(Ottawa) La nouvelle cheffe de l’Assemblée des Premières Nations (APN) veut établir des ponts avec le Parti conservateur et son chef Pierre Poilievre.

Cindy Woodhouse Nepinak espère éviter de répéter les tensions et les frustrations qui avaient engendré le mouvement « Idle No More » en 2012.

Cet héritage de l’ère Stephen Harper continue d’influencer la façon dont les jeunes militants et les dirigeants autochtones perçoivent encore le Parti conservateur.

Mme Woodhouse Nepinak a bon espoir que M. Poilievre accepte de collaborer avec les Premières Nations afin d’éviter d’établir des relations tendues, comme c’était le cas pendant que les années au pouvoir des conservateurs.

Les jeunes étaient si frustrés [de l’ancien gouvernement conservateur]. C’est de cette frustration que le mouvement Idle No More est né. Ce n’est pas le genre de relation que je veux établir.

Cindy Woodhouse Nepinak

Idle No More est un mouvement de protestation autochtone provoqué par la Loi sur l’emploi et la croissance présentée en 2012 par le gouvernement Harper.

Mme Woodhouse Nepinak, qui a été élue cheffe de l’APN en décembre, se souvient que les chefs des Premières Nations et le gouvernement conservateur n’étaient tout simplement pas assis à la même table.

Sa rencontre avec Pierre Poilievre, le mois dernier, s’est bien déroulée, mentionne-t-elle.

PHOTO ADRIAN WYLD, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Pierre Poilievre, chef du Parti conservateur

Elle a exhorté M. Poilievre à voter contre le projet de loi C-53 visant à reconnaître des gouvernements métis en Ontario, en Alberta et en Saskatchewan. Les Premières Nations craignent que cette reconnaissance empiète sur leurs propres droits.

Un porte-parole de M. Poilievre ne peut pas dire si celui-ci assistera en juillet à l’assemblée annuelle de l’APN et s’adressera aux chefs en personne. Depuis qu’il a été porté à la tête du Parti conservateur en septembre 2022, il s’est limité à enregistrer des mots de bienvenue aux délégués de l’APN.

M. Poilievre a toutefois rencontré des chefs pour leur promettre qu’un gouvernement conservateur ne se mêlera pas de leurs affaires, surtout s’il s’agit de favoriser la croissance économique par l’entremise de l’exploitation pétrolière et gazière.

Un porte-parole du chef conservateur, Sebastian Skamski, dit que M. Poilievre a promis à plusieurs dizaines de chefs de présenter une loi sur le partage des revenus tirés des ressources naturelles

Ce plan « favorisera la réconciliation d’un point de vue économique en donnant aux Premières Nations la possibilité de tirer plus de revenus des projets bâtis sur leur territoire », ajoute M. Skamski.

Cela leur permettra « de reprendre le contrôle sur leur argent, leurs décisions et sur leur vie ».

Les relations entre les Premières Nations et M. Poilievre n’ont pas commencé sur base encourageante. En décembre 2022, la vidéo du chef conservateur avait été accueillie par des huées.

Scott McLeod, le chef de la Première Nation Nipissing, était l’un des mécontents.

M. McLeod s’était hissé sur l’estrade pour dire aux organisateurs de ne plus « présenter ce genre de vidéo avant les victimes des pensionnats pour autochtones ».

L’absence de M. Poilievre avait encore plus marri les chefs, encore plus que son message, a laissé entendre M. McLeod.

Aujourd’hui, le chef souhaite écouter les conservateurs.

« Mes espoirs ne sont pas bien élevés, reconnaît-il. Mais je suis prêt à entendre ce qu’ils offrent avant de jeter les gants. »

Selon lui, les chefs craignent qu’un gouvernement conservateur tente de réduire les dépenses dans des secteurs que les Autochtones jugent prioritaires.

« Les budgets sont déjà serrés, avance M. McLeod. Il faudra réfléchir longuement avant de penser à appuyer un autre parti que les libéraux. »

Cindy Blackstock, une militante des droits des enfants des Premières Nations, croit qu’il est encore trop tôt pour prédire l’avenir.

« Je juge toujours les gouvernements par ce qu’ils font, pas ce qu’ils disent. »