Les facultés de médecine comptent plus d'étudiants provenant de familles modestes au Québec que dans le reste du Canada, selon une récente étude. Cela s'explique en bonne partie par les droits de scolarité plus bas, affirment les chercheurs.

Les étudiants venant de quartiers ou de régions rurales peu favorisés sont ensuite plus portés à y pratiquer la médecine que les étudiants venant des quartiers riches, souligne l'un des auteurs de l'étude, le docteur Irfan Dhalla, de l'Université de Toronto. «Par effet d'entraînement, des droits de scolarité plus bas contribuent à garantir un meilleur accès aux soins à toute la population», a-t-il dit au cours d'un entretien.

«Depuis le début des années 90, les droits de scolarité ont augmenté de façon substantielle dans toutes les régions du Canada, sauf au Québec», note l'étude, publiée récemment dans la revue spécialisée Medical Education.

Les chercheurs ont examiné l'impact de ces hausses sur les caractéristiques démographiques des étudiants en médecine, sur leur endettement et sur le stress lié à l'argent, en faisant la comparaison entre le Québec et le reste du pays.

«Dans la cohorte de 2007, les étudiants du Québec étaient plus nombreux à provenir de milieux sociaux aux revenus relativement peu élevés, comparativement aux étudiants hors Québec», écrivent les auteurs. Cette année-là, près du tiers des étudiants en médecine du Québec venaient de quartiers ou de zones géographiques pauvres ou moyennement pauvres. Cette proportion était de 22% plus élevée que dans le reste du pays.

Les étudiants en médecine provenaient de familles moins riches au Québec. «La moyenne d'entre eux venaient de familles dont les revenus annuels oscillaient entre 80 000$ et 100 000$, tandis qu'en moyenne, les étudiants en médecine des autres provinces venaient de familles dont les revenus oscillaient entre 100 000$ et 120 000$», a indiqué l'une des auteurs, Laura Rosella, dans un courriel.

En 2007, les droits de scolarité étaient de 2593$ à la faculté de médecine de l'Université de Montréal et de 16 862$ à la faculté de médecine de l'Université de Toronto.

Endettement

Les chercheurs n'ont pas été étonnés de constater que l'endettement des étudiants en médecine du Québec est beaucoup moins prononcé. Leurs dettes s'élevaient en moyenne à 30 000$, comparativement à 90 000$ dans les autres provinces.

«L'augmentation de l'endettement et le stress financier peuvent avoir des effets indésirables, par exemple en amenant les étudiants à délaisser des carrières dans des spécialités relativement moins bien rémunérées comme les soins de base, les soins gériatriques ou l'enseignement, bien que la preuve à cet égard ne soit pas établie, soulèvent les auteurs. Enfin, le stress financier est associé à une moins bonne performance pendant les études médicales.»

Ces conclusions n'étonnent pas non plus la Fédération étudiante universitaire du Québec, qui se mobilise contre la hausse des droits de scolarité. Son président, Louis-Philippe Savoie, cite d'autres études sur le même sujet. «Les droits ont un impact évident sur la participation des étudiants provenant de milieux défavorisés ou modestes», dit-il.

En Ontario, lorsque les coûts pour étudier en médecine ont augmenté de 5000$ à 14 500$, la proportion d'étudiants provenant de familles ayant un revenu de moins de 40 000$ est passée de 23% à 10%. La proportion d'étudiants en médecine de l'Université Western Ontario dont les parents avaient des revenus annuels inférieurs à 60 000$ est passée de 35,6% en 1997 à 14,9% en 2000.

Selon le Journal of Higher Education, pour chaque augmentation de 1000$ des droits de scolarité, la proportion d'étudiants moins nantis susceptibles de persister et de terminer leurs études baisse de 19%, toutes disciplines confondues.

Le gouvernement du Québec envisage une hausse progressive des droits. Celle-ci sera déterminée à la suite de la Rencontre des partenaires de l'éducation, qui devrait se tenir à l'automne. Depuis 2007, les droits augmentent de 6% par année. Des groupes de lobbyisme, comme l'Institut économique de Montréal, prônent une hausse plus importante.