(Québec) Contrairement à Paul St-Pierre Plamondon qui prédit un « bond économique » suivant la souveraineté du Québec, François Legault affirme que l’ascension du Québec au statut de pays mènerait à des « sacrifices » pour les Québécois, une situation difficile qui pourraient perdurer pendant des années.

Le premier ministre caquiste réagissait mardi à la publication du budget de l’an 1 d’un Québec souverain, dévoilé lundi par le chef du Parti québécois (PQ). Selon M. Legault, qui a lui-même publié en 2005 une évaluation des finances publiques d’un Québec indépendant, le passage de province à pays « serait viable ».

« Mais il faut dire la vérité aux Québécois. Il faut leur dire qu’il y aurait des sacrifices à faire dans le contexte financier actuel », a-t-il dit.

« C’est noble, c’est un beau projet. Le problème, c’est que ce n’est pas la priorité des Québécois », a-t-il ajouté. M. Legault évoquait également la semaine dernière des pertes d’emploi au Québec suivant la réalisation de l’indépendance.

Pendant la période des questions, mardi, le premier ministre s’est montré irrité des sorties des derniers jours de son vis-à-vis du PQ, qui a fait un lien entre la défense du fédéralisme de François Legault et celle faite par Jean Charest lors du dernier référendum.

« Est-ce qu’il y a quelque chose de plus insultant que de se faire traiter de Jean Charest. Il a même dit Jean Chrétien ! », s’est-il indigné. À la mi-octobre, au mégacomplexe hydroélectrique de la Romaine sur la Côte-Nord, le courant passait pourtant bien entre M. Charest et M. Legault, qui a vanté l’attitude « courageuse » de l’ancien premier ministre libéral lors du lancement du chantier, en 2009.

Un impact sur le niveau de vie

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Le ministre des Finances, Eric Girard.

Selon le ministre des Finances Eric Girard, qui a lu le budget de l’an 1 du PQ, l’indépendance du Québec aurait un impact direct sur le niveau de vie des Québécois.

C’est certain qu’initialement, si la monnaie n’a pas la même valeur que le dollar canadien et qu’il y a de la turbulence et de la dépréciation [dans les premières années], c’est une chute du niveau de vie des Québécois.

le ministre des Finances, Eric Girard

Selon le grand argentier du Québec, un Québec pays aurait un niveau d’endettement élevé « et sa cote de crédit serait probablement affectée ».

« De prétendre qu’il y aurait 10 milliards d’économies, c’est une hypothèse qui est très forte. Un nouvel État aurait des responsabilités importantes à assumer. Avant d’avoir des économies, il faudrait assumer ces nouvelles responsabilités », a ajouté M. Girard.

Quand le chef péquiste Paul St-Pierre Plamondon prédit un « bond économique » suivant l’indépendance, le ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, accorde peu de valeur à son hypothèse.

« Je vais répondre une phrase : c’est très naïf de penser ça », a-t-il dit.

Un Québec « plus pauvre », dit le PLQ

Du côté de l’opposition, le chef par intérim du Parti libéral du Québec (PLQ), Marc Tanguay, juge « peu crédible » le budget de l’an 1 dévoilé lundi.

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Le chef par intérim du Parti libéral du Québec, Marc Tanguay.

« La séparation du Québec est viable, mais non souhaitable. Le Québec ne serait pas plus riche indépendant. Le Québec serait plus pauvre », a-t-il affirmé.

Pour sa part, le chef parlementaire de Québec solidaire (QS), Gabriel Nadeau-Dubois, a salué la démarche effectuée par Paul St-Pierre Plamondon.

« Je pense que le Parti québécois a fait un bon travail. C’est un outil qui est intéressant pour faire la pédagogie de l’indépendance », a-t-il dit.

Du côté d’Ottawa, le lieutenant du Québec pour le gouvernement Trudeau, Pablo Rodriguez, s’est inquiété des « divisions » que pourrait créer le retour des débats sur la souveraineté.

« Je me souviens très bien du référendum de 1995. Les divisions que ça a créées, des familles, des membres de familles qui ne se parlent plus […]. Je ne vois pas pourquoi on se replongerait là-dedans », a-t-il dit.

La question de l’urne

Pour les péquistes, la question de l’urne lors de la prochaine élection provinciale, en 2026, sera l’indépendance du Québec.

Paul St-Pierre Plamondon a réitéré lundi qu’il proposera aux électeurs d’organiser un référendum sur la souveraineté dans un premier mandat – que l’appui populaire à son option surpasse les 50 % des intentions de vote ou non.

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Le député du Parti québécois dans la circonscription de Jean-Talon, Pascal Paradis (à gauche), suivi du chef Paul St-Pierre Plamondon.

« On n’est pas sur la question des conditions gagnantes. […] La question, c’est de préparer le terrain sur tous les aspects fondamentaux, réfléchir, avoir une conversation intelligente avec les Québécoises et les Québécois », a dit mardi le nouveau député péquiste Pascal Paradis.

Dans son budget de l’an 1, le Parti québécois prévoit qu’un pays du Québec dès 2027 aurait une situation financière non seulement « très près de l’équilibre budgétaire », mais que l’abolition d’un palier de gouvernement lui permettrait de réaliser « des économies importantes » qui bonifieraient sa capacité à offrir de meilleurs services à la population.

avec Tommy Chouinard et Mylène Crête, La Presse