(Ottawa) Alors qu’Ottawa réaffirme être « préoccupé » par la gouvernance de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), Québec assure plutôt que « des pas […] ont été faits » après qu’un reportage eut révélé de nouvelles dépenses somptueuses et un climat de travail malsain au sein de l’institution à laquelle le Canada verse des dizaines de millions de dollars chaque année.

« C’est clair qu’on a des préoccupations, des préoccupations que j’ai déjà exprimées à la secrétaire générale », a déclaré jeudi la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, lors d’un point de presse dans la capitale fédérale.

Mme Joly a rappelé que c’est ce qui l’avait poussée le printemps dernier à transmettre « une lettre claire » à la grande patronne de l’OIF et à « rediriger » des fonds vers d’autres organisations qui œuvrent dans le domaine de la francophonie.

À Québec, le ton était différent. La ministre des Relations internationales et de la Francophonie, Martine Biron, a assuré que « des pas […] ont été faits » par l’OIF.

Lors d’une mêlée de presse à l’Assemblée nationale, Mme Biron a raconté qu’elle « connaît bien » le rapport dévastateur produit dans les dernières années par la firme KPMG et dont Radio-Canada a publié jeudi des extraits.

« Il a retenti sur mon bureau, a-t-elle lancé. J’étais journaliste. C’est moi qui l’ai refilé à [l’émission] Enquête. J’en connais le contenu. Je sais aussi qu’il y a eu énormément de travail qui a été fait depuis ce temps-là. »

Et quels faits l’ont amenée à faire suivre le rapport ? « Je ne m’en souviens plus », a-t-elle répondu.

La ministre a dit avoir obtenu « des garanties » que l’argent public est bien dépensé par l’OIF. Elle juge cependant qu’« il y a du travail à faire » pour que les Québécois en aient pleinement pour leur argent.

Le chef intérimaire du Parti libéral du Québec, Marc Tanguay, a déclaré ne rien voir de « nouveau » dans les préoccupations à l’égard de l’organisation. « Il est clair que le Québec doit agir, doit y voir », a-t-il jugé, refusant d’élaborer davantage sur sa position pour le moment.

Chez Québec solidaire, la porte-parole Manon Massé a surtout insisté sur l’importance d’offrir « des contextes de travail sains » aux employés. « Oui, c’est stressant. Ici aussi, c’est stressant. Puis, on n’est pas obligé de vivre dans des milieux toxiques », a-t-elle résumé.

Le député péquiste Joël Arseneau s’est désolé que « visiblement, le changement de secrétaire générale n’a rien changé » à une situation qui « dure [et] perdure » malgré des « rapports accablants » qui n’ont pas été rendus publics.

« Il est plus que temps que le gouvernement du Québec, qui finance l’OIF, exige une reddition de comptes complète avec ses partenaires, a tranché M. Arseneau. On continue encore dans cette spirale-là, de manque de transparence, d’opacité, de manque de reddition de comptes, et c’est inacceptable, ça reste des fonds publics. »

Le Canada verse une contribution totale d’environ 15 millions d’euros à l’OIF, soit l’équivalent de 21,7 millions.

avec des informations de Caroline Plante et Patrice Bergeron à Québec, La Presse Canadienne