Les craintes des parents et du personnel de l'école primaire Saint-Gérard se sont avérées fondées. La présence de moisissures force la fermeture de l'école dès mercredi, et la Direction de la santé publique confirme que la mauvaise qualité de l'air a pu rendre certains enfants malades.

Les tests effectués juste avant les vacances des Fêtes révèlent la présence dans l'air de moisissures atypiques pathogènes et toxigènes, dont le champignon Aspergillus versicolor, qui peut causer du tort aux poumons.

La Direction de la santé publique a été informée de la situation le 5 janvier par la firme ayant mené les analyses dans le vieux bâtiment du quartier Villeray. Informée à son tour, la direction de la Commission scolaire de Montréal (CSDM) a déclenché un plan de déménagement d'urgence.

En soirée mardi, la direction a rencontré les parents des quelque 400 élèves de l'école. Elle leur a demandé d'envoyer leur enfant à l'école pour la dernière journée, aujourd'hui, afin de ramasser leurs effets personnels. Des suppléants et du personnel additionnel du service de garde seront sur place pour épauler les enseignants, qui devront vider leurs classes.

Dès demain, les élèves et le personnel seront transférés quelques coins de rue plus loin, au collège Ahuntsic, où le prochain semestre ne débute que le 23 janvier. Ils seront ensuite déménagés à long terme dans un endroit qui n'a pas encore été déterminé.

Jusqu'à deux ans

La CSDM prévoit que le transfert durera de 18 à 24 mois, le temps de réaliser les travaux nécessaires à l'assainissement du bâtiment.

«Je dois vous avouer que c'est quelque chose de gros qui m'arrive, qui vous arrive, qui arrive à mon personnel, à tout le monde», a déclaré la directrice de l'établissement, Louise Beauchamp, devant les centaines de parents réunis mardi soir.

Toute l'histoire avait débuté l'an dernier, lorsqu'un tuyau de canalisation a éclaté, provoquant un dégât d'eau dans l'école. Depuis, des travaux de construction ont été mis en branle.

L'automne dernier, des parents se sont plaints que leurs enfants étaient malades. Des membres du personnel également. Plusieurs présentaient des problèmes respiratoires.

«Nous avons mis de la pression avant de partir pour les vacances de Noël, à la demande du personnel qui trouvait la situation de plus en plus insupportable», explique le porte-parole de l'Alliance des professeurs, Yves Parenteau.

«Ma fille, ça fait deux mois qu'elle est malade, et moi aussi», a lancé en reniflant Céline Bouillon, lors de la réunion de mardi.

Même son de cloche du côté de la présidente du conseil d'établissement, Chantal Laperrière, dont les deux enfants fréquentent l'école. «Mon fils est malade depuis septembre», s'inquiète-t-elle.

Le Dr Louis Jacques, de la Direction de la santé publique, a expliqué qu'il est possible que ces cas soient liés aux moisissures, mais qu'il est impossible de le confirmer pour l'instant. Un suivi médical sera offert à ceux qui en auraient besoin.

Pas une première

Les problèmes de ce genre commencent à s'accumuler dans les écoles de Montréal, déplore l'Alliance des professeurs. Les annexes Saint-Raymond et Sainte-Jeanne d'Arc ont été fermées l'an dernier pour cause de moisissures. À l'automne, ç'a été le tour des écoles Baril et Hochelaga et maintenant, Saint-Gérard.

«Ça commence à être beaucoup pour du hasard, ce sont tous de vieux bâtiments qui ont plus de 60 ans», déclare M. Parenteau.

Après la réunion d'information, plusieurs parents se sont dits rassurés par le plan d'urgence et se sont portés volontaires pour donner un coup de main. Mais plusieurs ont déploré que les pouvoirs publics aient laissé le bâtiment se détériorer.

«Ce qu'il faut retenir, c'est le laxisme dans la gestion de nos infrastructures. C'est comme pour nos routes. Les gens ont du mal à retenir les leçons», déplore un parent, François Mailloux.

«La plus grosse tristesse, c'est de perdre notre petit joyau de quartier. C'est une école à échelle humaine ici. Tous les parents se connaissent, on fait même des partys de ruelle. Les habitudes de vie vont être chamboulées. Et ma petite fille de 8 ans, sa place n'est pas dans un cégep», poursuit-il.