(Québec) Bruno Marchand a reçu des coups en 2023. Mais le maire de Québec n’a pas l’intention de jeter l’éponge.

Le politicien de 51 ans annonce pour la première fois qu’il se représentera aux élections municipales de 2025. Il entend consacrer les deux prochaines années de son mandat à la qualité de vie des citoyens et espère moins parler du tramway, un « trou noir » qui semble avoir aspiré l’ensemble de sa brève carrière politique.

« Je n’ai jamais pensé qu’on aurait suffisamment d’un mandat pour faire tout ce qu’on avait besoin de faire », a expliqué M. Marchand dans une entrevue avec La Presse vendredi matin.

Plusieurs médias ont fait part dans les derniers jours de l’intérêt de l’ancien libéral Sam Hamad pour la course à la mairie dans deux ans. Le maire assure que ces rumeurs n’ont rien à voir avec la décision d’annoncer ses intentions.

Je serai candidat. Je n’ai jamais douté. Pourquoi je l’annonce maintenant, c’est que je ne veux pas que cette question-là devienne une distraction.

Bruno Marchand, maire de Québec

M. Marchand a connu une trajectoire politique en montagnes russes. Il a remporté la mairie à la surprise générale en novembre 2021 par seulement 834 voix. Son taux de satisfaction a bondi à 67 % en 2022, selon un sondage Léger-Le Journal, pour tomber drastiquement à 47 % en novembre dernier, à mi-mandat.

Sa destinée s’est en quelque sorte entremêlée à celle du projet de tramway, hérité de Régis Labeaume. Et les nombreux revers dans ce dossier hypermédiatisé ont certainement nui à l’appui du maire. Bruno Marchand veut d’ailleurs recadrer le message en 2024.

« Dans la dernière année, il y a eu près de 40 000 mentions du maire de Québec dans les médias, note-t-il. Ce qui est beaucoup plus qu’avant. Et de ces mentions, 40 % étaient liées au tramway. »

« On ne peut pas juste s’obstiner avec le gouvernement ! », dit-il. « Je vais continuer de défendre Québec. Je ne me mets pas à plat ventre. Mais j’ai envie que ce soit positif. »

Un tramway à Montréal avant Québec ?

Bruno Marchand refuse de commenter le projet du tramway depuis le 8 novembre et cette rencontre déterminante avec le premier ministre du Québec. Devant l’explosion des coûts, François Legault avait mis le projet sur pause et confié à la Caisse de dépôt le mandat de déterminer le meilleur système de transport en commun structurant pour la capitale. Les conclusions de la Caisse sont attendues en juin.

« L’automne a été dur », concède M. Marchand.

Il a tenu le même discours vendredi, refusant de commenter la nouvelle de La Presse selon laquelle l’Autorité régionale de transport métropolitain (ARTM) allait recommander un tramway plutôt qu’un REM de l’Est.

Cette proposition de tramway, très comparable pour la longueur et le nombre de stations à celle de Québec, coûterait 13 milliards. Rappelons que la Ville de Québec pensait pouvoir construire le sien pour 8,4 milliards.

Je veux qu’on passe à autre chose. La Ville de Québec, ce n’est pas juste un tramway. Je crois toujours au tramway. Ce n’est pas un rejet […] Maintenant, que le gouvernement réponde, que la Caisse réponde, parce que je pense que lorsqu’on est un pouvoir public, on a un devoir de répondre aux journalistes, à la population.

Bruno Marchand, maire de Québec

M. Marchand assure qu’il va lire le rapport de l’ARTM ainsi que les réactions du gouvernement. « Mais les autres cartes ne doivent plus souffrir de ça. Parce que c’est un trou noir, le tramway, comme le troisième lien. Ça attire tout. »

Sortir de la morosité

À mi-mandat, avec une élection dans sa ligne de mire, le maire a donc l’intention de recadrer le message. Il veut sortir de la morosité qui semble s’être installée sur la capitale. « Je me dis : on va enfin parler d’autre chose. On va parler de sécurité, de qualité de vie, de développement économique, de développement durable. »

À un moment de l’entrevue, il brandit un article récent qu’il vient d’imprimer. « Comment la Vieille Capitale est devenue un tigre économique », s’intitule l’article, publié le 10 janvier par Pierre Fortin et Mario Polese. Les deux économistes font valoir que Québec a connu la plus forte croissance économique parmi les grandes régions métropolitaines au pays.

« La Ville de Québec est un tigre économique aux yeux d’économistes réputés. Ce n’est pas banal, estime le maire. C’est fondamental. »

« J’ai envie que ce soit positif. J’ai envie que lorsque la morosité ressort, on puisse dire : attention, ça va bien à Québec, et ça va continuer de bien aller pendant 25, 30 ans », lâche le maire.

Du « courage » en transport actif

Changer de ton. Pour ce faire, Bruno Marchand renoue avec le discours qui lui a permis de se faire élire. Il parle beaucoup de qualité de vie dans les quartiers. N’attendez pas un projet phare comme le Centre Vidéotron de Régis Labeaume. « Est-ce qu’il y aura un seul symbole à travers un seul projet ? La réponse est non. »

La qualité de vie, c’est le principal. Ça allie la sécurité, le logement, l’itinérance, la proximité dans les quartiers, le développement d’infrastructures.

Bruno Marchand, maire de Québec

Mais recadrer le message ne veut pas dire changer de cap, assure Bruno Marchand. Il maintient par exemple ses mesures en faveur des transports actifs, assure que la piste cyclable sur le chemin Sainte-Foy sera conservée et balaie d’un revers de main ceux qui parlent de « guerre à l’auto ».

« En ce moment, on évalue qu’entre 75 et 80 % de l’espace public de circulation est dédié aux voitures. C’est un peu plus qu’à Montréal. On évalue que c’est 1 % pour les vélos, et environ 15 % pour les piétons. »

« Je ne suis pas cave. Je ne vais pas rentrer dans le mur, dit-il. Mais il y a un équilibre à trouver, il faut prendre des décisions courageuses. La mobilité active, c’est une décision courageuse. »