N’écartant aucun scénario, y compris le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche, le premier ministre Justin Trudeau met sur pied une nouvelle Équipe Canada pour défendre les intérêts du pays en prévision de l’élection présidentielle de novembre aux États-Unis.

Le premier ministre confie le mandat de mener à bien la mission de cette nouvelle équipe à deux ministres : le ministre de l’Industrie, François-Philippe Champagne, et la ministre du Commerce international, Mary Ng. L’ambassadrice du Canada à Washington, Kirsten Hillman, fera aussi partie de l’équipe.

Les deux ministres feront appel à des experts et aux dirigeants d’entreprises, aux leaders de syndicats, et ils inviteront les élus provinciaux à participer à cette campagne visant à resserrer les relations entre le Canada et les États-Unis.

Durant le premier mandat de Donald Trump, M. Trudeau s’était tourné vers la ministre Chrystia Freeland, qui était alors ministre des Affaires étrangères, pour renégocier l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA). Les négociations ont été longues et difficiles, mais une nouvelle entente a été paraphée en novembre 2018 et l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM) est entré en vigueur le 1er juillet 2020.

Dans son programme électoral en prévision de l’élection présidentielle, Donald Trump propose notamment d’imposer des tarifs de 10 % sur les importations afin de protéger le secteur manufacturier aux États-Unis. Cet élan protectionniste risque de donner une nouvelle fois du fil à retordre au Canada. Dans le passé, Donald Trump a aussi attaqué le programme de gestion de l’offre pour les produits laitiers et la volaille en vigueur au Canada.

M. Trudeau a annoncé cette démarche au dernier jour de la retraite du cabinet fédéral à Montréal visant à préparer la reprise des travaux parlementaires, le 29 janvier. Cette annonce survient aussi au moment où Donald Trump se dirige vers une victoire facile dans les primaires républicaines après que le gouverneur de la Floride, Ron DeSantis, a jeté l’éponge, dimanche.

L’élection présidentielle de novembre a été un des sujets à l’ordre du jour de cette retraite du cabinet.

En conférence de presse, M. Trudeau a affirmé que le Canada tirait grandement profit d’une relation forte avec les États-Unis. Résultat : tout doit être mis en œuvre pour la protéger et la nourrir. Il a aussi soutenu que Donald Trump représente toujours une source d’incertitude.

« Le Canada profite énormément d’une relation stable avec les États-Unis, quelle que soit l’administration qui se fait élire. […] M. Trump représente une certaine incertitude. On ne sait pas exactement ce qu’il va amener, mais comme on a su le faire, il y a sept ans, on a su bien gérer M. Trump en défendant les intérêts canadiens et en démontrant qu’on peut créer de la croissance économique des deux côtés de la frontière. Ça continue d’être notre approche, puisque nos économies sont encore plus intégrées qu’elles ne l’étaient il y a sept ans. »

M. Trudeau a réaffirmé que les Canadiens ne seraient pas, selon lui, convoqués aux urnes avant octobre 2025, soit après l’élection présidentielle aux États-Unis. Selon lui, son gouvernement demeure le meilleur gage de succès pour les Canadiens si Donald Trump reconquiert la Maison-Blanche.

« On va savoir au mois de novembre qui sera le prochain président américain, mais je vais rappeler aux gens […] qu’on a su tenir le fort, on a su renégocier l’ALENA. […] C’est sûr qu’il n’y a aucun président américain qui est facile pour un premier ministre canadien. C’est toujours une relation complexe où les intérêts des Américains prennent beaucoup de place dans la discussion. Mais dans les relations que j’ai eues avec trois différents présidents américains, j’ai su démontrer que nous avons la capacité de nous entendre, de travailler, de défendre les intérêts des Canadiens et nos valeurs en même temps tout en créant de la croissance économique qui bénéficie à tout le monde », a-t-il exposé.

Rencontrant les journalistes en compagnie de la ministre Mary Ng et de l’ambassadrice Kirsten Hillman, François-Philippe Champagne a pour sa part soutenu que les économies canadienne et américaine ont toujours été liées, mais qu’elles le sont encore plus maintenant, et que des millions d’emplois dans les deux pays dépendent de cette stabilité.

PHOTO CHRISTINNE MUSCHI, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Le ministre de l’Industrie, François-Philippe Champagne

« Une chose que l’ancien président Trump comprend, c’est les emplois », a affirmé le ministre Champagne, ajoutant que « des millions d’emplois dépendent de ce que nous avons réalisé au cours de la dernière décennie ».

« On doit approcher cette relation-là avec confiance, de façon stratégique, de façon résolue », a-t-il aussi ajouté.

L’ambassadrice Hillman a renchéri en disant : « Il faut être bien organisés. Il faut être bien disciplinés. Il faut que nous parlions comme société canadienne, c’est-à-dire les compagnies, le fédéral, les provinces, les maires, nos citoyens, nos agriculteurs, enfin, tout le monde. Nous avons des intérêts clés dans notre relation avec les Américains et nous sommes beaucoup plus forts si nous nous présentons avec une seule voix. »