Les élèves du primaire et du secondaire pourraient bientôt se retrouver sur les bancs d'école certains week-ends. Québec veut modifier le calendrier pédagogique afin d'accorder davantage de flexibilité aux institutions pour les aider à lutter contre le décrochage scolaire. Les fédérations d'enseignants s'interrogent déjà sur la faisabilité d'une telle mesure.

Le ministère de l'Éducation a déposé mercredi un projet de règlement qui vise à calculer l'année scolaire en nombre d'heures plutôt qu'en nombre de journées. Au lieu de se rendre à l'école 180 jours par année, les enfants du primaire et du secondaire recevraient de 900 à 1000 heures d'enseignement réparties sur 180 à 200 jours. Les «jours de congé» des élèves seraient abolis, ce qui ouvrirait la porte à la tenue «d'activités éducatives» la fin de semaine. Ces nouvelles dispositions s'appliqueraient au privé et au public dès la prochaine année scolaire.

Le hic, c'est qu'en vertu des conventions collectives actuelles, les enseignants du secteur public et bon nombre de ceux du secteur privé peuvent uniquement travailler du lundi au vendredi. Cela pourrait bientôt changer puisque le gouvernement est en train de négocier les prochaines conventions collectives de la fonction publique.

«Ce n'est certainement pas par hasard que ce projet survienne à ce moment-ci de la négociation. Surtout quand les mots souplesse et flexibilité font partie du discours patronal», a expliqué Sylvie Lemieux, attachée de presse de la Fédération des syndicats de l'enseignement, qui représente 60 000 enseignants du secteur public. «Cela dit, nous allons analyser très attentivement les impacts du projet de règlement à notre conseil fédéral mercredi.»

La secrétaire générale de la Fédération nationale des enseignants et enseignantes, qui représente une part des enseignants du secteur privé, craint que la mesure soit trop compliquée à implanter.

«C'est tout un changement de culture! a souligné Caroline Senneville. C'est déjà assez compliqué de concilier le travail, les familles reconstituées, le service de garde et les activités parascolaires. Si les enfants font une activité obligatoire durant huit heures le samedi, il faudra qu'ils prennent congé huit heures ailleurs dans la semaine. Qui va prendre soin des enfants ces jours-là? Qui va s'occuper des autobus scolaires? Des installations? Déjà que c'est la folie lors des journées pédagogiques.»

Selon l'attachée de presse de la ministre de l'Éducation, Michelle Courchesne, le projet de règlement ne vise pas à remodeler en profondeur l'horaire des écoliers. «Le but, c'est de donner plus de flexibilité aux institutions scolaires pour qu'ils mettent sur pied des projets à la performance solaire ou pour contrer le décrochage. Par exemple, un professeur d'éducation physique pourrait décider de remplacer ses heures de cours par une sortie de ski de fond un samedi», a expliqué Tamara Davis.

Quant à la Fédération des commissions scolaires du Québec (FCSQ), elle préfère consulter ses membres et analyser le projet de règlement dans le détail avant de se prononcer. «Mais il n'y a jamais eu personne au niveau des commissions scolaires qui a demandé l'implantation de cela», a précisé l'attachée de presse de la FCSQ, Caroline Lemieux.

D'autres réformes

En plus de la réforme du calendrier, le projet de règlement du ministère de l'Éducation prévoit une poignée d'autres mesures. Le document indique que les premiers jours de classe de la maternelle pourraient être utilisés pour permettre une entrée progressive des bambins sur une période de cinq jours. Un directeur d'école pourrait également décider de faire redoubler la première secondaire à un élève. En raison de la réforme, les compétences des élèves sont évaluées sur une période de deux ans.

À la suite du dépôt du projet de règlement, la Fédération des comités de parents du Québec a décidé de distribuer un questionnaire à ses membres sur les réformes proposées. «Traditionnellement, les parents ont tendance à être contre les changements d'horaire et l'intégration progressive, mais on veut le confirmer dans notre réseau avant de prendre position.»

«Si ça s'inscrit dans le projet éducatif et que ça motive les élèves et les enseignants, en tant que parents on ne peut être qu'en faveur», a nuancé Claude Bouchard, commissaire-parent pour l'ordre secondaire de la Commission scolaire de Montréal. «Je n'ai pas l'impression que le gouvernement veut refaire tout le calendrier, mais on va étudier attentivement le projet pour s'assurer qu'il n'y ait pas de possibilité de dérive.»

Les groupes d'intérêts et les citoyens ont 45 jours pour faire connaître au gouvernement leur avis sur le sujet.