(San Francisco) Le premier ministre Justin Trudeau a atterri mercredi dans le nord de la Californie pour entamer trois jours de réunions avec les dirigeants des pays membres de la Coopération économique Asie-Pacifique (APEC) à San Francisco.

L’Airbus CC-330 nouvellement acquis par le gouvernement fédéral s’est posé à l’aéroport international de San Francisco, où Kirsten Hillman, l’ambassadrice du Canada aux États-Unis, dirigeait une coterie d’émissaires qui ont accueilli le premier ministre.

Les emblématiques policiers à moto de la « California Highway Patrol » (CHiP) ont escorté le convoi du premier ministre, sirènes hurlantes, jusqu’aux limites du périmètre de sécurité autour du lieu du sommet.

M. Trudeau a d’abord eu une rencontre bilatérale avec le gouverneur de Californie, Gavin Newsom, un politicien « libéral » dont les efforts pour lutter contre le changement climatique ont fait de lui un allié important et précieux du Canada.

PHOTO ADRIAN WYLD, LA PRESSE CANADIENNE

Le gouverneur de la Californie Gavin Newsom et le premier ministre Justin Trudeau

M. Trudeau a ensuite visité un vaste centre de distribution de produits agricoles, où il a rencontré des éducateurs, des représentants du gouvernement et des dirigeants des secteurs de la technologie et de l’agroalimentaire pour discuter des moyens de faire face à la hausse du coût de la vie.

Il a aussi examiné une exposition de produits américains et locaux, notamment des champignons canadiens et des pommes de terre, avant de s’asseoir pour discuter de la manière de maintenir un mode de vie sain à un prix abordable pour les Canadiens et leurs familles.

« Les gens sont confrontés à des défis à différents niveaux, a affirmé M. Trudeau, citant l’inflation et la hausse des taux d’intérêt, la pénurie de logements, ainsi que les spectres imminents des changements climatiques et des conflits mondiaux.

« Il y a de nombreuses raisons pour lesquelles les gens sont anxieux — et quand les gens sont anxieux, ils ont tendance à devenir vraiment pessimistes et à se retirer de notre démocratie et de l’avenir positif que nous essayons de construire », a avancé le premier ministre.

Rencontre entre Biden et Xi

M. Trudeau devait se présenter à une réception de l’APEC organisée par le président américain Joe Biden plus tard dans la journée, avant un dîner de bienvenue avec des dirigeants du secteur technologique.

M. Biden, quant à lui, s’est entretenu mercredi avec le président chinois Xi Jinping dans le but de désamorcer une année de tensions internationales, une réunion largement considérée comme le point central du sommet.

Après quatre heures de discussions, les deux hommes ont convenu de faire un effort pour stabiliser les relations bilatérales, en s’accordant sur des mesures visant à lutter contre le flux de fentanyl illégal et à rétablir les communications militaires.

Le président américain a affirmé à M. Xi : « Je pense qu’il est primordial que vous et moi nous comprenions clairement, de dirigeant à dirigeant, sans idées fausses ni problèmes de communication. Nous devons garantir que la concurrence ne dégénère pas en conflit. »

Les hauts responsables militaires reprendront les négociations, de plus en plus importantes, d’autant plus que les incidents dangereux ou non professionnels entre les navires et les avions des deux pays se sont multipliés, a indiqué un responsable qui s’est exprimé sous couvert d’anonymat pour discuter des accords avant les remarques de M. Biden.

Le responsable américain a décrit des échanges importants entre les deux dirigeants au sujet de Taïwan, M. Biden reprochant à la Chine son renforcement militaire massif autour de Taïwan. M. Xi a cependant assuré à son vis-à-vis qu’il n’avait pas l’intention d’envahir l’île.

M. Biden, a souligné le responsable, a fait savoir que les États-Unis étaient déterminés à continuer d’aider Taïwan à se défendre et à maintenir leur dissuasion contre une éventuelle attaque chinoise, et a également appelé la Chine à éviter de s’immiscer dans les élections de l’île l’année prochaine. Le responsable a décrit la partie taïwanaise des pourparlers comme étant « lucide ».

M. Biden a également appelé M. Xi à user de son influence auprès de l’Iran pour indiquer clairement que Téhéran et ses mandataires ne devraient pas prendre de mesures qui conduiraient à une extension de la guerre entre Israël et le Hamas.

Pas de rencontre avec l’Inde

M. Trudeau, quant à lui, visera des progrès tangibles sur les priorités politiques dans la région indopacifique, lors de réunions bilatérales avec d’autres dirigeants de l’APEC.

Les responsables fédéraux affirment qu’au moins deux initiatives économiques bilatérales avec des partenaires clés de l’indopacifique figureront sur la liste du Canada.

L’absence du premier ministre indien Narendra Modi rend également peu probable un psychodrame autour des allégations de M. Trudeau concernant un lien entre des agents du gouvernement indien et la mort par balle en juin d’un éminent dirigeant sikh en Colombie-Britannique.

« M. Modi n’est pas là, donc l’Inde n’est pas là », a déclaré Andreas Schotter, professeur agrégé de commerce à l’Université Western, en Ontario.

« Certains ont estimé que cela donnait au premier ministre (Trudeau) une chance d’éviter la discussion sur la question, mais je ne pense pas que ce soit une bonne chose : je crois qu’une réunion aurait été préférable à l’évitement », a-t-il ajouté.

Il y a encore beaucoup de travail important à accomplir pour le Canada à l’APEC, soulignent les responsables : il est essentiel d’être à la table dans une partie du monde où les décisions qui sont prises sont susceptibles d’affecter les Canadiens pendant des générations.

Objectifs

Les principaux objectifs de M. Trudeau comprennent une collaboration plus étroite avec les pays de l’APEC qui favorisera la croissance de la classe moyenne et une saine concurrence régionale, le tout dans le but de faire progresser la lutte contre le changement climatique.

Les responsables affirment que M. Trudeau encouragera de nouveaux efforts canadiens visant à favoriser une production alimentaire plus efficace et des chaînes d’approvisionnement plus saines, ainsi qu’à supprimer les barrières commerciales avec les pays du Pacifique.

La région représente environ la moitié du commerce mondial de marchandises et est la destination de plus de 88 % des exportations canadiennes. Les exportations et les importations de marchandises de l’APEC dépassent désormais toutes deux les 12 000 milliards US par année.

La part du Canada dans ce gâteau a atteint 1300 milliards l’année dernière, soit une augmentation de 22 %, grâce à des partenaires tels que les États-Unis, la Chine, le Mexique, le Japon, la Corée du Sud et le Vietnam.

Le sommet intervient un an après que le gouvernement libéral a lancé une nouvelle « stratégie indopacifique » de 2,3 milliards visant à renforcer les alliances régionales afin de se prémunir contre la puissance croissante de la Chine.