L'attribution des places à 7$ dans les centres de la petite enfance de la métropole favorise nettement les enfants riches au détriment des enfants pauvres.

Pourtant, ce sont eux qui en ont le plus besoin, déplore le directeur de santé publique de Montréal dans un rapport portant sur les inégalités sociales, dévoilé aujourd'hui et dont La Presse a obtenu copie.

L'une des recommandations principales du rapport est d'ailleurs d'améliorer l'accessibilité aux centres de la petite enfance (CPE) pour les enfants des quartiers défavorisés.

Il convient de revoir l'accessibilité géographique, mais aussi l'accessibilité économique. De plus, il importe que tous les parents se sentent bienvenus comme utilisateurs», peut-on lire dans le rapport.

Plusieurs études ont démontré que la fréquentation d'un service de garde de qualité réduit les inégalités de développement chez les enfants de la maternelle. C'est particulièrement le cas sur le plan de la socialisation et du développement du langage.  

Dans un rapport récent, la Direction de la santé publique (DSP) avait démontré que 40% des enfants des quartiers pauvres de Montréal accusent un retard sur au moins un plan de leur développement comparativement aux autres enfants.

Les CPE sont généralement de meilleure qualité que les autres services de garde et contribuent à réduire ces inégalités entre les enfants, explique Marie-France Raynault, auteure principale du rapport, professeur en santé publique à l'Université de Montréal et directrice du Centre Léa-Roback.

Or, les services de garde de moins bonne qualité se trouvent davantage dans les quartiers pauvres, souligne le rapport. L'accès aux places à 7$ est également plus limité dans les secteurs comme Anjou, Centre-Sud, Verdun, Lachine et LaSalle.

Nous avons un très bon système actuellement au Québec. Le seul problème est que les enfants des milieux très défavorisés n'y vont pas pour trois raisons: des raisons culturelles, économiques et géographiques», déplore Mme Raynault. Alors que le manque de places est criant, surtout dans les CPE, les enfants de parents qui sont prestataires de l'aide sociale ne sont pas toujours les bienvenus, affirme Mme Raynault.

Les places disponibles à proximité de leur maison sont souvent réservées pour des travailleurs de l'extérieur du quartier.

Dans Centre-Sud, qui est un quartier défavorisé, on peut dire qu'il y a beaucoup de CPE en installation, mais ce sont des garderies en milieu de travail», fait valoir Mme Raynault.

Résultat, les familles à faible revenu utilisent moins régulièrement les services de garde. Les enfants y passent moins d'heures chaque semaine et y sont inscrits à un âge moins précoce que dans les familles aisées.

Le rapport sonne aussi l'alarme sur la diminution de l'offre de service dans les CPE au cours des dernières années, au profit des garderies privées et du milieu familial.

Les CPE comptaient 50% des places sur l'île de Montréal en 1998. Une proportion qui a glissé à 35,5% aujourd'hui.

Évaluer le chemin parcouru

Le rapport dévoilé aujourd'hui fait suite au premier rapport sur les inégalités sociales, présenté par le directeur de la santé publique de Montréal, Richard Lessard, en 1998. Un regard sur le chemin parcouru permet de constater que Montréal a fait des avancées dans plusieurs domaines.

Mais il reste encore beaucoup de travail, notamment pour rehausser le revenu des plus démunis, améliorer la salubrité des logements et l'accessibilité aux soins de santé, principalement pour les immigrants. Le rapport propose 10 recommandations en ce sens.  

La pauvreté est l'un des facteurs de risque les plus importants de la santé, croit la Direction de la santé publique. «Nous avons voulu offrir des pistes de solutions faisables dans le contexte montréalais», précise Mme Raynault.