(Ottawa) Déjà soumis à un barrage de critiques de la part du Parti conservateur et du Bloc québécois qui réclament sa démission pour avoir enregistré une vidéo diffusée lors du congrès du Parti libéral de l’Ontario, il y a deux semaines, voilà que le président de la Chambre des communes Greg Fergus se retrouve de nouveau sur la sellette pour avoir participé cet automne à un cocktail pour des militants libéraux dans la région de l’Outaouais.

Le député conservateur Andrew Scheer a dévoilé jeudi matin, quelques minutes après qu’un comité a recommandé une sanction financière pour son apparition virtuelle à un évènement partisan, que M. Fergus a participé récemment à « un cocktail militant » organisé par le Parti libéral du Québec.

Depuis deux semaines, le Parti conservateur et le Bloc québécois réclament le départ de M. Fergus en raison de « son grave manque de jugement et d’impartialité » pour avoir enregistré une vidéo soulignant le départ du chef intérimaire du Parti libéral de l’Ontario, John Fraser. Mais le Nouveau Parti démocratique et le Parti libéral ont recommandé comme sanction que M. Fergus rembourse « un montant adéquat » pour l’utilisation des ressources associées à sa fonction.

Or, le leader de l’opposition officielle en Chambre, Andrew Scheer, a lancé ce nouveau pavé dans la mare, provoquant de nouveaux appels à la démission du président qui est entré en fonction il y a environ deux mois seulement.

PHOTO ADRIAN WYLD, LA PRESSE CANADIENNE

Andrew Scheer

« J’ai le regret d’informer la Chambre qu’il y a eu une autre activité partisane qui implique le président. J’ai entre les mains des photos du président en compagnie de la députée de Pontiac qui ont été publiées sur Instagram. L’évènement a été publicisé comme un cocktail militant par le Parti libéral », a affirmé M. Scheer à la Chambre des communes.

« Cet évènement n’a même pas eu lieu dans la circonscription du président. C’est dans une circonscription voisine et c’est décrit comme un cocktail militant », a poursuivi M. Scheer, qui a lui-même été président de la Chambre des communes de 2011 à 2015.

Il a par la suite demandé le consentement de ses collègues pour déposer les documents, mais cela lui a été refusé, provoquant l’ire de M. Scheer.

Le député libéral Mark Gerretsen s’est ensuite levé pour indiquer que les libéraux étaient prêts à examiner les documents du député conservateur.

L’évènement a été organisé par le député libéral provincial de Pontiac, André Fortin, a-t-on plus tard précisé.

Le bureau du président de la Chambre des communes a indiqué dans un courriel à La Presse que M. Fergus « était présent à cet évènement non payant au British Hotel à Aylmer, qui se trouve dans sa circonscription. Il est important de noter que la circonscription fédérale de Hull-Aylmer et la circonscription provinciale de Pontiac se chevauchent ».

Son bureau a aussi indiqué que cette rencontre avait eu lieu avant l’adoption d’un nouveau protocole dans la foulée de l’enregistrement de la vidéo controversée par M. Fergus, qui requiert que le président consulte le greffier des Communes avant de participer à des évènements qui pourraient être de nature partisane.

Ces explications n’ont pas convaincu le Bloc québécois. « Jour après jour, Greg Fergus nous prouve qu’il n’a pas le jugement ni l’impartialité nécessaires pour remplir ses fonctions. Il n’a plus la confiance du Bloc québécois et il ne l’aura plus jamais. Je m’explique mal comment, en seulement deux mois, on peut accumuler autant de manques de jugement, cette fois-ci dans un évènement partisan du Parti libéral du Québec il y a à peine quelques semaines », a déclaré la whip du Bloc québécois, Claude DeBellefeuille.

« Sa présidence est devenue une distraction majeure qui vampirise les débats et les ressources de la Chambre. Il doit le reconnaître, démissionner et clore ce chapitre pour de bon », a-t-elle ajouté.

Une sanction financière recommandée

Ce rebondissement est survenu jeudi matin, quelques minutes après le dépôt d’un rapport du comité de la procédure et des opérations qui a examiné les gestes teintés de partisanerie que l’on reproche à M. Fergus. Le comité recommande que ce dernier rembourse « un montant adéquat » pour l’utilisation des ressources associées à sa fonction.

Depuis le début de cette affaire, les libéraux ont maintenu leur confiance envers M. Fergus. Au comité de la procédure, les troupes de Justin Trudeau et de Jagmeet Singh comptent plus de membres que les conservateurs et les bloquistes.

Le Parti conservateur et le Bloc québécois ont déposé chacun un rapport dissident.

Le Bloc québécois, qui a été la première formation politique aux Communes à demander que M. Fergus tire sa révérence, indique qu’il « ne voit pas comment l’instauration d’une pénalité financière pourra redonner à ses 32 députés l’assurance d’une impartialité, d’un discernement et d’un jugement sans failles ».

Outre la recommandation de sanction pécuniaire, la majorité des membres du comité a recommandé « que l’administration de la Chambre soit chargée de préparer, dans le cadre du cahier de breffage, des lignes directrices pour tout futur président de la Chambre qui présente des limites claires en matière d’impartialité et de non-partisanerie ».

Il est aussi recommandé que M. Fergus présente de nouvelles excuses « indiquant clairement que le tournage de la vidéo dans son bureau et dans ses vêtements [de fonction] était inapproprié, qu’il regrette la situation et qu’il donne un aperçu clair de ce que lui et son bureau feront pour s’assurer que cela ne se reproduise pas ».

Avec La Presse Canadienne