Des amendes plus lourdes et des mesures destinées à favoriser la francisation. Sur le terrain miné de la Charte de la langue française, le gouvernement Charest compte faire taire les critiques en donnant une réponse plus «large» au verdict de la Cour suprême sur les écoles «passerelles».

Car sur le fond, le désaveu de la loi 104 qui, depuis 2002, empêchait le transfert des élèves du réseau anglophone non subventionné au réseau anglophone régulier, Québec se pliera à l'arrêt du plus haut tribunal le transfert de ces élèves vers le réseau public anglophone sera possible, mais on exigera au moins trois ans au lieu d'une seule année de fréquentation au réseau non subventionné. Avant la loi 104, environ 1000 élèves par année accédaient au réseau anglophone en passant par ces écoles «passerelles».

 

C'est le sens du projet de loi que dévoileront aujourd'hui les ministres responsables de l'application de la Charte de la langue, Christine St-Pierre et de l'Éducation, Michelle Courchesne.

Québec proposera une série d'amendements à la Charte de la langue certains viseront uniquement à dépoussiérer des articles devenus désuets. Mais d'autres seront plus costauds: on augmentera de façon significative les amendes pour les contrevenants plusieurs n'avaient pas été touchées depuis des décennies. Aussi on aura des mesures pour améliorer la francisation, la visibilité du fait français.

«Parcours authentique»

Comme l'a révélé La Presse samedi, le gouvernement va accepter qu'un élève non anglophone puisse passer d'une école anglaise non subventionnée au réseau anglophone régulier. Mais il définira ce qui sera désormais un «parcours authentique» en anglais pour cet élève, comme l'y invitait la Cour suprême.

La continuité du passage à l'école anglaise, le choix de l'éducation pour les frères et soeurs feront partie de l'évaluation que feront désormais les fonctionnaires de l'Éducation, appelés à se pencher sur chacun des cas soumis. Mais la durée du séjour sera déterminante, personne ne se qualifiera à moins d'avoir passé trois années au réseau anglophone non subventionné.

À l'Assemblée nationale hier, le premier ministre Charest a reconnu que Québec avait opté pour une définition du «parcours authentique» plutôt que de recourir à la clause dérogatoire de la constitution, comme le préconise le Parti québécois. Pour la chef péquiste Pauline Marois, Québec devrait utiliser la clause «nonobstant» et soumettre les écoles non subventionnées à la loi 101. Si le PQ ne l'a pas fait au moment de l'adoption à l'unanimité de la loi 104 qui, en 2002, interdisait les écoles «passerelles», c'est uniquement qu'on croyait que la loi tiendrait la route devant les tribunaux, a-t-elle répliqué hier au premier ministre Charest.

Pour Mme Marois, le gouvernement devrait opter pour la recommandation du Conseil supérieur de la langue française. Dans un avis rendu l'automne dernier, l'organisme demandait qu'on soumette ces écoles à la Charte de la langue. Faire autrement équivalait à permettre aux parents d'acheter un droit constitutionnel pour leurs enfants, avait dénoncé le président Conrad Ouellon.

Pour le critique péquiste Pierre Curzi, en augmentant à trois ans la fréquentation de ces écoles, le gouvernement «ne fait qu'augmenter le prix» de ce droit. Une fois entré au réseau scolaire anglophone, l'élève obtient ce droit pour lui, ses frères et soeur et leur descendance.

Selon les commissions scolaires anglophones, le résultat de ce changement ne sera pas très différent de l'interdiction totale.