(Ottawa) L’effeuillage budgétaire des dernières semaines respecte-t-il les règles de la Chambre des communes ? Le leader parlementaire du Bloc québécois, Alain Therrien, estime que le gouvernement Trudeau a contrevenu à une longue tradition parlementaire, empêchant ainsi les partis d’opposition de bien faire leur travail et créant une situation qui pourrait mener à des délits d’initiés.

Il a demandé au président de la Chambre des communes mardi de se pencher sur la question. Celui-ci a pris l’affaire en délibéré.

« Il est déconcertant que le gouvernement lui-même dévoile hâtivement des éléments importants de son budget, sans prendre la mesure des effets que cela peut occasionner », a-t-il déclaré en chambre.

Le premier ministre Justin Trudeau et les membres de son Cabinet ont profité des deux dernières semaines de relâche parlementaire pour dévoiler des pans du prochain budget fédéral. Du jamais vu sur la scène fédérale. Le document doit être déposé le 16 avril.

Construction de logements, création de places en garderie, programme d’alimentation scolaire… Les multiples intrusions dans les champs de compétence des provinces ont fait rugir le Québec. Le Bloc québécois a déjà indiqué qu’il n’allait pas appuyer le budget.

Normalement, le budget est dévoilé aux parlementaires et aux journalistes à huis clos durant les heures précédant son dépôt à la Chambre des communes. Le gouvernement effectue ensuite une tournée d’annonces pour expliquer ses principales mesures.

Le fait de l’égrener à l’avance sans permettre aux partis d’opposition de consulter l’ensemble du document les empêche « d’avoir une position éclairée et de demander des comptes au gouvernement en toute connaissance de cause », a fait valoir Alain Therrien.

« Ces annonces budgétaires pourraient attribuer des avantages financiers à certains spécialistes de la question ce qui pourrait être considéré comme des délits d’initiés », a-t-il ajouté.

Il a rappelé qu’en 1989, Brian Mulroney qui était alors premier ministre « avait fait accuser au criminel un journaliste pour vol d’informations confidentielles et divulgation avant le dépôt du budget ». Cette fuite avait forcé le ministre des Finances de l’époque à le rendre public de façon précipitée. Les accusations avaient par la suite été abandonnées.