(Québec) Le ministre Simon Jolin-Barrette « n’a pas commis de manquement » éthique en nommant un ami au poste de juge de la Cour du Québec, conclut la commissaire à l’éthique et à la déontologie.

La commissaire Ariane Mignolet invite en revanche le gouvernement Legault à « réfléchir » à l’implantation d’un mécanisme qui permettrait aux ministres de déléguer leur pouvoir de recommandation lorsqu’il est question d’une nomination d’une personne avec qui ils ont un « lien de proximité significatif ».

Dans un rapport d’enquête rendu public mardi, la commissaire Mignolet blanchit le ministre de la Justice, qui a nommé Charles-Olivier Gosselin au poste de juge de la Cour du Québec au printemps dernier. M. Gosselin est un ami de longue date du ministre, comme l’a révélé Le Soleil. Le ministre Jolin-Barrette n’a jamais nié son lien d’amitié avec M. Gosselin, dont il a célébré le mariage.

Or, M. Jolin-Barrette « n’a pas commis de manquement » au Code d’éthique et de déontologie des membres de l’Assemblée nationale, conclut Mme Mignolet dans son rapport d’enquête, lancée à la demande du député libéral Monsef Derraji.

« En effet, même si le Ministre et le juge Charles-Olivier Gosselin sont de bons amis, la preuve révèle que le Ministre ne s’est pas écarté du processus établi et a suivi les règles claires et explicites concernant son rôle en tant que ministre de la Justice », écrit la commissaire.

« Sa décision de recommander la personne nommée est basée uniquement sur la compétence de cette dernière et sur l’appréciation personnalisée contenue au rapport du comité de sélection. Le curriculum vitæ du juge et les témoignages recueillis dans le cadre de l’enquête démontrent d’ailleurs que celui-ci détient les compétences requises pour occuper cette fonction », peut-on lire.

Le ministre accueille favorablement le rapport de la commissaire à son endroit. « J’avais dit au mois de mai que j’avais respecté à la lettre le processus. La nomination du juge Gosselin a été faite en fonction de ses compétences, comme le souligne la commissaire à l’éthique », a souligné le ministre de la Justice en sortant du Salon bleu, mardi.

Déléguer le pouvoir de recommandation

La commissaire affirme néanmoins que le dossier est « un exemple éloquent de l’attention que la population porte aux situations impliquant les proches de parlementaires ». En ce sens, elle invite le gouvernement à mettre en place un mécanisme – au-delà de la nomination de juges – pour que les ministres puissent déléguer leur pouvoir de nomination, dans certains cas d’exception.

Cela pourrait permettre de « prévenir les conflits d’intérêts réels ou apparents pouvant résulter de l’exercice de leur discrétion », ajoute la commissaire.

« La commissaire à l’éthique a indiqué qu’il y avait peut-être des voies d’amélioration. Moi, je l’avais dit au mois de mai, je suis ouvert. Et ce qu’on va faire, c’est étudier ses recommandations. On accueille ses recommandations avec ouverture. On va étudier son rapport avec sérieux et on va prendre le temps de bien le faire », a expliqué le ministre Jolin-Barrette.

Un comité de sélection indépendant fait l’analyse des candidatures au poste de juge et soumet jusqu’à trois noms au ministre de la Justice. Ce dernier fait son choix, puis recommande la nomination au Conseil des ministres. L’avocat Charles-Olivier Gosselin a été nommé juge en mai dernier.

Au moment de la controverse, le ministre s’est défendu en affirmant que « la candidature du juge Gosselin a été traitée au mérite », mais a ensuite admis que si une situation similaire se présentait de nouveau, il en aviserait les membres du Conseil des ministres, ce qu’il n’avait pas fait dans ce cas-ci. Le premier ministre François Legault s’était aussi rangé derrière son ministre, assurant que ce dernier avait respecté les règles.

Avec Tommy Chouinard, La Presse