(Montréal) Québec solidaire (QS) souhaite que l’expansion du privé en santé cesse. Le porte-parole solidaire Gabriel Nadeau-Dubois a demandé mercredi matin à la Coalition avenir Québec (CAQ) de mettre un frein dès maintenant à l’ouverture de nouvelles cliniques spécialisées privées.

En conférence de presse devant l’Institut de chirurgie spécialisée de Montréal, le porte-parole en matière de santé de QS, Vincent Marissal, et M. Nadeau-Dubois ont exhorté le ministre de la Santé, Christian Dubé, à arrêter d’octroyer de nouveaux permis de centres médicaux spécialisés (CMS).

Selon M. Nadeau-Dubois, beaucoup de Québécois n’ont pas le choix de se tourner vers le privé et ils doivent souvent débourser des sommes importantes pour obtenir des soins.

« Le système à deux vitesses, il existe, il est sous nos yeux et il s’agrandit, a-t-il dénoncé en point de presse. Aujourd’hui, on sonne l’alarme et on dit : est-ce qu’on peut au moins mettre ça sur ’’stop’’ et pas donner de nouveaux permis pour des nouvelles cliniques privées ? Le Québec qu’on veut, ce n’est pas un Québec où c’est ton revenu qui détermine ta facilité à te faire soigner. »

Dans un courriel, le cabinet du ministre de la Santé s’est insurgé de la vision de QS par rapport à la place du privé dans le système de santé. « Comment Québec solidaire peut-il être contre une opération gratuite pour un patient en attente d’une chirurgie ? Grâce à la collaboration du gouvernement avec ces cliniques, ce sont 200 000 Québécois de plus qui ont été opérés plus rapidement depuis la pandémie. »

QS affirme que le nombre de CMS a explosé sous la gouvernance de la CAQ. Dans un communiqué de presse, la formation politique soutient que depuis l’arrivée au pouvoir de la CAQ, le ministère de la Santé et des Services sociaux a délivré plus de 36 nouveaux permis pour des CMS et que le nombre de médecins exerçant dans ces centres privés dans le cadre du régime public est passé de 226 en 2018 à 917 en 2023.

« Notre vision du privé en santé a toujours été claire : il doit être complémentaire au réseau public, dans le respect de l’universalité et de la gratuité des soins, précise le cabinet par écrit. Quand on envoie des patients du public au privé, ce sont les patients qui gagnent parce qu’ils obtiennent leurs soins, sans avoir à payer, pendant qu’on rebâtit le réseau. »

En point de presse, M. Marissal n’a pas mâché ses mots à l’égard des précédents gouvernements qui se sont succédé.

« À force d’avoir des gouvernements néo-libéraux qui nous disent que ça ne marche pas, qui définancent et qui permettent au privé de prendre de plus en plus de place, ils sont en train de faire la démonstration que le système public ne fonctionne pas. C’est sans surprise, vous l’avez définancé et dévalorisé, a-t-il déclaré. Vous n’êtes pas capable de construire un hôpital comme Maisonneuve-Rosemont que ça fait dix ans qu’on en parle pendant que vous donnez des permis de construction de clinique privée quasiment dans des machines distributrices. »

M. Marissal a soutenu que le système public n’est pas « si mauvais que ça, c’est l’accès qui est compliqué ». Il a fait valoir qu’à partir du moment où une personne est « dans le système », elle est bien soignée.

Ramener le personnel au public

MM. Marissal et Nadeau-Dubois ont tous deux souligné que le personnel qui déserte le réseau public au profit du privé est un problème. « Les hôpitaux publics, on les a laissés se détériorer sous nos yeux au point où ça tient avec de la broche, se désole M. Marissal. Alors sans grande surprise les gens n’ont pas tellement envie d’aller travailler là et je ne les blâme pas. C’est pourquoi nos plateaux techniques, nos blocs opératoires, fonctionnent au ralenti. »

Pour Québec solidaire, cesser de délivrer des permis aux cliniques privées est la première étape pour ramener le personnel dans le réseau public. « En ce moment, on est loin de fermer la plaie, on alimente l’hémorragie en donnant toujours plus de permis pour qu’on ouvre toujours plus de cliniques privées. La première étape pour solutionner le problème, c’est d’arrêter de l’aggraver », a soutenu M. Nadeau-Dubois, qui a ajouté que mettre fin à cela constitue « le strict minimum ».

Il faut ensuite instaurer de meilleures conditions de travail dans le réseau public, insiste M. Nadeau-Dubois.

Ce dernier dresse un bilan négatif des stratégies de la CAQ pour diminuer les listes d’attentes. Il a indiqué que la cible du gouvernement pour mars 2024 était que le nombre d’opérations en attente de plus d’un an soit de 7600, mais que la liste d’attente s’élève désormais à 12 000. « La promesse de la CAQ d’avoir recours au privé pour diminuer les listes d’attente en chirurgie, elle ne fonctionne pas. […] M. Dubé a raté complètement sa cible de réduction de liste d’attente en chirurgie. »

La proposition de mercredi est la deuxième de QS en quelques semaines adressées au ministre de la Santé par rapport aux cliniques privées. Le 22 mars dernier, QS demandait au ministre Dubé d’imposer une grille tarifaire aux cliniques privées. Lors d’une interpellation au Salon bleu, M. Dubé s’était montré ouvert à encadrer les tarifs.

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