Les 25 millions que dépense le ministère de l'Éducation chaque année depuis 2002 dans le programme Agir autrement, qui devait permettre d'améliorer la réussite scolaire des enfants des milieux défavorisés, n'ont pas eu les résultats escomptés, révèle une étude publiée mercredi par un groupe de chercheurs de l'Université de Montréal.

«Le programme a réussi à diminuer la violence dans certaines écoles et à améliorer le climat général. Mais il n'y a eu aucun effet sur le décrochage scolaire, la motivation et l'engagement des jeunes pour leurs études», note le responsable de l'étude, le professeur Michel Janosz.

C'est à la demande du MELS que l'équipe de M. Janosz a évalué la Stratégie d'intervention Agir autrement (SIAA). Implantée en 2002 dans un peu moins de 200 écoles, cette stratégie visait la réussite des enfants des milieux défavorisés. Les écoles qui étaient subventionnées devaient établir leurs besoins, fixer des objectifs et trouver des méthodes pour les atteindre.

«Mais les écoles ont été laissées à elles-mêmes. Elles n'ont pas été en mesure d'innover pour régler leurs problèmes, note M. Janosz. Les enseignants et les directions d'école sont déjà débordés avec les problèmes du quotidien. Ils n'ont pas le temps de se pencher sur les solutions.»

M. Janosz croit que le MELS et les commissions scolaires «manquaient d'expertise» pour aider les écoles à s'améliorer. «C'est trop fort comme comparaison, mais c'est un peu comme si on avait demandé à un aveugle de guider un autre aveugle sur un terrain escarpé», dit-il. Pour aider les écoles, M. Janosz suggère la création d'un institut voué à l'acquisition et au transfert de connaissances en éducation.

Pas juste un surveillant

L'équipe de M. Janosz a remarqué que la plupart des changements apportés dans les écoles grâce au programme Agir autrement restaient «à l'extérieur» des classes. «Par exemple, on a amélioré les codes de vie, on a engagé plus de surveillants... Mais on n'a pas changé la gestion des classes ou les interventions pédagogiques», dit-il.

M. Janosz croit aussi que la SIAA «visait trop large». «Il y avait trop d'objectifs, précise-t-il. On ne peut courir 36 lièvres à la fois.» Il suggère au Ministère de se concentrer sur ce qui peut vraiment améliorer la réussite des élèves en milieu défavorisé.

M. Janosz souligne que c'est la première fois que le gouvernement accepte de faire évaluer son programme contre le décrochage scolaire. La ministre de l'Éducation, Line Beauchamp, a d'ailleurs reçu le rapport avec intérêt. Elle a annoncé qu'un comité composé des commissions scolaires, des directions d'école, du personnel enseignant et des parents serait invité à l'analyser et à donner son avis dans les prochaines semaines.

La Centrale des syndicats du Québec (CSQ) et la Fédération des syndicats de l'enseignement (FSE) souhaitent pour leur part que des redressements importants continuent d'être apportés au programme SIAA.