait fait valoir son opposition à la promesse de troisième lien de la CAQ. Il a relaté les discussions sur le sujet. « On a dit : “Vous le savez, le troisième lien, ça ne se fera pas, mais on ne parlera pas de ça pendant les élections. Ça va être après” », a-t-il affirmé. Il a répondu par la suite que c’était M. Koskinen qui lui disait que le projet serait abandonné après le scrutin.

« C’était très clair dans nos discussions que le troisième lien n’aurait pas lieu. » C’est pour cette raison qu’il n’a « pas été surpris » de voir que la promesse avait été abandonnée le printemps dernier malgré tout ce que M. Legault disait en campagne électorale.

« Je n’ai jamais menti. Je m’en tiens à ce que j’ai dit. Les faits sont pour moi. Je ne commencerai pas ma carrière politique en mentant », a ajouté M. Paradis.

Le cabinet de Legault réagit

L’attaché de presse de François Legault, Ewan Sauves, nie les allégations du candidat péquiste. Sa réaction a été publiée sur le réseau social X, anciennement Twitter, et a été relayée par le compte du premier ministre. On peut y lire le mot-clic #LeMenteurPéquiste.

La vérité a ses droits : jamais Martin Koskinen n’a promis un poste de ministre à M. Paradis. C’est lui qui a demandé à être ministre de la Capitale-Nationale pour faire le saut en politique avec la CAQ. Martin Koskinen a refusé de lui donner cette assurance. C’est la stricte vérité et M. Paradis le sait très bien.

Ewan Sauves, attaché de presse du premier ministre François Legault

Par ailleurs, « le 3lien était un engagement ferme de notre gouvernement. Avant le dévoilement des études mises à jour en avril dernier, il n’a jamais été question de reculer. Martin Koskinen n’a jamais évoqué un tel scénario. La directrice générale de la CAQ ne lui a jamais parlé du 3lien, contrairement à ce qu’il affirme ».

M. Sauves précise : « Pas plus tard qu’hier [mercredi], Paul St-Pierre Plamondon se défendait en disant que c’est l’opposition de M. Paradis au 3lien qui justifiait qu’il n’a jamais voulu se présenter pour la CAQ. Ce matin, il change son discours en disant qu’on lui a souligné le fait qu’on ne le ferait pas. C’est une totale et complète incohérence. C’est ça qui arrive quand on ment. »

Le candidat se défend d’être opportuniste

Pascal Paradis a pour sa part reconnu jeudi qu’il avait « considéré sérieusement » l’offre de la CAQ, mais qu’il l’avait refusée en raison du dossier du troisième lien, mais aussi parce que la proposition ne semblait « pas fiable ». Il a également affirmé ne pas avoir eu de discussions avec d’autres partis.

Je n’ai pas magasiné. Ni en 2022 ni aujourd’hui. Je n’étais pas en magasinage. Je n’ai envoyé mon nom à personne. Je n’ai fait de clins d’œil à personne.

Pascal Paradis, candidat péquiste dans Jean-Talon

M. Paradis trouve déplorable que la CAQ ait brisé le sceau de confidentialité entourant leurs échanges. Le chef péquiste Paul St-Pierre Plamondon dit que son candidat a des écrits confidentiels prouvant ses affirmations, mais qu’il n’a pas l’intention de « jouer le jeu » de la CAQ.

PHOTO FRANCIS VACHON, LA PRESSE CANADIENNE

Le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon (à gauche), et le candidat péquiste dans Jean-Talon, Pascal Paradis

« Je trouve ça très regrettable, ce que la Coalition avenir Québec a fait [mercredi], c’est-à-dire qu’elle n’a pas tenu parole envers lui et elle a manqué d’éthique. Malheureusement, c’est une tentative de salir la réputation de quelqu’un qui est admirable », a dit le chef péquiste, se désolant de cette tactique du gouvernement qui est selon lui « dégoûtante ».

« On ne peut pas me qualifier d’opportuniste parce que la Coalition avenir Québec m’a approché et m’a fait miroiter des choses. Moi, je n’ai rien demandé à la Coalition avenir Québec. C’est eux qui m’ont approché. Penser que j’ai pu, moi, magasiner des ministères et des avantages à la Coalition avenir Québec compte tenu de mon profil, de mon historique et de ma trajectoire, je trouve ça non seulement ridicule, je trouve ça vraiment choquant. Je suis très choqué », a ajouté Pascal Paradis.

Une partielle qui s’annonce serrée

Avec la prochaine élection partielle dans Jean-Talon, une circonscription couvrant les quartiers Sillery et Sainte-Foy à Québec, la question de l’urne sera pour Paul St-Pierre Plamondon l’intégrité de la CAQ.

Les plus récents sondages indiquent que le PQ et le parti de François Legault commenceront la campagne au coude-à-coude dans les intentions de vote.

« Ça [sera] cette question du bilan de la CAQ sur le plan de la franchise et de la fiabilité. Qu’ils débutent cette partielle en mentant […], ça soulève la question légitime suivante : que vaut la parole de la CAQ ? », a-t-il dit. Même si Jean-Talon est un ancien bastion libéral, le chef du PQ n’entend pas pour autant mettre sa promesse de tenir un référendum dans un premier mandat péquiste en veilleuse.

Le premier ministre François Legault n’a pas encore annoncé la date de l’élection partielle, alors que la date du 2 octobre circule dans le camp caquiste. En plus de Pascal Paradis pour le PQ, la CAQ a confirmé que sa candidate serait Marie-Anik Shoiry, fondatrice et directrice générale de l’organisme Vide ta sacoche. Du côté de Québec solidaire, le candidat qui a remporté l’investiture est le sténographe Olivier Bolduc.

Le Parti libéral tiendra pour sa part un point de presse ce vendredi pour présenter sa candidate, Élise Avard-Bernier, cofondatrice du site web Vie de parents.