Le gouvernement Trudeau n'a toujours pas l'intention d'annuler le contrat de vente de 900 véhicules blindés légers conclu entre le Canada et l'Arabie saoudite en 2014, même s'il appert que le régime saoudien a utilisé des véhicules comparables pour mâter des dissidents de la minorité chiite dans l'est de ce pays en 2012 et, plus récemment encore, en 2015.

Le quotidien The Globe and Mail a mis en ligne mercredi des images filmées en sol saoudien qui semblent indiquer que le régime de l'Arabie saoudite a eu recours à de tels véhicules contre sa population pour mettre fin à la dissidence.

Aux Communes, le premier ministre Justin Trudeau a réitéré ce qu'il a déclaré à quelques reprises dans le passé que son gouvernement n'avait guère l'intention de déchirer un contrat dûment signé par l'ancien gouvernement conservateur de Stephen Harper puisque cela aurait pour effet de nuire à la réputation et à la crédibilité du Canada sur la scène internationale.

Le ministre des Affaires étrangères, Stéphane Dion, a finalement autorisé la vente de ces véhicules en émettant le permis d'exportation à l'entreprise qui les fabrique, General Dynamics Land System, à London, en Ontario, le mois dernier. Il a pour sa part affirmé que ces vidéos ne mettent pas en cause de l'équipement canadien. Résultat: il ne voit pas la nécessité d'annuler le permis d'exportation.

«Notre équipe d'experts regarde toujours ce genre d'information, les scrute à la loupe et si jamais ça devait être un équipement canadien, on réagirait. Mais comme l'a dit l'article lui-même ce n'est pas de l'équipement canadien.  Ça fait depuis 1993 qu'on vend cet équipement, ce véhicule blindé léger et on n'a jamais vu aucune preuve qu'il avait été utilisé à mauvais escient», a indiqué le ministre Dion en mêlée de presse.

En confirmant qu'il avait délivré le permis, en avril, M. Dion avait justifié sa décision en invoquant les retombées économiques de cette vente et la crédibilité du Canada. Mais il avait aussi affirmé qu'il demeurerait vigilant pour s'assurer que le régime saoudien n'utiliserait pas ces véhicules pour opprimer sa population.

«Pour le moment, le point fondamental c'est que ce n'est pas un équipement militaire canadien et qu'on vend notre équipement militaire - pas nous, mais en fait les compagnies canadiennes, à ce pays depuis 1993 et jusqu'ici on n'a aucune indication qu'il était mal utilisé», a encore dit M. Dion.

Mais pour le chef du NPD, Thomas Mulcair, ces images devraient suffire au gouvernement Trudeau pour déchirer le contrat de vente à l'Arabie saoudite.

«C'est le même M. Dion qui a dit il y a quelques semaines à peine que s'il y avait une preuve d'abus des droits de la personne en Arabie saoudite avec ce genre d'équipement, qu'il allait annuler les permis d'exportation», a affirmé M. Mulcair.

«Soyons clairs: ce n'est pas une question de savoir dans quel pays l'équipement a été fabriqué: c'est d'utiliser contre des civils un équipement militaire blindé. C'est ça, la vraie question», a-t-il ajouté.

Une dizaine d'organisations civiles telles qu'Amnistie internationale ont vertement critiqué la décision du gouvernement Trudeau d'aller de l'avant avec ce contrat étant donné le piètre bilan de l'Arabie saoudite en matière de respect des droits de la personne.