Les baisses du rapport élèves-enseignants imposées par la ministre de l'Éducation Michelle Courchesne entraînent d'importantes perturbations dans les commissions scolaires du Québec. Aux prises avec des surplus d'élèves, un nombre croissant de régions réclame la construction de nouvelles écoles ou d'agrandissements de bâtiments existants, a appris La Presse. Et le temps presse. Car les baisses doivent être implantées dès 2012.

Pour répondre aux baisses du rapport élèves-enseignants du ministère de l'Éducation (MELS) et qui doivent être réalisées pour 2012, plusieurs commissions scolaires de la grande région de Montréal tentent de trouver de nouveaux locaux. Dans la seule région métropolitaine, six demandes pour de nouvelles écoles et des demandes de construction d'une centaine de classes ont été placées au ministère de l'Éducation, selon un recensement de La Presse

Lors de son élection, la ministre de l'Éducation, Michelle Courchesne, s'était engagée à réduire les rapports élèves-enseignants dans les écoles primaires. Dès cette année, les classes de troisième année ne peuvent plus compter que 26 élèves. Ce même rapport sera imposé pour tous les niveaux dès 2012.

Les changements sont encore plus radicaux dans les milieux défavorisés. Dans les établissements, les classes ne pourront pas compter plus de 20 élèves dès 2012.

«Ce qui fait que dans les milieux défavorisés, on prévoit manquer de locaux!» explique la porte-parole de la commission scolaire des Hautes-Rivières (CSHR), Hélène Duchaine.

À Saint-Jean-sur-Richelieu, l'école primaire Bruno-Choquette est parmi les plus défavorisées du secteur. «On a des classes de 29 élèves qui devront passer à 20 élèves à cause du changement de ratio. L'école va perdre près du quart de sa capacité d'accueil», illustre le directeur général adjoint de la CSHR, François Lafortune.

Normande Lemieux, directrice générale de la commission scolaire des Patriotes, sur la Rive-Sud, reconnaît que les nouvelles baisses du rapport élèves-enseignants du MELS font en sorte que «les demandes de nouvelles places sur (le) territoire se font en accéléré».

Dans cette région, aucun changement n'est prévu pour la rentrée 2010-2011. Mais la baisse du rapport élèves-enseignants et l'explosion de population dans certains secteurs amènent la commission scolaire à demander rapidement des agrandissements et la création de deux nouvelles écoles.

«À Saint-Amable, il y a un boom de population. On prévoit accueillir 250 élèves de plus dans les prochaines années. De plus, ce secteur est défavorisé et fera l'objet d'importantes baisses de ratio. On demande l'ajout de 16 classes et d'un gymnase au Pavillon du Boisé, un établissement qui ne reçoit actuellement que des enfants du préscolaire», explique Mme Lemieux.

Et le temps presse. «On a déjà fait notre demande au ministère de l'Éducation. Il faut construire en 2010-2011 pour être prêt l'année suivante», dit-elle.

À Beloeil, au moins 600 nouveaux élèves s'installeront sur le territoire au cours des prochaines années. «On veut une nouvelle école de 20 locaux avec gymnase double», déclare Mme Lemieux. Et à Carignan, où plusieurs enfants doivent fréquenter l'école dans la ville voisine de Chambly par manque d'espace, la commission scolaire souhaite bâtir un nouvel établissement.

À la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys (CSMB), dans l'ouest de Montréal, plusieurs changements sont à venir. On souhaite entre autres bâtir deux nouvelles écoles primaires à Pierrefonds et à Saint-Laurent.

Déjà, à Saint-Laurent, deux importants projets d'agrandissement sont en cours et seront achevés pour la rentrée 2010-2011. Et dans toute la commission scolaire, on demande l'ajout de pas moins de 42 locaux de classe et de cinq gymnases dans sept écoles du territoire pour 2011-2012.

«Dans tous les cas, les annonces ministérielles de baisse de rapports élèves-enseignant, couplées à l'augmentation de clientèle prévue pour les cinq prochaines années au primaire, justifient les demandes de financement», écrit la CSMB dans un communiqué.

Au nord aussi

Le directeur du service de l'organisation scolaire à la commission scolaire de la Seigneurie-des-Mille-Îles, Dominic Robert, reconnaît que l'annonce des changements a des conséquences majeures chez lui.

M. Robert a placé quatre demandes d'agrandissement au MELS pour l'an prochain.

Et deux demandes de construction de nouvelles écoles primaires dans cette commission scolaire du nord de Montréal sont en traitement au gouvernement. L'une des écoles doit être bâtie à Saint-Eustache, secteur défavorisé où la population est en pleine explosion.

«Nous avons aussi placé une demande de nouvelle école à Mirabel il y a deux ans. Mais on n'a toujours pas de nouvelles», dit M. Robert.

Selon les commissions scolaires, il ne faut pas que le MELS tarde trop à lancer les projets d'agrandissement et de construction. Car les nouveaux rapports élèves-enseignants doivent être implantés dès 2012.

Au cabinet de la ministre Courchesne, on confirme que plusieurs demandes de construction et d'agrandissement d'écoles ont été envoyées au Ministère, sans toutefois pouvoir dire combien. «Ces demandes sont en cours de traitement», se contente de dire l'attachée de presse de Mme Courchesne, Tamara Davies.

Les 56 millions promis par le gouvernement pour l'embauche d'enseignants supplémentaires en lien avec les baisses de ratio ne couvriront pas les frais de construction.

Transferts d'élèves

En plus des nombreuses demandes de construction, plusieurs commissions scolaires prévoient des transferts d'élèves. C'est notamment le cas à la commission scolaire des Hautes-Rivières. Parce que la région enregistre une baisse de clientèle, aucune construction d'école ne s'y fera.

Mais certains quartiers défavorisés connaissent de fortes hausses de population. Avec les nouvelles baisses de rapport, ces écoles explosent (voir autre texte).

Pour l'instant, les commissions scolaires des banlieues de Montréal semblent plus touchées par les baisses. La Commission scolaire de Montréal (CSDM), la commission scolaire English Montreal et la commission scolaire de la Pointe-de-l'Île ne prévoient pas de changements majeurs pour l'an prochain. «Mais il pourrait y avoir des changements pour l'année suivante», dit le porte-parole de la CSDM, Alain Perron.