(Ottawa) Il est illusoire de penser que l’on pourra faire appel systématiquement aux militaires canadiens pour combattre les incendies ou ériger des digues dans les régions du pays frappées par des évènements météorologiques extrêmes, estime le ministre de la Protection civile, Harjit Sajjan.

Ce qu’il faut savoir

• Les soldats canadiens sont souvent appelés en renfort durant les catastrophes naturelles.

• Selon le ministre de la Protection civile, Harjit Sajjan, ce n’est pas le rôle premier des militaires.

• L’année 2023 représente un point de bascule en matière de lutte contre les changements climatiques.

• Il faut des plans d’urgence adaptés à cette réalité, selon le ministre Sajjan.

Les incendies de forêt sans précédent ainsi que les inondations qui ont frappé plusieurs régions du pays font de l’année 2023 un point de bascule en matière de lutte contre les changements climatiques. Mais une profonde réflexion s’impose sur les moyens que doivent prendre les gouvernements pour atténuer l’impact de ces évènements, a souligné le ministre, qui doit participer ce vendredi à la conférence internationale Adaptation Futures qui a lieu à Montréal.

PHOTO SEAN KILPATRICK, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Le ministre de la Protection civile, Harjit Sajjan

« Les militaires doivent n’intervenir qu’en dernier recours. C’est ce que stipule notre politique de défense. Quand toutes les autres ressources ont été mobilisées, c’est à ce moment que l’on doit faire appel aux Forces armées », a affirmé M. Sajjan dans une entrevue accordée à La Presse.

Le ministre a fait valoir que tous les gouvernements doivent s’atteler à la tâche d’établir des plans d’urgence adaptés à la réalité des changements climatiques. Il compte d’ailleurs entreprendre une tournée du pays au cours des prochains mois afin de sensibiliser ses homologues provinciaux et les dirigeants des municipalités à ce sujet.

Une réflexion s’impose

Dans le passé, les provinces ont eu le réflexe de réclamer l’intervention de l’armée à la suite de catastrophes naturelles. Mais il est temps d’avoir « une conversation honnête » au sujet de l’utilisation optimale de ces ressources.

Selon M. Sajjan, il est aussi important de partager les meilleures pratiques d’intervention afin de protéger les communautés les plus vulnérables. Cela vaut pour les municipalités, les provinces, le gouvernement fédéral et les Premières Nations. La participation de ces dernières est d’ailleurs essentielle, selon lui. Le but : éviter qu’il y ait des écarts, des délais ou des omissions dans l’exécution du plan d’intervention.

« Il y a une urgence extrême à lutter contre les changements climatiques », a souligné le ministre.

Les Canadiens ont vu au cours des dernières semaines les nombreux désastres climatiques qui sont survenus au pays. Des inondations qui ont commencé en mars, des incendies de forêt, puis encore des inondations et ensuite des tornades et un ouragan. Aucune région n’a été épargnée.

Harjit Sajjan, ministre de la Protection civile

M. Sajjan a par ailleurs indiqué qu’Ottawa se penche aussi sur une réforme des Accords d’aide financière en cas de catastrophe afin d’accélérer les déboursés pour que les régions touchées puissent reconstruire plus rapidement et plus durablement après une catastrophe naturelle.

Une ménace réelle

Alors qu’il était ministre du Développement international, M. Sajjan a pu constater les dommages causés par les changements climatiques dans d’autres pays. « Je me rappelle avoir visité le Pakistan après des inondations considérables, a-t-il raconté. Le tiers du pays était sous l’eau. Ces évènements n’affectent pas seulement la vie des gens. Cela menace aussi la sécurité alimentaire. Les terres inondées ne peuvent pas être cultivées le lendemain du retrait de l’eau. »

De tels évènements pourraient aussi affecter l’agriculture au pays. « Il est crucial de prévenir les effets dominos des changements climatiques. Car cela risque de menacer la survie même de l’être humain. C’est aussi simple que cela », a-t-il relevé en mettant l’accent sur la sécurité alimentaire.

L’urgence d’agir est là. Vous pouvez le constater en entendant le stress dans ma voix.

Harjit Sajjan, ministre de la Protection civile

M. Sajjan est le ministre senior de la Colombie-Britannique à la table du Cabinet. Au cours des dernières années, cette province a été essentiellement l’épicentre des grands évènements météorologiques – des incendies de forêt qui ont réduit en cendres la presque totalité de la ville de Lytton à l’été 2021 aux inondations historiques et aux coulées de boue qui ont frappé la vallée du Fraser six mois plus tard.

« La fumée des incendies de forêt de cet été ainsi que la cendre qui est tombée sur les fruits et les légumes dans la vallée de l’Okanagan ont dévasté les récoltes dans cette région. J’espère que les gens sont conscients de tout ce qui se passe. Ce n’est pas juste un incendie qui s’approche d’une communauté ou qui brûle une maison. Cela a aussi des effets dévastateurs à plusieurs égards. »

En 2023, de tels évènements extrêmes ont frappé plusieurs régions au pays. « Les travaux d’adaptation aux changements climatiques sont importants. Il faut partager les meilleures pratiques. »