Récemment condamné dans une affaire d'importation de 600 kg de haschisch à la fin des années 90, «l'artiste-gangster» Serge Charron, qui a longtemps frayé dans l'entourage des frères Dubois, devra purger les deux tiers de sa peine de quatre ans avant de reprendre sa liberté.

«Votre remise en question n'est pas honnête ni sincère», ont conclu les commissaires. À quatre mois de sa libération d'office, Charron, qui est incarcéré depuis avril 2007, souhaitait ardemment retourner à l'air libre afin d'achever la sculpture d'un immense canot en bois et en bronze pesant une tonne. Selon lui, cette oeuvre d'art, destinée à la Promenade Champlain, à Québec, doit être livrée cet automne.

 

Établi dans la région de Saint-Sauveur, Charron, 59 ans, tenait également à sortir sur-le-champ en vue d'aider sa femme qui «en arrache financièrement» depuis son incarcération, ainsi que son fils de 17 ans, qui entreprend des études à Montréal.

Mais les commissaires Denis Couillard et Anne-Marie Asselin n'ont finalement pas adhéré à ses beaux projets. À l'issue d'un délibéré d'une brièveté peu commune pour une séance de la Commission nationale des libérations conditionnelles (CNLC), ils ont estimé qu'il était toujours un bandit dans l'âme et qu'il avait encore beaucoup de chemin à faire pour modifier ses valeurs sociales. «Depuis votre dernière audience, vous êtes le même individu, vous n'avez pas changé», ont dit les commissaires, en l'invitant à approfondir sa réflexion au cours des quatre mois qu'il lui reste à passer en prison.

Malgré les promesses de Charron, qui en est à son deuxième passage dans un pénitencier fédéral pour trafic de drogue, les commissaires pensent qu'il est encore fragile et qu'il pourrait récidiver s'il se heurte à des problèmes financiers. «Si une organisation a fait appel à vous pour distribuer 600 kilos de haschisch, c'est que vous êtes un homme de confiance. Et ce n'était pas n'importe laquelle, c'était le clan Matticks», ont-ils noté en rappelant que le projet original était d'importer 2,6 tonnes de drogue.

«Le milieu criminel, c'est fini. Ils m'ont pas aidé gros depuis que je suis en prison. S'ils aident pas les gars, c'est fini avec moi», a clamé Serge Charron, en rappelant notamment que sa femme avait dû vendre sa maison de Saint-Sauveur pour emménager dans un «petit quatre et demie». Il affirme en outre ne plus avoir eu de contact avec son frère Alain depuis la saisie des 600 kg, en 2000. «Ça fait neuf ans qu'il ne me parle plus», a-t-il dit aux commissaires.

Ancien tueur à gages des frères Dubois, Alain Charron s'est empli les poches dans le trafic de haschisch à grande échelle. Après des années d'incarcération aux Bahamas et aux États-Unis, il a été libéré en 2005. Il vient de fêter ses 63 ans. Dans les années 60 et 70, Alain Charron faisait équipe avec le célèbre truand Donald Lavoie, devenu délateur. Les deux hommes avaient la détente facile et étaient craints comme la peste dans le milieu interlope montréalais.