(Québec) L’administratrice et ex-dirigeante micmaque Manon Jeannotte a été assermentée jeudi à titre de 30e lieutenante-gouverneure de l’histoire du Québec.

Elle est la deuxième femme, et la première personne d’origine autochtone, à occuper cette fonction.

Au moment de la nommer à ce poste, le 7 décembre dernier, le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, l’avait remerciée d’avoir « consacré sa carrière à accroître le bien-être des peuples autochtones ».

Mme Jeannotte était jusqu’à tout récemment directrice de l’École des dirigeants des Premières Nations (EDPN) de HEC Montréal, dont elle était co-instigatrice.

Formée en administration, elle a aussi fait partie pendant plusieurs années du Conseil de la Nation Micmac de Gespeg, près de Gaspé. Elle a notamment été cheffe de la Nation.

Manon Jeannotte a été assermentée à Québec, jeudi, en présence du premier ministre François Legault, lors d’une cérémonie qu’elle voulait sobre. Elle remplace J. Michel Doyon, qui assumait ces fonctions depuis 2015.

« La fierté de plusieurs personnes autochtones à l’égard de ma nomination à ce poste est très palpable, tout comme la fierté de grand nombre de Québécois. J’ai reçu des centaines de messages positifs », a-t-elle déclaré.

« En assumant ce rôle, je m’engage à être une voix représentative pour tous les Québécois en favorisant la compréhension mutuelle et en travaillant pour le bien-être de notre société », a-t-elle ajouté.

Motion de l’Assemblée nationale : « je m’attends […] au respect »

La lieutenante-gouverneure est la représentante du roi Charles III au Québec.

C’est elle qui est appelée à dissoudre le Parlement, à la demande du gouvernement, pour déclencher des élections, et à sanctionner les projets de loi pour qu’ils entrent officiellement en vigueur.

Au lendemain de la nomination de Mme Jeannotte, l’Assemblée nationale avait voté à l’unanimité pour l’abolition de cette fonction essentiellement devenue symbolique.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Le député de Québec solidaire Sol Zanetti

« La fonction de lieutenant-gouverneur n’a pas de légitimité démocratique », peut-on lire dans la motion qui avait été déposée par le député Sol Zanetti, de Québec solidaire.

« Ses origines nous rappellent une période coloniale de notre histoire qui n’a plus d’ancrage dans le Québec moderne. » Le libellé souligne aussi le « faible attachement » des Québécois envers les institutions monarchiques.

Le Parlement a dit souhaiter le remplacement de cette fonction par une institution démocratique.

Dans son allocution, jeudi, Mme Jeannotte a abordé le sujet de front. Elle a dit comprendre la motion, sans toutefois partager ses conclusions.

« La Couronne représente l’un des colonisateurs des premiers peuples de ce continent. En tant qu’Autochtone, je devrais bien être la toute première à vouloir son abolition. Ce n’est pourtant pas le cas », a-t-elle déclaré.

« Comme la majorité des peuples autochtones au Canada, j’ai accepté de travailler avec le système en place, soit le système de la monarchie constitutionnelle, dont le Québec fait partie intégrante.

« Ce processus d’acceptation fait justement partie de la réconciliation », a-t-elle ajouté.

La motion envoie un « message clair » qu’elle ne prend « aucunement de manière personnelle ».

« Je respecte les différences d’opinions, dit-elle. J’agirai toujours avec égard pour les différents partis siégeant à l’Assemblée nationale et je m’attends en retour au même accueil […] et au même respect. »