Si le gouvernement du Québec veut profiter d'un dédommagement pour l'harmonisation de sa taxe de vente, il devra accepter les règles d'Ottawa. Car le gouvernement fédéral n'a pas l'intention de céder, comme l'a confirmé le premier ministre Stephen Harper, mercredi, avant de s'attirer les foudres de l'opposition.

Questionné sur son refus de verser le dédommagement de 2,2 milliards de dollars que réclame la province, M. Harper a répliqué que le gouvernement québécois n'avait toujours pas réellement harmonisé sa taxe de vente à celle du fédéral, puisqu'il compte encore deux taxes.

Les règles doivent être les mêmes pour toutes les provinces, a fait valoir le premier ministre, et il revient donc à Québec d'accepter l'entente telle qu'elle a été rédigée par le fédéral.

«Les termes sont clairs: on ne paie pas pour deux taxes séparées», a martelé M. Harper, lors de la période des questions aux Communes.

«Si le Québec veut la même entente que celle obtenue par l'Ontario, il peut signer l'entente aujourd'hui. Le fédéral donnera les mêmes termes. Jusqu'à maintenant, le Québec ne veut pas faire cela. Nous sommes prêts à négocier pour trouver une solution», a-t-il indiqué.

Mais ce nouvel argument a fait monter le ton à la Chambre des communes, le néo-démocrate Thomas Mulcair accusant le gouvernement d'être «en train de donner des munitions à ceux qui disent que le fédéral, c'est des «crosseurs»».

Un langage coloré qui, prononcé en français, a failli passer inaperçu. Mais alerté par des collègues francophones de la signification du terme utilisé par M. Mulcair, le leader du gouvernement à la Chambre, Jay Hill, a dénoncé, une demi-heure plus tard, ses propos jugés non parlementaires.

Le néo-démocrate n'a toutefois pas semblé regretter ses paroles, à sa sortie des Communes. Car selon lui, la nouvelle défense du gouvernement est inacceptable.

«C'est une absurdité, et la mauvaise foi crasse du gouvernement fédéral dans ce dossier-là est incommensurable (...) On est en train de donner des milliards à l'Ontario et à la Colombie-Britannique pour l'harmonisation (...) Maintenant que c'est fait pour eux, qu'ils vont avoir des milliards, le Québec, encore une fois, doit attendre pour recevoir son dû», a-t-il argué.

Une opinion partagée par le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe, qui a déploré l'iniquité des conservateurs dans ce dossier, qui agissent avec injustice en ayant «deux poids, deux mesures».

«Est-ce cela le fédéralisme canadien, où le Québec ne récupère jamais son dû et où les députés conservateurs du Québec applaudissent béatement les injustices commises contre le Québec?», a lancé le leader bloquiste au premier ministre.

L'harmonisation des taxes de vente a valu à l'Ontario 4,3 milliards de dollars, tandis que la Colombie-Britannique a eu droit à 1,6 milliard.

Dans son budget déposé mardi, le ministre des Finances du Québec, Raymond Bachand, n'a pas tenu compte des 2,2 milliards qu'il attend toujours du fédéral. Mais selon les partis d'opposition, à Ottawa, si la province pouvait compter sur cette somme, elle n'aurait pas eu à imposer des frais supplémentaires aux Québécois en matière de soins de santé.

«A-t-il (le ministre fédéral des Finances, Jim Flaherty) réalisé que la menace qui plane sur la gratuité des services de santé est directement reliée au fait qu'il a privé le Québec des 2,2 milliards de dollars qui lui sont dus?», a reproché M. Mulcair.

Le Bloc québécois et le Nouveau Parti démocratique (NPD) ont d'autre part accusé le gouvernement fédéral d'être revenu sur sa parole. Car Ottawa avait accepté l'harmonisation du Québec en 1992, mais refuse aujourd'hui de lui accorder un dédommagement.

Le gouvernement Harper a pour sa part soutenu que les négociations se poursuivaient avec Québec.

Mardi, l'Assemblée nationale a adopté une motion unanime dans laquelle elle a condamné le «refus du gouvernement fédéral d'offrir au Québec une compensation comparable à celle obtenue pour la Colombie-Britannique et l'Ontario».