(Québec) La tentative du premier ministre François Legault d’entreprendre des discussions avec l’opposition pour revoir les règles du financement politique se solde par un échec. Les trois partis déclinent son invitation.

Vendredi, le ministre responsable des Institutions démocratiques, Jean-François Roberge, a envoyé un courriel aux partis de l’opposition pour les inviter à tenir dès cette semaine « une discussion élargie sur le financement politique ».

« J’aimerais, entre autres, discuter des points suivants : financement public et financement populaire, adhésion des membres, course à la chefferie, mécanisme de financement des nouveaux partis et tout autre sujet que vous souhaitez aborder sur la question », écrit-il.

Sa missive fait suite à la sortie de M. Legault qui, jeudi, a annoncé que la Coalition avenir Québec (CAQ) renonce aux dons « d’ici à ce qu’on trouve peut-être des solutions » avec les autres partis au sujet du financement politique.

C’était en réaction à des allégations sur les méthodes de financement de son parti et la participation des ministres à des cocktails partisans. Depuis plusieurs jours, l’opposition accusait le gouvernement de monnayer l’accès à ses ministres. « Il y a une perception, il y a des doutes actuellement », reconnaissait le premier ministre, tout en disant que son parti respectait les règles.

François Legault demandait aux autres partis de renoncer eux aussi au financement populaire. Il mandatait par le fait même Jean-François Roberge pour prendre contact avec eux et lancer des discussions.

« Un enjeu de la CAQ »

Le Parti québécois a répondu à l’invitation de M. Roberge samedi. Il plaide que « l’enjeu soulevé en matière de financement populaire » au cours des derniers jours « relève du non-respect des règles actuelles et non du caractère inadéquat des règles elles-mêmes ».

« On comprend la stratégie du gouvernement, mais ce n’est pas un enjeu de la classe politique, c’est un enjeu de la CAQ », soutient le député Pascal Bérubé en entrevue.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Le député péquiste Pascal Bérubé

On n’a pas besoin de participer à une rencontre, on l’a dit publiquement. Nous, on propose que les ministres ne soient pas admis dans les activités de financement. La CAQ a juste à retirer ses ministres des activités de financement, et on va saluer ça.

Pascal Bérubé, député du Parti québécois

Selon le directeur général des élections du Québec (DGEQ), « la présence d’un ministre à une activité de financement soulève […] le risque qu’un échange intervenu dans le cadre de l’activité puisse aboutir à une décision ayant une apparence de constituer un avantage fourni en échange d’une contribution ».

Le Parti libéral du Québec décline lui aussi l’invitation du ministre Roberge. Il existe déjà un comité créé par le DGEQ et réunissant tous les partis pour discuter du financement politique, plaide-t-il.

Québec solidaire préfère également poursuivre les discussions en cours au comité consultatif du DGEQ « pour en arriver à un processus consensuel de révision de la Loi électorale ».

Au sein de ce comité, la CAQ s’était prononcée il y a quelques mois, comme les autres partis, en faveur de faire passer le plafond des dons de 100 $ à 200 $ par an. Elle a changé son fusil d’épaule récemment, au moment où commençait la controverse sur son financement.

Abolir le financement populaire, comme l’a suggéré François Legault, serait inconstitutionnel : cette mesure contreviendrait à la liberté d’expression protégée par les chartes, a déjà signalé la Commission des droits de la personne.

Le DGEQ a confirmé à La Presse lundi qu’« il n’est désormais plus possible de faire un don à la CAQ à partir du site web d’Élections Québec ». « La mesure est donc en place, à la demande du parti », a dit sa porte-parole Julie St-Arnaud-Drolet.