Les détenus des prisons fédérales retrouvent le droit de fumer à l'extérieur des murs de la prison. Le juge de la Cour fédérale Luc Martineau vient de déclarer illégale la directive qui leur avait complètement interdit le tabac.

La directive 259 implantée par les Services correctionnels en mai 2008 va beaucoup trop loin. Une prohibition totale de fumer à l'intérieur et à l'extérieur est «injustifiable et déraisonnable», signale le magistrat dans son jugement, qu'il a rendu une semaine à peine après avoir entendu l'affaire. Il rappelle que la possession de tabac n'est pas interdite par la loi. Et empêcher les détenus de fumer à l'extérieur des bâtiments de la prison n'a aucun lien rationnel avec le droit des non-fumeurs de ne pas être exposés à la fumée secondaire, puisque que ça ne cause pas de risque à autrui.

«Qu'il s'agisse d'un droit ou d'un privilège, même détenu, le délinquant continue à jouir des droits et privilèges reconnus à tout citoyen, sauf ceux dont la suppression ou la restriction est une conséquence nécessaire de la peine qui lui est infligée», note le juge.

Me Julius Grey a plaidé cette cause pour un groupe de détenus de divers pénitenciers du Québec, mais le jugement s'appliquera à toutes les prisons fédérales du Canada. Selon les représentations faites devant le tribunal, c'est environ 75% de la population carcérale qui fume. L'interdiction de fumer a été imposée dans les pénitenciers en janvier 2006, mais les détenus pouvaient continuer de fumer à l'extérieur. En mai 2008, la directive a été resserrée, pour interdire aussi de fumer à l'extérieur. Selon les détenus, cela a donné lieu à toutes sortes de problèmes et a engendré un trafic de tabac.

Le Service correctionnel du Canada plaidait de son côté qu'il était difficile de faire respecter l'interdiction de fumer à l'intérieur, étant donné que les détenus avaient du tabac. La seule façon d'éliminer la fumée secondaire à l'intérieur des bâtiments était donc d'en éliminer la source. Le juge a rejeté cet argument: fumer à l'intérieur constitue une infraction disciplinaire qui entraîne des peines allant de l'avertissement à l'isolement, en passant par la perte de privilèges et les amendes, rappelle-t-il.

Il a été impossible de joindre ce soir les avocats du Service correctionnel pour savoir s'ils interjetteraient appel du jugement.