Le Québec exige une contribution parentale à l'éducation postsecondaire à partir d'un seuil de revenu deux fois moins élevé que dans les autres provinces. Des parents québécois ayant deux enfants, dont un fréquente l'université, sont sollicités dès que le salaire familial atteint 25 000$.

Ailleurs au pays, le salaire familial doit dépasser 60 000$, voire 70 000$, pour que les prêts et bourses soient amputés. La bonification du régime de prêts et bourses québécois prévue d'ici à 2016 relèvera légèrement le seuil: pour une famille n'ayant qu'un seul enfant, il passera de 29 000$ à 35 000$.

Les bourses sont les premières à être annulées par l'effet de la contribution parentale: au Québec, dès que le revenu familial dépasse 44 000$ (pour une famille de deux enfants dont un fréquente l'université), il n'y a plus que des prêts, selon le calculateur du site de l'Aide financière aux études du ministère de l'Éducation (AFE).

L'AFE déduit du salaire familial une dépense de «maintien de l'unité familiale» de 15 274$, plus 14% du salaire du parent gagnant le moins, plus un peu moins de 3000$ par enfant. Mais s'ajoutent au salaire les avantages fiscaux et subventions liées aux enfants (4000$, dans le cas d'une famille de deux enfants, dont un est à l'université).

Ailleurs au pays, cette exemption est appelée «niveau de vie moyen», et reflète donc davantage la classe moyenne - le seuil est par exemple de 48 000$ en Ontario et au Nouveau-Brunswick et de 64 000$ en Alberta, selon l'Association ontarienne des étudiants au baccalauréat.

Au Québec, selon l'Institut de la statistique, moins de 15% des familles gagnent moins de 30 000$, la moitié gagnent plus de 60 000$ et le tiers plus de 80 000$.

Les différences du régime québécois de prêts et bourses ne s'expliquent pas par les droits de scolarité, qui sont deux fois moins importants que la moyenne canadienne. C'est que le calcul des prêts et bourses prend en compte l'ensemble des dépenses d'un étudiant, y compris le logement, les manuels, le transport et la nourriture. Les droits de scolarité représentent au maximum le quart des dépenses couvertes par le régime.

Par exemple, un étudiant qui a un frère au secondaire et deux parents gagnant au total 30 000$, et qui n'habite pas chez ses parents, recevra un prêt de 2440$ et une bourse de 6045$, et l'ALE présume que ses parents lui fourniront 704$, pour un total de 9189$. Pour la même situation dans le cas d'un revenu familial de 60 000$, le prêt est de 2440$, la bourse de 836$ et la contribution parentale de 5900$. Ces chiffres ne valent que pour les étudiants «dépendants» de leurs parents.

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Volte-face au Nouveau-Brunswick

En 2006, le Nouveau-Brunswick est devenu la seule province à ne pas exiger des parents qu'ils contribuent aux études de leurs enfants majeurs. Le changement a été de courte durée: l'an dernier, pour économiser 1,6 million par année, le gouvernement a réintroduit la contribution parentale. «Certains de nos membres ont vu leur prêt amputé de 75%», déplore Jordan Thompson, président de l'association étudiante de l'Université du Nouveau-Brunswick à Fredericton. «Ceux qui bénéficiaient de l'ancienne règle n'étaient certainement pas des riches. Ils demandaient un prêt, pas une bourse.»

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Quand le revenu des parents ne compte plus

À quel moment le revenu des parents cesse-t-il d'être pris en compte pour le calcul des prêts et bourses au Québec? Bien évidemment, si l'étudiant est orphelin. Mais aussi s'il a vécu en famille d'accueil, s'il a un enfant ou s'il est marié ou a une union civile (certains contractent un mariage en blanc à cet effet). Un étudiant est aussi présumé indépendant de ses parents s'il a accumulé 90 crédits (l'équivalent de trois ans d'études normales) dans un même programme universitaire, s'il a travaillé pendant deux ans ou s'il a cessé d'étudier depuis sept ans.