(Québec) Le Québec peut comme la Finlande éliminer complètement l’itinérance, selon le Parti québécois (PQ), mais c’est un exemple « extrême », répond le ministre responsable, Lionel Carmant.

L’opposition péquiste voulait ainsi interpeller mercredi le ministre Lionel Carmant, qui écarte cet objectif alors qu’il est pourtant poursuivi par le maire de Québec, Bruno Marchand.

« Une étape à la fois. Si on veut faire de trop grands pas, ça ne fonctionne pas », a justifié mercredi en mêlée de presse le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux.

À l’Assemblée nationale mercredi matin, le chef péquiste Paul St-Pierre Plamondon a reproché au ministre Carmant de manquer d’ambition et d’être insensible à la réalité actuelle.

La semaine dernière, M. Carmant avait en effet déclaré que des personnes choisissent l’itinérance comme « mode de vie » et qu’il écartait donc l’objectif de l’itinérance zéro.

« Comment le ministre peut justifier son insensibilité en disant : “moi, d’entrée de jeu, j’accepte l’itinérance et je la tiens pour acquise, ça ne m’intéresse pas tant que ça d’éradiquer une crise sociale et un drame humain” », a déploré le chef péquiste.

« Comment accepte-t-il l’itinérance comme un phénomène normal dans une société bien nantie comme le Québec ? »

Selon lui, si des sociétés avec le même niveau de richesse que le Québec arrivent à donner un toit permanent à tous les itinérants, le Québec peut et doit donc aussi y arriver.

« Si d’autres pays dans le monde le font, pourquoi ce serait pas possible ? », a demandé M. St-Pierre Plamondon.

« Il y a des sociétés au même niveau de richesse que le Québec qui réussissent à ne pas laisser une partie de sa population dans la rue », a-t-il plaidé.

Inspiré par des pays comme la Finlande, le maire de Québec, Bruno Marchand, s’est donné comme objectif quand il a été élu d’atteindre l’« itinérance zéro » dans sa ville.

Mais le gouvernement, qui est le principal maître d’œuvre et bailleur de fonds en matière de lutte à l’itinérance, a donc déjà fait savoir qu’il ne le suivra pas.

Le ministre a reconnu qu’il avait évoqué un « extrême » en parlant de ceux qui choisissent de vivre dans la rue, mais juge que la Finlande constitue un « extrême » en soi.

« On parle de la Finlande avec l’itinérance zéro, mais en fait, il y en a 1700 (itinérants en Finlande). »

Ainsi, le pays nordique, pour une population de 5,5 millions d’habitants, compte 1700 personnes sans abri, selon les données du ministre, tandis que le Québec, pour une population de plus de 8 millions d’habitants, dénombrait près de 5800 personne en situation d’itinérance visible en 2018.

« Il faut travailler pour ça (l’éradication de l’itinérance), a précisé M. Carmant. On est en montée (du nombre de personnes itinérantes). Il faut stabiliser et redescendre avant de parler d’éradiquer. »

Les maires attendent le ministre de pied ferme. Vendredi, ils seront réunis dans le cadre d’un sommet municipal sur l’itinérance à Québec, organisé par l’Union des municipalités du Québec (UMQ).

La semaine dernière, lors d’une autre rencontre des élus municipaux, la mairesse de Gatineau, France Bélisle, avait déploré devoir faire le travail de M. Carmant et avait rapporté qu’une jeune femme itinérante avait dû accoucher seule dans les bois en Outaouais.

M. Carmant souhaite que ce sommet soit constructif. « On est raisonnable, on veut avancer. »

Rappelons que le maire Marchand a visité la Finlande pour s’inspirer de ses pratiques et solutions. Une ville comme Helsinki a pratiquement éradiqué l’itinérance. La capitale finlandaise a réussi à diminuer les places en refuge de 1800 à 170 en offrant un meilleur accompagnement aux personnes sans abri qui ont pu ainsi se trouver un logement.