(London) Les députés québécois de Justin Trudeau ont affiché un front uni derrière leur chef, mercredi, en plaidant tantôt qu’il ne fallait « pas céder à la panique », tantôt que le premier ministre restait l’homme de la situation, et souvent en minimisant l’importance des sondages. Quant au principal intéressé, il a obstinément refusé de discuter de l’état de son leadership.

Les élus québécois qui ont défilé devant les caméras au centre des congrès de London, en Ontario, ont tous accordé un vote de confiance à leur chef, dont la cote de popularité a dégringolé au courant de l’été, au profit de celle du dirigeant conservateur Pierre Poilievre.

La ministre Diane Lebouthillier y est allée de cette analogie pour expliquer le phénomène : « Quand on était adolescents, on se serait probablement, à un moment donné, tous débarrassés de nos parents pour les changer ».

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Diane Lebouthillier

« Le caucus québécois est uni derrière le chef, et je suis certaine qu’avec les discussions, au sortir du caucus national, ça va être la même chose », a pour sa part fait valoir la ministre Pascale St-Onge à son arrivée à la rencontre de la députation québécoise.

Malgré l’insistance des journalistes, le premier ministre a refusé net de commenter la grogne que des députés ont exprimée en coulisses, sous le couvert de l’anonymat, dans plusieurs médias au cours des dernières semaines.

« On va avoir des conversations franches, mais on va [consacrer] la plus grande partie de notre énergie pour savoir comment répondre aux besoins des Canadiens », a-t-il notamment affirmé en marge d’une annonce sur le logement à London.

« Les gens ne veulent pas que les politiciens parlent d’eux-mêmes. Les gens veulent que les politiciens se concentrent sur leurs défis », a-t-il enchaîné.

Selon un coup de sonde réalisé par la firme Abacus dont les résultats ont été publiés il y a un peu moins d’une semaine, Pierre Poilievre (36 %) a devancé pour une première fois Justin Trudeau (34 %) au chapitre des impressions favorables, et ses conservateurs détenaient une avance de 14 %.

Les « Nervous Nellies »

Dans les corridors de London, plusieurs députés ont insisté sur le fait que Justin Trudeau avait conduit ses troupes à la victoire en 2015, en 2019, puis en 2021. Et les libéraux, a déclaré le ministre Pablo Rodriguez, « sont capables de se renouveler ».

« M. [Jean] Chrétien avait un terme en anglais pour des députés qui se préoccupent peut-être un peu trop lorsqu’on frappe une bosse : les Nervous Nellies. Moi, ça fait longtemps que je suis en politique, et je pense qu’il faut garder le cap et garder son calme », a plaidé le vétéran Francis Scarpaleggia.

Même son de cloche en provenance du ministre Steven Guilbeault. « Il y a effectivement de l’inquiétude, mais la meilleure chose qu’il faut faire […], c’est de ne pas paniquer. Il faut prendre une grande respiration », a-t-il dit.

« Je pense qu’il y a des gens qui sentent de la nervosité », a renchéri la ministre St-Onge, qui a remporté la victoire par une mince avance en 2021, arguant « le seul sondage qui va compter, c’est celui des élections, et ce n’est pas maintenant ».

D’ici la prochaine élection, importe quand elle se tiendra, le gouvernement est conscient que les Canadiens souffrent en raison du coût de la vie, a indiqué la ministre Mélanie Joly : « On sait que les gens sont frustrés par rapport à l’inflation. […] On sent que la hausse des taux d’intérêt les inquiète, et c’est normal ».

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Mélanie Joly

Un petit, mais bruyant, comité d’accueil attendait les libéraux dans la ville du sud-ouest de l’Ontario. Ils ont circulé autour du centre des congrès où se tient la rencontre, klaxonnant et faisant flotter des drapeaux où l’on pouvait notamment lire « Chrystia Freeland est le diable » et le répandu « Fuck Trudeau ».

La rencontre du caucus prendra fin jeudi, quelques jours avant la rentrée parlementaire de lundi prochain.