Les enquêteurs de la Gendarmerie royale du Canada ont saisi un nombre record de cartouches de cigarettes provenant de la contrebande en 2008. En tout, les limiers ont mis la main sur plus d'un million de cartouches, dépassant facilement le record de 625 000 cartouches établi... en 2007.

Ces chiffres confirment que la contrebande de tabac prend de plus en plus d'ampleur au pays, selon des documents obtenus par La Presse en vertu de la Loi sur l'accès à l'information. Une cartouche contient huit paquets de 25 cigarettes.

Au total, la GRC compte 500 policiers qui ont le seul mandat de lutter contre la contrebande de tabac d'un bout à l'autre du pays, même si ce fléau est surtout concentré au Québec et en Ontario.

Le marché illégal de la vente de tabac fait d'ailleurs perdre beaucoup d'argent au fisc fédéral. Selon le ministre du Revenu, Jean-Pierre Blackburn, les pertes friseraient les deux milliards de dollars uniquement à Ottawa. Au Québec, les pertes de revenus auraient atteint les 300 millions l'an dernier.

«C'est beaucoup d'argent», a affirmé d'emblée vendredi le ministre Blackburn. «Ce fléau nous fait perdre beaucoup d'argent, mais il brise aussi notre jeunesse et il brise des vies», a affirmé, vendredi, le ministre Blackburn dans une entrevue accordée à La Presse.

Le ministre part d'ailleurs en croisade pour convaincre les Canadiens qui fument d'éviter d'acheter des cigarettes de contrebande. Son ministère lancera d'ici un mois une offensive publicitaire nationale affirmant que les fumeurs qui achètent des cigarettes de contrebande soutiennent indirectement les activités du crime organisé.

Au début du mois de juin, les policiers ont d'ailleurs démantelé un réseau de trafic de stupéfiants et de contrebande de tabac exploité par les Hells Angels dans plusieurs régions du Québec.

«Il faut faire prendre conscience aux gens des conséquences de leur geste. Il y a un lien direct entre la contrebande du tabac et le crime organisé», a affirmé le ministre. Cette campagne publicitaire devrait coûter au moins 4 millions.

Le gouvernement Harper doit d'ailleurs être saisi sous peu de recommandations d'un groupe de travail chargé de proposer des moyens de lutter plus efficacement contre la contrebande de tabac.

Des représentants de quatre ministères fédéraux -Sécurité publique, Revenu, Affaires indiennes, Santé-, de la GRC et de l'Agence canadienne des services frontaliers ont mis la main à la pâte au cours des derniers mois pour produire ce rapport.

Selon le ministre Blackburn, il est évident que les peuples autochtones devront participer à l'élaboration des solutions. D'autant plus que la réserve d'Akwesasne, qui chevauche le Québec, l'Ontario et l'État de New York, est reconnue par les autorités canadiennes et américaines comme une plaque tournante de la contrebande du tabac, sans parler du trafic de drogue.

Le ministre a aussi confirmé une autre mesure qui entrera en vigueur d'ici 12 mois pour combattre le commerce illégal du tabac. Ainsi, les fabricants de tabac seront tenus d'apposer un hologramme sur chaque paquet de cigarettes mis en vente. Ces bandes ressembleront aux hologrammes qu'appose la Monnaie royale du Canada sur les billets de banque mis en circulation.

Les compagnies manufacturières devront se procurer auprès de l'Agence du revenu des bandes holographiques inimitables. À l'heure actuelle, les contrebandiers réussissent à imiter les paquets de cigarettes et le petit timbre de cellulose.

Avec la collaboration de William Leclerc