(Québec) Après un été marqué par des évènements météo extrêmes, Gabriel Nadeau-Dubois tente une fois de plus d’imposer la lutte contre les changements climatiques comme un thème politique prioritaire. Québec solidaire (QS) déposera dès la rentrée au Parlement un projet de loi de type « test climat » qui aura pour principe d’évaluer les projets d’infrastructure du gouvernement en fonction des gaz à effet de serre qu’ils émettent.

En entrevue avec La Presse, dans le contexte où débute ce mercredi à Québec le caucus présessionnel de sa formation politique, le chef parlementaire solidaire insiste sur le fait que « dans les dernières années, on a parlé de changements climatiques quand il y avait des inondations, mais qu’une fois les sacs de sable ramassés, les politiciens arrêtaient d’en parler ».

« On veut imposer ce thème-là cet automne. On n’a plus le droit de pelleter en avant. […] Avec le contexte de l’été qu’on vient de vivre, j’espère que ça ouvre les yeux des gens qui nous gouvernent », dit M. Nadeau-Dubois.

Le député Étienne Grandmont, de la circonscription de Taschereau, au centre-ville de Québec, est celui qui déposera le projet de loi au Salon bleu. La « question fondamentale », explique-t-il, est de savoir si les projets d’infrastructure financés par Québec « nous rapprochent ou nous éloignent de nos objectifs de réduction de gaz à effet de serre ».

Les propositions législatives déposées par l’opposition ont peu de chances d’être appelées à l’étude par le gouvernement. Si une mesure comme le « test climat » était appliquée au Québec, elle n’aurait pas pour effet de bloquer des projets, affirme M. Grandmont, mais plutôt d’être transparent face à la population concernant les impacts des projets d’infrastructure.

Une réponse à Fitzgibbon

En matière d’investissements, le Plan québécois des infrastructures (PQI) 2023-2033 s’établit à ce jour à 150 milliards de dollars. Le Québec a également pour cible de réduire d’ici 2030 de 37,5 % ses émissions de gaz à effet de serre par rapport à leur niveau de 1990, en plus d’atteindre la carboneutralité d’ici 2050.

« Notre projet de loi, c’est une réplique directe aux déclarations [du ministre de l’Économie et de l’Énergie] Pierre Fitzgibbon d’il y a quelques semaines. Il nous disait si vous voulez qu’on atteigne la carboneutralité, changez vos habitudes », explique M. Nadeau-Dubois.

[Montrer] du doigt les familles qui n’ont pas le choix dans leur quotidien d’utiliser la voiture, mais pendant ce temps, ne pas s’assurer comme gouvernement que l’argent que l’on investit dans nos infrastructures nous rapproche de nos cibles climatiques, c’est un double discours.

Gabriel Nadeau-Dubois, leader parlementaire de Québec solidaire

Ce n’est pas la première fois que Québec solidaire tente d’imposer la lutte contre les changements climatiques dans les débats au Salon bleu. En 2019, le parti avait même lancé un « ultimatum climatique » au gouvernement Legault, le menaçant de faire de l’obstruction au Parlement s’il n’agissait pas sur le front du climat. La pandémie a eu raison de cette stratégie.

Face à des adversaires qui l’accusaient d’être déconnecté des préoccupations de la classe moyenne lors des dernières élections, M. Nadeau-Dubois entend cette fois-ci créer des ponts entre différents enjeux – à commencer par l’inflation et la hausse du coût de la vie – et la question climatique.

« L’environnement et le coût de la vie, c’est intimement lié. Regardons ce que viennent de vivre les agriculteurs au Québec. Ça aura un impact sur le panier d’épicerie et sur le prix des aliments. Si on veut être capable d’avoir des aliments locaux à un prix abordable, il faut aider nos agriculteurs dans l’adaptation aux changements climatiques », dit-il.

À ce sujet, QS demande à Québec d’attribuer une aide d’urgence aux agriculteurs au moment où la pluie abondante et des épisodes de sécheresse ont nui aux récoltes.

Une course et ses dangers

Québec solidaire traversera aussi à l’automne des défis internes, à commencer par la course au titre de porte-parole féminine du parti où s’affrontent les élues Christine Labrie, de Sherbrooke, et Ruba Ghazal, de la circonscription de Mercier à Montréal, mais aussi l’ex-députée de Rouyn-Noranda–Témiscamingue, Émilise Lessard-Therrien. Gabriel Nadeau-Dubois craint-il que les débats de la course laissent des marques sur son caucus ?

« Je pourrais travailler demain matin en duo avec ces trois femmes-là et je serais très heureux », dit-il notamment à ce sujet.

Je me rappelle, à une certaine époque, qu’on disait que lorsque Françoise David s’en irait, que ça serait la fin des haricots. Aujourd’hui, Manon Massé change de rôle et personne ne pense que c’est le début de la fin.

Gabriel Nadeau-Dubois, leader parlementaire de Québec solidaire

Au prochain congrès du parti, qui se déroulera du 24 au 26 novembre à Gatineau, M. Nadeau-Dubois tentera de se faire réélire au poste de porte-parole masculin. Aucun autre candidat ne se présente contre lui. Il devra défendre son bilan, alors que la dernière campagne électorale a offert des résultats décevants aux militants solidaires dans le contexte où le parti aspirait à former l’opposition officielle.

D’ici là, le chef parlementaire sera visible au cours des prochaines semaines dans la circonscription de Jean-Talon, à Québec. En octobre 2022, QS a terminé en deuxième position derrière la caquiste Joëlle Boutin, qui a depuis démissionné. Les sondages prédisent pour l’instant une lutte à deux entre la Coalition avenir Québec (CAQ) et le Parti québécois (PQ). M. Nadeau-Dubois ne croit pas que les résultats de cette partielle représentent un test de leadership et promet que l’élection « sera serrée ».