Le fossé se creuse entre les établissements d'enseignement et les étudiants et cégépiens en grève, qui font face à une pluie d'injonctions et de recours divers pour les forcer à reprendre les cours.

Le cas le plus récent est celui de l'Université de Montréal, qui vient d'obtenir une injonction interdisant à ses 17 000 étudiants en grève - sur les 40 000 inscrits à temps plein - de bloquer le campus ou les salles de cours.

«Nous voulons le plus possible limiter les perturbations. C'est vraiment le sens de l'injonction», a expliqué la porte-parole de l'UdeM, Flavie Côté.

L'Université avait fixé au 10 avril la date butoir pour la reprise des cours, après quoi elle ne pouvait garantir que toute la matière serait vue avant le 15 juin, début de la période estivale.

Parallèlement à l'injonction, la direction de l'UdeM a aussi enjoint à ses professeurs et chargés de cours de donner leurs cours dès qu'au moins un étudiant est en classe.

«Les cours qui sont donnés mais qui auront été manqués par les étudiants en grève ne pourront être repris», précise Mme Côté.

Ce message survient au lendemain d'une déclaration de la ministre de l'Éducation, Line Beauchamp, qui avait pressé les universités et les cégeps de «tout mettre en oeuvre» pour que les cours reprennent.

Choquée par le geste de l'Université, la Fédération des associations étudiantes du campus de l'Université de Montréal (FAECUM) se satisfait d'avoir au moins réussi à négocier le maintien des piquets de grève.

«Le piquetage est toujours toléré et, pour nous, c'était très important, étant donné que c'est notre seule façon de faire reconnaître et d'appliquer la grève sur le campus», a expliqué la secrétaire générale de la FAECUM, Stéfanie Tougas.

La tournure judiciaire que prend la grève étudiante est toutefois déplorable, souligne Mme Tougas. «C'est un triste jour pour le droit de grève. Ça commence à être intense. C'est la mode de poursuivre les étudiants. Pour nous, c'est une lutte politique, pas une lutte judiciaire.»

En réaction à l'injonction, des étudiants en colère ont d'ailleurs manifesté en fin de journée à l'Université de Montréal. Des vitres ont été brisées et de la peinture rouge a été lancée à l'intérieur du pavillon principal.

En plus de l'Université de Montréal, le Conservatoire de musique de Montréal et l'Université du Québec à Chicoutimi (UQAC) ont aussi obtenu, dans les derniers jours, une injonction pour leur permettre de donner les cours.

À l'Université du Québec en Outaouais (UQO), c'est plutôt un groupe d'étudiants qui demande à pouvoir assister aux cours. La requête doit être entendue aujourd'hui.

Comme la grève est toujours en cours, la direction de l'UQO a de son côté maintenu hier la levée des cours décrétée le 29 mars, malgré l'appel pressant de la ministre à reprendre la classe.

À l'UQO, la grève dure depuis un mois, et non deux comme ailleurs, explique le recteur, Jean Vaillancourt. «On comprend qu'elle [la ministre] s'adresse à une situation panquébécoise à géométrie variable, et l'Université du Québec en Outaouais est dans une situation beaucoup moins critique.»

De leur côté, les étudiants et cégépiens maintiennent la ligne dure. Les élèves du cégep de Saint-Laurent ont ainsi reconduit la grève dans une proportion de 95% hier. Ils ont même réclamé le gel des droits de scolarité et le retour au coût de 2007 avant de mettre fin à la grève.

Les étudiants de la faculté des sciences de l'éducation de l'UQAM se sont prononcés hier soir à 62% pour la poursuite de la grève jusqu'à ce que le gouvernement fasse une offre sur la hausse des droits de scolarité.