(Ottawa) Sous le radar médiatique depuis quelque temps, la Fondation Trudeau réapparaît : un comité de la Chambre des communes a demandé à la vérificatrice générale d’enquêter sur sa gestion du fonds de dotation de 125 millions attribué par le gouvernement fédéral en 2002.

Une motion adoptée par le comité permanent des comptes publics jeudi dernier invite l’agente indépendante du Parlement à « mener une enquête sur l’Accord de financement concernant le fonds de recherche avancée en sciences humaines et sociales entre le gouvernement et la Fondation Pierre Elliott Trudeau ».

On souhaite notamment obtenir les éclaircissements de la vérificatrice générale (VG) Karen Hogan « en ce qui concerne le respect des obligations de la Fondation en vertu de cet accord et en vertu de la législation canadienne pertinente », ajoute-t-on dans la résolution approuvée à l’unanimité, donc par les libéraux.

Si le comité a décidé d’emprunter cette voie, c’est pour utiliser son temps de façon plus judicieuse, expose la bloquiste Nathalie Sinclair-Desgagné. Au lieu de consacrer le temps restant pour entendre des témoins, « on s’est dit que la meilleure façon d’en avoir le cœur net était de demander à la VG de regarder », dit-elle.

La Fondation Trudeau s’est retrouvée dans la tourmente au printemps dernier, à la suite de révélations faites dans le Globe and Mail, selon lesquelles le régime chinois aurait utilisé l’organisme caritatif comme véhicule pour s’ingérer dans le processus démocratique canadien.

Une nouvelle stratégie

Sollicitée par les partis d’opposition à Ottawa en avril dernier, la vérificatrice générale avait fermé la porte au déclenchement d’un audit, en expliquant qu’il n’était pas de son ressort « d’examiner la provenance de dons privés, l’identité d’autres donateurs ou les motivations éventuelles de ceux-ci ».

Le comité a trouvé une autre poignée, croit Mme Sinclair-Desgagné : « La subtilité de cette motion, c’est qu’on demande que la VG regarde l’accord de dotation signé entre la Fondation Trudeau et le gouvernement, qui octroyait 125 millions d’argent public à la Fondation. Ça, c’est directement dans ses cordes ».

Le bureau de Mme Hogan a confirmé réception de la motion, vendredi. « Nous nous penchons sur cette demande et comptons répondre au Comité permanent bientôt », a écrit à La Presse le porte-parole Vincent Frigon.

L’ancienne présidente et cheffe de la direction de l’organisme, Pascale Fournier, a quitté ses fonctions en avril dernier. Devant un comité de la Chambre des communes, elle a soutenu qu’elle avait jeté l’éponge parce que le C. A. avait échoué à faire la lumière sur la gestion du don chinois de 140 000 $ à l’origine de la crise.

Le fonds de dotation de 125 millions a été alloué à la Fondation Trudeau en 2002. Lorsqu’il est devenu chef du Parti libéral du Canada en 2013, Justin Trudeau a pris ses distances de l’organisme portant le nom de son père.

Il a toutefois eu peine à convaincre que le lien était rompu – d’autant plus que le rapport sur l’ingérence lors du scrutin de 2021 a été signé par un ex-dirigeant de la Fondation, Morris Rosenberg, et que l’ex-gouverneur général et ancien membre de la Fondation, David Johnston, a dit non à une enquête publique.

Le gouvernement Trudeau s’est finalement résigné à créer une commission d’enquête publique sur l’ingérence étrangère. Celle qui en tiendra les rênes, la juge Marie-Josée Hogue, est entrée en fonction il y a près de deux semaines.

avec la collaboration de Katia Gagnon, La Presse