«Histoire cousue de fil blanc», «invraisemblable», «rocambolesque» et «farfelue». Le juge Jean Sirois n'était pas à court d'adjectifs, hier, pour souligner à quel point il n'avait pas cru le témoignage de la chanteuse Michèle Richard durant son procès pour conduite avec facultés affaiblies.

La vedette de 63 ans a été reconnue coupable de conduite avec facultés affaiblies, hier, au palais de justice de Saint-Jérôme. Son procès, qui a duré cinq jours, s'est déroulé sur une période de 17 mois. C'est la troisième fois que Mme Richard est accusée pour des infractions similaires, mais la première qu'elle est condamnée.Le 23 décembre 2005, en fin d'après-midi, Mme Richard conduisait sa Volvo de manière erratique sur l'autoroute des Laurentides à la hauteur de Saint-Sauveur. C'est un citoyen qui a téléphoné à la police.

Les agents ont dû bloquer l'entrée de la ville pour l'arrêter puisqu'elle n'avait pas réagi aux gyrophares, à la sirène et au porte-voix. Lorsque les policiers l'ont interceptée, ils ont constaté divers symptômes de conduite en état d'ébriété.

Une fois au poste, elle a déclaré «S.V.P. arrêtez, savez-vous ce que cela va faire dans tout le Québec? Savez-vous que la Terre va trembler?» Une fois au poste, Mme Richard a demandé aux agents d'aller aux toilettes. Lorsque les policiers ont tardé à répondre à sa demande, elle a dit: «Voulez-vous que je le fasse drette icitte?».

Mme Richard s'est finalement rendue aux toilettes. Les policiers ont alors remarqué une «démarche chancelante». Elle marchait à petits pas et s'appuyait avec la main droite sur le mur.

«Démarche de mannequin»

Pendant son procès, elle s'est défendue en disant que c'était sa «démarche de mannequin» utilisée sur scène et qu'elle reprend instinctivement lorsqu'elle se trouve dans un lieu public. «Je trouve cela complètement farfelu», a indiqué le juge Sirois dans son jugement de 16 pages.

La chanteuse s'est soumise à des alcootests, qui ont donné des résultats de 144 mg et 135 mg (la limite étant de 80 mg par 100 ml de sang).

Au procès, elle a contesté la fiabilité de l'appareil. Une telle défense n'est plus possible depuis des changements apportés par le législateur. Mais puisque l'infraction reprochée est antérieure aux changements à la loi, la chanteuse avait le droit de présenter cette défense. Le juge Sirois estime toutefois que la preuve présentée n'a pas soulevé de doute raisonnable quant à la quantité d'alcool réellement consommée.

Mme Richard a juré n'avoir bu qu'une demi-bouteille de champagne Veuve Cliquot en compagnie d'un vieil ami, Denis Gilbert, durant une période d'une heure et demie. Or, le magistrat a qualifié le témoignage de M. Gilbert de «complaisant» et ne lui a accordé «aucune crédibilité».

La chanteuse a aussi expliqué ses fausses manoeuvres au volant par une bagarre entre son chien, un labrador-berger allemand de 82 livres et sa chatte himalayenne, aussi à bord du véhicule. Les deux bêtes se seraient disputé le siège avant, chauffant.

Le juge Jean Sirois ne l'a pas davantage crue. «Je considère sa version invraisemblable sur plusieurs points. Il s'agit d'une histoire cousue de fil blanc, apprise par coeur et par moments rocambolesque», a-t-il tranché.

Après avoir reçu le verdict, Mme Richard a dû remettre son permis de conduire sur-le-champ. Il lui sera interdit de conduire pendant un an. Elle doit aussi payer une amende de 800 $.

Le procureur de la Couronne, Me Maxime Lacoursière, s'est dit satisfait du verdict. De son coté, l'avocate de la défense, Me Roxane Hamelin, a indiqué qu'elle étudierait le jugement avant de commenter davantage. Mme Richard s'est refusée à tout commentaire. La femme de 63 ans a quitté le palais de justice en voiture: son avocate au volant, elle, assise du côté passager.