Le député conservateur témoignera devant un comité du Congrès mardi

(Québec) Le Canada et ses principaux alliés doivent impérativement unir leurs efforts pour contrer l’ingérence étrangère, en particulier de la part de la Chine. Cette menace a pris une telle ampleur qu’elle met en péril les fondations mêmes des pays démocratiques.

Voilà l’un des principaux messages que compte livrer mardi à Washington le député conservateur Michael Chong devant les membres d’un comité du Congrès américain qui se penche sur l’ingérence étrangère.

Ayant été la cible d’une campagne de désinformation à deux reprises de la part du régime communiste de Pékin au cours des deux dernières années – la première fois durant les élections fédérales de 2021 et la deuxième fois en mai dernier alors que se déroulaient des élections partielles dans quatre circonscriptions au pays –, M. Chong a été invité par les élus américains à venir raconter son expérience.

Dans une entrevue accordée à La Presse et au Toronto Star en marge du congrès national du Parti conservateur, samedi, M. Chong a insisté pour dire qu’il ferait passer l’intérêt national du pays avant tout en se rendant dans la capitale américaine.

Pas question, donc, de profiter de cette tribune rarement accordée à un élu canadien par un comité du Congrès pour faire le procès du gouvernement Trudeau et de sa gestion du dossier de l’ingérence étrangère au cours des derniers mois.

« Je m’en vais à Washington pour souligner que mon cas n’est qu’un parmi de nombreux cas d’ingérence étrangère qui ont lieu ici au Canada », a indiqué M. Chong, l’un des parlementaires les plus respectés à Ottawa.

Il faut que les pays alliés et les démocraties partageant les mêmes idées travaillent beaucoup plus étroitement ensemble pour lutter contre cette ingérence étrangère. […] L’avenir de nos démocraties est en jeu.

Michael Chong, député conservateur de Wellington–Halton Hills

M. Chong a donné l’exemple de l’adoption d’un registre des agents étrangers aux États-Unis comme mesure indispensable. D’autres pays en ont fait autant, notamment l’Australie en 2018 et le Royaume-Uni en juillet dernier, mais le gouvernement Trudeau tarde à leur emboîter le pas. Le nouveau ministre de la Sécurité publique, Dominic LeBlanc, a fait savoir récemment qu’il comptait aller de l’avant avec la création d’un tel registre à l’automne.

Dans le respect des droits

Selon le député conservateur, le Canada et ses alliés doivent aussi examiner les meilleures pratiques sur le plan de l’échange de renseignements en matière de sécurité et l’utilisation de ces renseignements comme preuve devant les tribunaux.

« Tous les gouvernements occidentaux ont du mal à contrer les activités pernicieuses d’ingérence étrangère. Au Canada, nous essayons de trouver le juste équilibre entre la lutte contre l’ingérence étrangère et le respect des droits et libertés des personnes. Les régimes autoritaires n’ont pas à se soucier de ce détail. Mais nous, nous devons le faire », a-t-il exposé.

S’appuyant sur des documents confidentiels du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), le quotidien The Globe and Mail a révélé en février que la Chine avait eu recours à une stratégie sophistiquée durant les élections fédérales de 2021 afin d’assurer l’élection d’un gouvernement minoritaire libéral dirigé par Justin Trudeau et la défaite de candidats conservateurs jugés hostiles au régime de Pékin.

Cette affaire domine les débats politiques à Ottawa depuis et les partis de l’opposition réclament la tenue d’une enquête publique sur l’ingérence étrangère.

Au terme de plusieurs semaines de négociations avec les partis de l’opposition, le gouvernement Trudeau a finalement annoncé jeudi qu’il confie les rênes de l’enquête publique sur l’ingérence étrangère à la juge Marie-Josée Hogue, de la Cour d’appel du Québec. La magistrate a le mandat de se pencher sur les actions perturbatrices de la Chine, de la Russie et d’autres régimes autoritaires. Elle devra mener cet important exercice à terme d’ici le 31 décembre 2024.

Un devoir d’audace

En entrevue, M. Chong n’a pu s’empêcher de faire un lien entre le moment de cette annonce et son témoignage attendu la semaine prochaine à Washington.

Selon lui, cette enquête permettra de mettre en lumière les failles du passé. Plus précisément, elle doit permettre d’expliquer pourquoi il n’a jamais été mis au courant par les autorités canadiennes des campagnes d’intimidation et de désinformation menées contre lui et des membres de sa famille qui se trouvaient à Hong Kong. M. Chong a appris les tenants et aboutissants des manœuvres de la Chine en lisant le Globe and Mail au printemps.

Il s’agit d’une enquête rétrospective qui doit déterminer qui, au sein du gouvernement Trudeau, savait quoi exactement et quand il le savait. […] C’est le but de tout cet exercice. Nous devons tenir les gens responsables de leurs échecs, être audacieux et protéger la sécurité des Canadiens.

Michael Chong, député conservateur de Wellington–Halton Hills

M. Chong a toutefois tenu à souligner l’importance d’une concertation des pays démocratiques dans ce dossier.

« C’est profondément corrosif pour notre démocratie si nous laissons se produire ces ingérences étrangères sans y répondre. Elles sapent la confiance du public dans nos institutions démocratiques comme le Parlement, dans notre processus électoral comme nos élections générales. Elles sapent la cohésion sociale parce qu’elles divisent les Canadiens. Elles constituent une menace pour notre économie et notre prospérité. »