Les résultats d'une enquête internationale sur les compétences scolaires des jeunes, publiés plus tôt cette semaine, ont démontré que les élèves ontariens réussissent mieux que les petits Québécois en lecture. Comment expliquer cela?

Selon les dernières données du Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) diffusées mardi, les élèves de 15 ans du Québec ont obtenu un score de 522 en lecture, alors que la moyenne internationale est de 496. Le Québec se classe ainsi au sixième rang des 65 pays qui participent au PISA.

Le Québec s'illustre donc en lecture, mais l'Ontario le devance, avec une moyenne de 531. Au Canada, seule l'Alberta fait mieux. Mais le PISA précise que les résultats de l'Alberta comportent une trop grande marge d'erreur pour être comparables.

Que fait donc l'Ontario pour obtenir de si bons résultats? Selon le ministère de l'Éducation de l'Ontario, la recette est simple: depuis 2003, toutes les énergies sont mises pour améliorer les notes des élèves dans les matières de base - lecture, écriture et mathématiques.

«Nous avons augmenté le financement en éducation de 40% depuis 2003, et ce, même si notre réseau compte de moins en moins d'élèves», explique le porte-parole du Ministère, Gary Wheeler.

Tests nationaux

L'Office de la qualité et de la responsabilité en éducation (OQRE), organisme provincial indépendant financé par le gouvernement ontarien, procède chaque année à des tests nationaux de lecture, d'écriture et de mathématiques auprès des élèves de troisième, sixième et neuvième année.

Le gouvernement a fixé des cibles de réussite à ces évaluations: 75% des élèves de sixième année de toutes les écoles doivent obtenir la note de passage en lecture et en écriture. En neuvième année, 85% des élèves doivent réussir le test provincial de lecture et d'écriture (TPCL).

Les écoles qui ont de la difficulté à atteindre ces cibles reçoivent l'aide du Secrétariat à la littéracie et à la numératie, mis sur pied en 2003. Ses quelque 80 «agents du rendement des élèves» se rendent dans les écoles moins performantes et aident les enseignants et les élèves à s'améliorer.

Toutes les statistiques montrent que ces initiatives ont remporté un franc succès. En 2002, seulement 54% des jeunes Ontariens de troisième et sixième années avaient des résultats supérieurs à la moyenne provinciale dans les matières de base. Cette année, ils sont 68%, une augmentation de 50 000 élèves.

Mesures mises en place

François Benoît, directeur de l'éducation du Conseil des écoles publiques de l'est de l'Ontario (CEPEO, l'équivalent d'une commission scolaire), a accepté de détailler les mesures mises en place par le gouvernement ontarien pour améliorer les résultats des élèves.

«Dès qu'un enfant entre à la maternelle, on analyse ses forces et ses faiblesses en lecture, en écriture et en mathématiques. Dans chaque école, un enseignant est responsable de l'apprentissage de la lecture. Avec une équipe-école, il décide des actions à mener pour aider les jeunes en difficulté», explique M. Benoît.

Plusieurs fois par mois, des enseignants sont libérés pour discuter entre eux des meilleures façons d'aider les élèves à s'améliorer en lecture. «On met ensuite ces idées en pratique. Et on aide les parents. On met énormément d'efforts entre la première et la troisième année, parce que c'est à ce moment que se joue le principal de la compréhension des jeunes élèves en lecture», dit M. Benoît.

Depuis l'implantation de ces méthodes, le CEPEO a vu son taux de réussite en troisième année passer de 47 à 70% en lecture. En sixième année, ce taux est passé de 67 à 78%. «Ça marche très bien», affirme M. Benoît. Cette réussite a un effet direct sur le taux d'obtention du diplôme d'études secondaires: à la seule CEPEO, il est passé de 88 à 94% en cinq ans. À l'échelle provinciale, le taux d'obtention du diplôme d'études secondaires était de 79% en 2008-2009 en Ontario, une augmentation de 11% en cinq ans.

Actuellement, au Québec, le taux d'obtention du diplôme d'études secondaires chez les moins de 20 ans est de 72%.

Pas parfait

Mais un incident survenu cet automne laisse croire que l'énorme pression exercée sur les écoles ontariennes pour obtenir de bons résultats n'a pas que des retombées positives. Dix écoles ont fait l'objet d'une enquête en septembre pour avoir triché aux examens nationaux. Ces écoles fautives sont des exceptions parmi les 5000 écoles primaires et secondaires de la province. Mais certains experts ont noté que la pression pour atteindre les cibles gouvernementales peut entraîner des dérives.

La Fédération des enseignants de l'élémentaire de l'Ontario (FEEO) a réclamé cet automne que les examens nationaux soient suspendus pour deux ans, le temps de tenir des consultations publiques sur «l'utilité, la valeur et l'impact» d'un tel mode d'évaluation. Selon la FEEO, les écoles sont si soucieuses des résultats dans les matières de base qu'elles négligent l'enseignement de matières comme les sciences, l'histoire, les études sociales et les arts.

Professeure au département des sciences de l'éducation à l'Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR), Louise Lafortune croit que même si l'Ontario a obtenu de bons résultats au PISA, le Québec ne devrait aucunement tout mettre en oeuvre pour l'imiter. Selon elle, les résultats du Québec sont tout à fait louables.

«Ça fait 10 ans qu'on tape sur le système de l'éducation québécois. Mais on est parmi les meilleurs au monde! Pourquoi ne pas regarder nos bons coups?» demande-t-elle.

Mme Lafortune croit que le Québec ne doit pas se comparer seulement à son voisin, mais aussi aux autres pays francophones. «On voit que le Québec arrive bien avant les autres», dit-elle.

En effet: alors que le Québec obtient une note de 522 en lecture, la Belgique a 506; la Suisse, 501 et la France, 496. «Le Québec n'a absolument pas à être gêné! martèle Mme Lafortune. Il ne faut pas faire table rase sur ce qu'on a accompli simplement pour imiter l'Ontario.»

Notes moyennes en lecture selon le PISA

Shanghai: 556

Corée: 539

Finlande: 536

Hong-Kong: 533

Alberta: 533

Ontario: 531

Singapour: 526

Colombie-Britannique: 525

Canada: 524

Québec: 522