Pour la première fois, le nombre d'élèves allophones a surpassé celui des francophones dans les écoles publiques de l'île de Montréal, a appris La Presse. «La majorité est comme inversée, a dit Dominique Sévigny, auteur du Portrait socioculturel des élèves inscrits dans les écoles publiques de l'île de Montréal au 30 septembre 2008. C'est une tendance lourde, qui devrait se poursuivre à moins qu'il arrive quelque chose de majeur au niveau de l'immigration.»

En 2008, à peine 39% des élèves des écoles primaires et secondaires étaient de langue maternelle française. «Ce taux chute graduellement, au moins depuis 1998», a indiqué M. Sévigny. Quant à la proportion d'élèves de langue maternelle autre que le français ou l'anglais, en constante augmentation, elle a atteint 39,5%. Le part d'élèves anglophones stagne autour de 22% (ces données incluent les écoles anglaises).

L'une des causes de cette nouvelle réalité : la hausse du nombre de jeunes immigrants. Près de 38 000 élèves des écoles de l'île étaient nés à l'étranger en 2008, soit 5000 de plus qu'en 2005. Ils forment désormais 20,63% de la population scolaire, du jamais vu. «Il y a une accélération de leur croissance», a souligné le chercheur du Comité de gestion de la taxe scolaire de l'île de Montréal.

Leurs principaux lieux de naissance étaient l'Algérie (2,1% de tous les élèves de l'île y sont nés), Haïti (1,6%), le Mexique (1,3%) et les États-Unis (1,2%), le pourcentage d'élèves nés dans ces deux derniers pays s'étant accru en 2008.

Moins de 40% des élèves étaient nés au Québec, comme leurs deux parents. Les autres étaient nés au Québec de deux parents nés à l'étranger (23,1%, ce taux plafonne depuis 2005), nés au Québec dont un parent est né à l'étranger (9,9%) ou nés ailleurs au Canada ou dont les deux parents sont nés ailleurs au Canada (2,4%).

Concentration ethnique très forte pour 60 écoles

L'école la plus multi¬ethnique de l'île est toujours le pavillon Hébert, dans l'arrondissement de Saint-Laurent. Tous ses élèves (100%) sont nés à l'étranger ou nés ici de deux parents venus d'ailleurs. Fait nouveau, un total de 59 écoles de l'île comptent 75% ou plus d'élèves «issus d'autres cultures», 10 de plus qu'en 2007. Or, des effets négatifs peuvent apparaître quand la concentration ethnique est très forte, atteignant ce seuil de 75%, selon Marie McAndrew, professeure à l'Université de Montréal.

Malheureusement, plus l'immigration de sa famille est récente, plus un élève est susceptible de résider dans une zone défavorisée. C'est le cas de 46,1% des élèves nés à l'étranger, en légère baisse de 1% par rapport à l'année précédente.

«Parc-Extension est un quartier d'accueil des nouveaux immigrants qui ont peu de moyens, a illustré M. Sévigny. Quand ils ont plus de moyens, ils quittent habituellement pour des quartiers moins défavorisés.» D'autres immigrants les remplacent alors. «Il y a une rotation, a reconnu le chercheur, et ç'a un effet probablement négatif sur la cohésion sociale.»