Avec leurs 70 kilos et leurs pédales «décoratives», les scooters électriques n'ont pas leur place sur les pistes cyclables, estime la Société d'assurance automobile du Québec, qui veut de les forcer à prendre la rue.

« On travaille avec les gens du ministère des Transports du Québec sur une modification au Code de la sécurité routière pour les interdire des pistes cyclables, dit Gino Desrosiers, porte-parole de la SAAQ. Il reste à trouver des façons de les identifier, entre autres pour les policiers.»

La déclaration de M. Desrosiers faisait suite à une demande formulée hier par Vélo-Québec. « Le phénomène est apparu l'an dernier mais il prend de plus en plus d'ampleur, dit Suzanne Lareau, de Vélo-Québec. Les gens nous écrivent qu'ils ne sentent pas en sécurité quand ils se font frôler par ces engins.»

C'est que le paysage à deux roues a beaucoup changé depuis une décennie. Il y a maintenant des scooters électriques aussi puissants que les modèles à essence. Ceux-là n'entrent pas dans la définition de vélo électrique. Ils doivent être immatriculés et circuler dans la rue. Leurs pilotes doivent porter un casque de moto. Mais nul besoin d'avoir un permis moto, tout comme pour les modèles à essence d'une cylindrée inférieure à 50 cc.

Il y a aussi les vélos à assistance électrique. Pesant une vingtaine de kilos, ils permettent de monter les côtes sans effort mais on peut tout de même pédaler pour avancer.

Puis, il y a des vélos électriques qui ont l'apparence d'un scooter. Leur vitesse est bloquée à 32 km pour respecter la réglementation fédérale, mais leur poids (70 à 80 kilos) rend illusoire l'idée de se servir des pédales, estime Mme Lareau.

Ce sont ces derniers qu'elle veut plus voir dans les pistes cyclables. «Actuellement on vend des véhicules sous de fausses représentations, en disant que c'est des vélos, dit-elle. C'est plus large, ça va plus vite et ça a une plus grande vitesse d'accélération que les vélos. Vous ne réussiriez pas à faire 100 m juste avec les pédales. Leur place n'est pas sur les pistes cyclables.»

«Effectivement ça peut causer un problème, dit M. Desrosiers. Les pédales sont là par parure. On a déjà sensibilisé Transport Canada là-dessus. Ce sont des scooters électriques qui se font passer pour des bicyclettes assistées.»

La question est prise dans un écheveau administratif : les normes sont fédérales, le code de la route est provincial, les pistes cyclables sont municipales, mais cela n'empêchera pas la SAAQ d'intervenir, dit M. Desrosiers. «On travaille avec Transport Canada pour uniformiser la réglementation, mais si on juge qu'il y a un problème, on peut agir pour le Québec» dit-il.

Un vendeur de scooters électriques n'est pas d'accord avec cette interdiction annoncée. « Ce serait grave des les interdire alors que les gens ont acheté ça pensant qu'ils pouvaient aller sur les pistes cyclables, dit David Goldman, propriétaire d'Ecomoto. Il y a beaucoup de personnes âgées qui en ont acheté parce qu'ils veulent aller sur ces pistes.»

Pour M. Goldman, les deux-roues électriques font «partie de la solution»pour réduire la consommation d'essence en ville. «Il faut plutôt adapter les lois aux véhicules lents, dit-il. Actuellement, par exemple, on ne peut pas quitter l'île des Soeurs en scooter électrique. Si on met des lois contres les scooters électriques, ça signifie juste plus d'essence consommée au pays. C'est contre l'avenir.»