C'est la première rentrée comme enseignants de Cédric Devouassoux, 28 ans, et Marie-Ève Plante, 23 ans. Fraîchement diplômés, ils joignent les rangs des 90 000 profs du Québec pour qui l'heure de la rentrée sonne ces jours-ci.

Une profession de plus en plus féminine: il y avait 22,5% d'enseignants masculins l'an dernier dans les écoles publiques, contre 23,3% en 2007-2008 (temps plein et temps partiel, sans compter le personnel d'appoint). Si on exclut le secondaire, ce taux chute à 12,2% d'hommes en 2007-2008.

 

Le vent ne semble pas près de tourner, selon ce qu'a appris La Presse. Seuls 8,3% des nouveaux inscrits cet automne au baccalauréat en enseignement préscolaire-primaire à l'Université de Montréal sont des hommes. Ils étaient 10% l'an dernier. Léger recul aussi à l'Université de Sherbrooke, où 9,9% d'hommes ont été admis cette année, contre 10% en septembre 2008. À l'Université Laval, ils sont encore plus rares: 5,6% cet automne. Et plusieurs abandonneront avant de devenir officiellement profs.

La situation inquiète la ministre de l'Éducation, Michelle Courchesne. «On va rencontrer les facultés de l'éducation dans le courant de l'automne, pour parler de l'insertion des hommes dans la profession enseignante», a dit à La Presse Jean-Pascal Bernier, chef de cabinet de la ministre.

Le Ministère compte également valoriser les hommes profs durant la Semaine des enseignants, en février. «On veut en profiter pour inciter les garçons à s'inscrire en sciences de l'éducation», a indiqué M. Bernier.

Discrimination positive

Cédric Devouassoux et Marie-Ève Plante ont écrit à la ministre pour réclamer davantage: des mesures de discrimination positive. «À compétence égale, il faut favoriser les candidatures masculines à l'admission dans les universités», estime Cédric. Quand ils sont entrés au baccalauréat en enseignement préscolaire-primaire à l'Université de Sherbrooke en 2005, il y avait 10 gars sur 225 étudiants. Seuls quatre ont obtenu leur diplôme, au printemps dernier.

«Pour les garçons, c'est important d'avoir un modèle masculin qui lit de la poésie, écrit des textes», fait valoir Marie-Ève, qui partage la cause de son conjoint. «Durant tout le primaire, je ne rêvais que d'arrêter l'école à 16 ans, tant je détestais ça, a témoigné Cédric. Mais j'ai ensuite eu la chance inouïe de rencontrer des profs qui donnaient aux gars le goût de travailler à l'école. J'ai voulu faire ça, moi aussi.»

Québec écarte pour l'instant le recours à la discrimination positive. «On envisage plus des mesures pour inciter les gars à s'inscrire, a dit M. Bernier. Je ne veux pas brûler d'étapes. On va rencontrer les facultés, ensuite il y aura peut-être des mesures annoncées par la ministre.»

Pour donner de la visibilité aux hommes profs, Cédric portera le drapeau de la faculté d'éducation de l'Université de Sherbrooke à la collation des grades, le 26 septembre. Le couple a plein d'autres idées pour attirer les hommes dans les écoles: aller parler du métier aux moniteurs de camps de jour, aux entraîneurs de sport, créer un programme de mentorat entre profs masculins...

«Dans les écoles, on sent toujours qu'ils sont heureux de recevoir un homme», dit Cédric, qui fait de la suppléance depuis quatre ans. C'est d'ailleurs ce qui attend Marie-Ève et lui, cette rentrée: des remplacements ou de la suppléance. Avis aux intéressés, deux jeunes profs passionnés - particulièrement attentifs aux besoins des garçons - sont prêts à travailler.

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La rentrée de 90 000 profs

Les écoles publiques du Québec comptent:

> 5142 enseignants de maternelle (dont 98% de femmes)

> 48 273 enseignants de primaire (dont 85% de femmes)

Âge moyen*: 40,3 ans

> 36 568 enseignants de secondaire général (dont 62,5% de femmes)

Âge moyen*: 42,7 ans

Total: 89 983 enseignants (à temps plein, partiel et personnel d'appoint)

Salaire annuel des enseignants à temps complet: de 39 179$ à 70 352$

* l'âge moyen exclut le personnel d'appoint.

Source: Ministère de l'Éducation, 2007-2008.

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Les hommes parmi les futurs profs

 

À l'Université de Montréal

Nouveaux inscrits, automne 2009

Futurs profs de préscolaire-primaire : 19 hommes ou 8,3% (ils étaient 10% en 2008)

Futurs profs de secondaire : 97 hommes ou 39,6% (ils étaient 44,1% en 2008)

 

À l'Université de Sherbrooke

Admissions, automne 2009

Futurs profs de préscolaire-primaire : 43 hommes ou 9,9% (ils étaient 10% en 2008)

Futurs profs de secondaire : 143 hommes ou 42,4% (ils étaient 41% en 2008)

 

À l'Université Laval

Nouveaux inscrits, automne 2009

Futurs profs de préscolaire-primaire : 14 hommes ou 5,6% de 250 étudiants

Futurs profs de secondaire : 67 hommes ou 33,3%