Les usagers de drogues de synthèse font une grave erreur en pensant que les revendeurs leur refilent du speed et de l'ecstasy de grande qualité. «Dans 54% des cas, l'utilisateur ne sait pas vraiment ce qu'il consomme», a déclaré Benoît Archambault, gestionnaire du Service d'analyse des drogues de Santé Canada, qui s'inquiète de la popularité croissante et de la banalisation de ce type de psychotropes.

Un rapport rendu public lundi montre que ces petites pilules de plus en plus prisées par les adolescents et les amateurs de raves de partout au Québec sont rarement pures. Elles contiennent souvent de l'éphédrine, de la caféine, des calmants ou de la kétamine. «Il y a souvent des mélanges de deux, trois et même parfois plus de substances actives», souligne M. Archambault.L'analyse de 365 comprimés saisis par la police entre juin 2007 et juillet 2008 démontre que, dans le cas de l'ecstasy, par exemple, l'utilisateur se fait jouer quatre fois sur cinq. La plupart du temps, il s'agit carrément d'une autre drogue que le MDMA ou encore d'un mélange de diverses substances, dont de la caféine. «Seulement 22% des comprimés analysés étaient vraiment de l'ecstasy», a indiqué le haut fonctionnaire de Santé Canada.

En confirmant ainsi pour la première fois la composition véritable des comprimés de métamphétamine (speed) et d'ecstasy en vente sur le marché noir, les autorités fédérales espèrent sonner l'alarme auprès des usagers et de la population en général. Elles souhaitent aussi sensibiliser les travailleurs sociaux, les médecins et les autres intervenants pour qu'ils adaptent leurs diagnostics et les traitements.

L'étude est d'autant plus pertinente, selon la sergente Suzanne De Larochellière, experte en drogues à la Sûreté du Québec, que la popularité des drogues synthétiques est en hausse. «Mis à part la marijuana et le haschisch, les méthamphétamines et l'ecstasy représentent 50% des saisies dans les différentes régions du Québec», a-t-elle dit en conférence de presse. Selon elle, la consommation de ces drogues est bien plus répandue qu'on ne croit. «On parle de personnes entre 15 et 40 ans», a-t-elle précisé.

À en croire le Dr Claude Rouillard, qui a participé à l'étude, la composition douteuse des drogues fabriquées dans les laboratoires clandestins accroît les risques de problèmes de santé, qui ne sont déjà pas rares: anxiété, perte de sommeil et de concentration, problèmes psychotiques se font plus fréquents depuis 10 ans. «On est à même de le constater dans les urgences psychiatriques des hôpitaux durant le week-end», a-t-il dit.